II. Trois années d’étude : de la troisième maternelle à la seconde primaire

Cette étude longitudinale revêt un aspect important dans le sens où à notre connaissance c’est la première étude qui examine diverses compétences des enfants sourds sur une si longue période. Nous avons observé lors des deux premières années d’étude : d’une part 1/ que les habiletés phonologiques précoces (HP1) prédisaient le niveau de recodage phonologique en première primaire (Reco2), chez les enfants sourds et entendants ; 2/ Et d’autre part que le niveau de recodage phonologique prédisait le niveau d’habiletés phonologiques en première primaire chez les enfants sourds seulement. Au cours de la troisième année, d’autres tâches ont été administrées mesurant respectivement les habiletés phonologiques, de lecture (recodage phonologique et compréhension) et d’orthographe. Au terme de cette étude, la question majeure est de savoir quelle(s) mesure(s) à court terme (la même année, P2) à moyen terme (l’année précédente, P1) ou à long terme (avant l’apprentissage de la lecture, M3) prédi(sen)t le mieux ces nouvelles compétences mesurées en seconde primaire. Quelle est la part de variance supplémentaire que peuvent expliquer les variables mesurées lors de l’apprentissage de la lecture par rapport à celles mesurées avant l’apprentissage de la lecture ? Existe-t-il des différences ou similitudes dans le comportement des différents groupes selon leur statut auditif ? Autrement dit, d’une année sur l’autre et en fonction du statut auditif, les variables prédictrices sont-elles les mêmes pour les deux groupes observés (sourd et entendant)?

Une difficulté classique qui se pose dans une étude telle que celle-ci, dans laquelle beaucoup de variables sont manipulées, est d’arriver à se faire une image simplifiée mais fidèle des relations entre celles-ci. Dans cette perspective, notre première démarche a été d’examiner les différents scores obtenus au cours de ces trois années d’étude pour déterminer lesquels pouvaient être exploitables (Voir Tableau 31). Compte tenu de l’absence de variabilité et d’un effet plafond qui pourrait fausser les résultats, nous avons décidé de ne pas prendre en compte le score obtenu en recodage phonologique (Reco2bis) en seconde primaire (P2). Puis, nous avons calculé des scores z pour les tâches phonologiques administrées en P1 (jugement de similarité phonologique (JS2) et détection d’unité commune (TDUC2) et en P2 (suppression phonémique (SupP3) et détection d’unité commune (TDUC3). Les moyennes de ces scores Z par année sont utilisées comme variables indépendantes (score : HP2 pour Habiletés Phonologiques mesurées en P1 et score : HP3 pour Habiletés Phonologiques mesurées en P2) dans les différentes équations. Dans chaque équation, trois mesures sont rentrées en priorité et dans cet ordre : l’âge chronologique des enfants, leur niveau d’intelligence non verbale (cubes de kohs) ainsi que leur niveau de vocabulaire (Evip).

Avant d’analyser le pouvoir prédictif des différentes variables, nous avons effectué une analyse de corrélations visant à observer les liens possibles entre chaque variable.