g - SITUATION D’INTERVENTION ET DISPOSITIF DE RECHERCHE

Une question concernant les ambiguïtés de la recherche résidait dans le chevauchement de mon domaine d’intervention professionnelle et du domaine épistémique. En somme y a-t-il antagonisme entre projet d’évaluation et projet de recherche ?

Il y en aurait un, à notre avis, si l’un des deux champs dominait l’autre au point d’en empêcher la réalisation.

Que l’étude des « processus psychiques liés à une violence familiale vécue et pouvant être reprise à l’intérieur d’un dispositif de symbolisation » fasse obstacle ou oriente l’exercice de la psychologie vers une pratique d’interview dans laquelle la problématique actuelle des adolescentes pourrait être laissée de côté nous paraît peu envisageable. Précisément, l’aspect de violence qui en résulterait donnerait lieu à des réactions assez rapides ; nous imaginons difficilement les adolescentes rencontrées la plupart du temps accepter de circonscrire leurs propos à ces événements passés et leur reprise, excluant tout autre sujet, sans poser rapidement le problème de leur statut d’objet (de recherche), et par là même la possibilité que je les rencontre à nouveau.

Que ma tâche d’évaluation psychologique gêne suffisamment la conduite de la recherche ne nous semble pas plus un danger, dans la mesure où cette pratique d’interroger, dans ces cas de violences familiales, les attitudes psychiques et comportementales de chacun est en fait partie intégrante, et installée, de cette mission d’évaluation que me confie cette institution.

Nous dirons ici que la recherche se propose de conceptualiser un aspect d’une pratique : « La pratique d’intervention vient nourrir les hypothèses du chercheur en même temps que ses hypothèses ouvrent et facilitent son travail de compréhension des personnes auprès desquelles il intervient. (…) C’est donc la distinction entre situation thérapeutique et situation de recherche et la possibilité ou l’impossibilité de mener de front et simultanément les deux démarches dans la même situation, qui posent problème. » [A. GIAMI, 1989, pp42-43] Pour aller plus loin encore, nous dirons que cette recherche existe dans une perspective d’interrogation de la possibilité même de la pratique, aider à la symbolisation des adolescentes ayant vécu des passages à l’acte de familiers pouvant représenter en soi-même une gageure qu’il conviendrait alors d’éclairer.