3.1.1.2. Le seuil visuel et le tâche d’identification lexicale

Généralement deux tâches sont utilisées dans l’évaluation du seuil visuel: la tâche de reconnaissance après présentation brève du stimulus, et celle de la décision lexicale. Dans l’étude de Small (1985) et celle de Small et Robins (1988), le seuil visuel pour la reconnaissance des mots liés à l’émotion négative a été plus bas par rapport à des mots neutres, chez des participants ayant été soumis à une procédure d’induction déprimante (Depressing Mood Induction Procedure). Dans la recherche de Small et Robins (1988) en particulier, le seuil perceptif pour les mots positifs antonymes du terme «dépression» ont également été plus bas que pour les mots neutres. Mais, dans l’étude de Gerrig et Bower (1982), les participants induits émotionnellement n’ont pas montré de seuil plus bas pour l’identification de stimuli émotionnels liés à la dépression.

Dans une étude sur l’anxiété, Mathews (1988) a rapporté que le seuil de reconnaissance des mots liés à l’anxiété n’était pas plus bas chez des anxieux que chez des sujets témoins. Mais ces résultats ne doivent pas être interprétés de manière hâtive puisque dans l’étude de MacLeod & Mathews, (1991b) dans laquelle les mots étaient présentés avec un autre stimulus (non-mot), les patients anxieux montraient plus de rapidité pour la décision lexicale avec des mots liés à l’anxiété. Le résultat de cette recherche traduit la nécessité d’une composante chargée de la sélection entre les stimuli pour que puisse apparaître l’effet émotionnel lié à l’attention (Williams et al. 1988, Williams & al., 1997).

Les études de Niedenthal et Setterlund (1994) et Niedenthal, Halberstadt et Setterlund (1997) ont cherché à mesurer l’effet de la congruence émotionnelle. Chez des participants induits émotionnellement par de la musique classique, une tâche de décision lexicale et une de lecture de mots ont été effectuées. Selon les résultats, l’état émotionnel du participant était associé à une facilitation de la décision lexicale et de la prononciation du mot, lorsque la signification émotionnelle du mot et l’émotion du participant étaient catégoriquement congruentes. Mais l’effet de la congruence de la valence émotionnelle n’était pas observé (voir aussi Olafson et Ferraro, 2001). Niedenthal, et Setterlund (1994) ont noté que l’individu était capable de détecter, identifier ou classifier les mots congruents avec son émotion plus rapidement ou plus précisément. La théorie de Niedenthal et al.(1994, 1997) est fondée sur la facilitation du processus lié au stimulus émotionnel appartenant à la même catégorie plutôt qu’à la même valence émotionnelle.

Il semble difficile de trouver un effet attentionnel lié au traitement du stimulus émotionnel avec une tâche très simple dans laquelle les ressources attentionnelles sont suffisantes pour l’exécuter, que le stimulus soit neutre ou connoté émotionnellement. Le paradigme expérimental le plus souvent utilisé pour observer l’effet émotionnel chez les anxieux est incontestablement celui de Stroop émotionnel. Ce paradigme sera présenté et discuté plus en détails dans le prochain sous-chapitre. En bref, l’effet de Stroop émotionnel indique que les anxieux, par rapport aux individus normaux, ont une sensibilité plus large à l’égard des informations liées à la menace parce que ces stimuli peuvent être traités involontairement, même quand il y a possibilité d’un contrôle attentionnel. Ces stimuli peuvent interférer avec les processus liés à la demande de la tâche (nommer la couleur) chez les anxieux, alors que cet effet est absent chez les sujets normaux.