1 - 3 - 5 - L’adolescence

a - Philippe GUTTON : le « pubertaire » et « l’adolescens »

Si nous introduisons par les travaux de P. GUTTON, c’est que sa conceptualisation sur « le pubertaire » (à partir de 1991) articule puberté et adolescence de manière dialectique, ce qui est inaugural de l’ensemble des théorisations dont nous reprendrons ici.

Ainsi la puberté, par le réveil pulsionnel qu’elle produit, renvoie l’adolescent à un risque de retour de ses fantasmes infantiles : « Le pubertaire advenu est à réfléchir par rapport à son ancrage biologique (…) se heurtant à la barrière de l’inceste que l’œdipien infantile légua. » [1991b, p11] C’est pourquoi le pubertaire est producteur de « scènes » dans les représentations juvéniles : « … la scène pubertaire, animant la psyché adolescente, fait rebondir la scène primitive sans en dévoiler les secrets. » [1990, p359] Ainsi la scène primitive dérive-t-elle sur la scène pubertaire, et plus exactement sur les scènes pubertaires dans la mesure où les fantasmes de fusion, de séduction et de castration déploient à partir des évènements de la vie juvénile de multiples agencements. Ces productions anxiogènes tendent à revenir sur l’organisation œdipienne établie, si elle l’a été précédemment : « Tout se passerait comme si les éléments du puzzle qui constituent la scène primitive (ou ses représentations les plus approchées) s’agençaient pour donner une scène pubertaire « presque » conforme. La différence ne résiderait pas en la survenue d’éléments nouveaux mais par leur recomposition. » [1991a, p63]

Cette dimension dialectique apparaît bien lorsque P. GUTTON sépare résolument cette dimension pubertaire et « l’adolescens, travail élaboratif concomitant et retardé (nous n’y voyons pas deux stades), (…)exclusivement réalisable à partir du matériau pubertaire. Il utilise les procédures de l’idéalisation rodées dans l’enfance et en particulier l’Idéal du Moi et l’identification. Son but est une désexualisation des représentations incestueuses menant au choix d’objet potentiellement adéquat. » [1991b, p11] Et l’ « adolescens », temps d’adaptation de quelques années au réel de la puberté, apparaît comme un travail de désinvestissement de la force pulsionnelle contenue dans le pubertaire, forme d’amortissement de la violence potentielle de ce dernier, elle peut alors être qualifiée de « seconde latence » [op. cit., p13].

Enfin c’est sur un mode auto-érotique que ce mouvement pubertaire est décrit par P. GUTTON. Selon lui, la source pulsionnelle génitale est extériorisée par le moi, « … le corps génital devenant séducteur du corps encore enfant. » Cette dissociation amène l’adolescent à s’interroger sur le statut du corps : « … est-il Moi ou objet extérieur ? La puberté impose-t-elle un ennemi au-dedans ou au-dehors ? » [op. cit., p32] C’est ici la question de la séduction qui est abordée par cet auteur, auto-séduction adolescente, séduction de soi-même à travers l’autre-adolescent ou l’autre-enfant, mouvements dans lesquels la pulsion génitale paraît chercher une origine pour être plus efficacement contenue et avec elle, la maîtrise du développement corporel. C’est ainsi la fonction de l’«adolescens» en tant que devant trouver une issue à cet auto-érotisme qui apparaît autour de cette question de la séduction.