h - LE RECOURS A LA FANTASMATISATION

D. DIATKINE donne de cet aspect des choses le résumé suivant : « La période de latence est caractérisée, chez le garçon comme chez la fille, par une dissociation entre une partie des motions pulsionnelles libidinales et destructrices transformées par le moi et subissant un certain degré de désexualisation, et une autre partie non transformée, partiellement refoulée, mais donnant des rejetons alimentant des fantaisies sexuelles accompagnant la masturbation ou ayant une fonction équivalente. » [1979, p369] Notons d’emblée ici un élément de réponse à notre question sur l’éventuelle diminution de l’intensité pulsionnelle durant la latence. Nous serions maintenant tenté de répondre par la négative, car comme le montrent les tentations masturbatoires la pulsion paraît toujours présente chez l’enfant, mais soumise à d’autres impératifs défensifs.

Pour revenir à cette citation de D. DIATKINE, avançons que la première partie évoquée correspond au résultat de la sublimation. La deuxième partie citée inaugure bien la possibilité de l’enfant de la latence d’entrer dans ces activités de productions de fantasmes, prolongeant ainsi une sexualité infantile qui ne cède en rien durant toutes ces années de la latence.

Cette question, FREUD l’évoque  dans un registre dynamique : « Avec l’introduction du principe de réalité, une forme d’activité de pensée se trouve séparée par clivage ; elle reste indépendante de l’épreuve de réalité et soumise uniquement au principe de plaisir. C’est cela qu’on nomme la création de fantasmes qui commence déjà avec le jeu des enfants et qui, lorsqu’elle se poursuit sous la forme de rêves diurnes, cesse de s’étayer sur des objets réels. » Puis plus loin : « La longue persistance de l’auto-érotisme rend possible que la satisfaction fantasmatique liée à l’objet sexuel, immédiate et plus aisée à obtenir, soit maintenue si longtemps, à la place de la satisfaction réelle mais qui exige des efforts et des ajournements. » [1911, p138-139]

Ce rapport à la rêverie noté par ces deux auteurs au sujet de la période de latence se rapporte au travail du roman familial sans que celui-ci soit évoqué, y compris par FREUD. Notons que celui-ci, en 1911, cite sa notion de rêves diurnes comme poursuite adolescente de ces fantasmes, mais, curieusement, ne reprend pas pour ceux-ci le terme de roman familial qui date pourtant d’à peine deux ans dans son œuvre, les objets réels en question étant les figures ou personnages parentaux accompagnant l’enfant dans sa vie quotidienne.

Nous conclurons sur ce point en soulignant que ce recours à la fantasmatisation est lié durant cette période de latence à l’objet incestueux, et dans des représentations partiellement transformées afin de pouvoir entrer dans une construction qui préserve une relation pacifiée avec ces images parentales, alimentant parallèlement la satisfaction pulsionnelle. La question qui se pose à nous maintenant est le destin d’une telle activité fantasmatique à l’orée de l’adolescence… En effet la puberté, par la réactivation pulsionnelle qu’elle soutient, va prendre un sens au regard de cette problématique de sexualisation/désexualisation dans la latence, entraînant le sujet à trouver une autre économie sur le plan processuel comme sur celui de ses activités fantasmatiques.

C’est pourquoi nous avancerons maintenant sur les approches théoriques de l’adolescence telles que les développent différents auteurs, en tentant de mettre en perspective divers aspects fondamentaux de cette période maturative.