k - LE POINT SUR NOTRE PROBLEMATIQUE

Selma semble se représenter la violence comme le signe d’une emprise paternelle la privilégiant, tout en ayant manifestement conscience que c’est sur l’ensemble de l’organisation familiale que le père cherche à peser de cette manière. L’image paternelle renvoie de ce fait à une certaine omnipotence dont nous avons vu qu’elle touchait jusqu’à la différenciation sexuelle.

Le corps est chez Selma ramené à deux représentations particulières. D’abord celle d’un corps meurtri par les intrusions paternelles ou sa propre tentative adolescente d’expulser de son ventre cet incorporat, ce qui correspond sans doute au vécu d’une période de quelques années postérieures à la puberté. Puis paraît s’être progressivement mise en place au même moment l’utilisation défensive de la représentation d’un corps désérotisé par la pratique sportive, comme un corps arraché à l’organisation incestuelle familiale par ce que cette activité de gymnaste comporte de relations à des pairs.

Sans doute y a-t-il là une complexité à pointer dans l’articulation chronologique de ces deux mouvements psychiques. L’arrivée des coups à la puberté, si elle est d’abord relativisée par Selma comme non contemporaine de cette période, semble avoir toutefois instauré un vécu d’intrusion et d’emprise en lien avec le renforcement pulsionnel. C’est dans ce contexte qu’un vécu traumatique a pu s’installer, amenant cette jeune fille à des processus d’abord faits d’incorporation et d’identification à l’agresseur. D’autres mouvements se sont en partie substitués à cette économie, comme l’introjection de ses expériences de rencontre avec l’objet, l’identification à un ou plusieurs pairs ayant pour sa part entraîné une idéalisation re-narcissisante.

En ce sens la tentative de suicide de Selma peut apparaître comme une bascule entre le premier vécu dont elle est l’acmé par sa nature auto-vulnérante, et une période davantage organisée par une relation plus apaisée à l’objet ; cet acte prend secondairement la valeur d’une restitution de l’agressivité à l’objet persécuteur, ce que la demande de placement de Selma ne fait que prolonger, de façon plus secondarisée encore.

Ajoutons encore que davantage que dans la situation précédente, la confusion engendrée par les coups paternels, au-delà des fantasmes qu’ils suscitent, présentent des effets majeurs que la différenciation fantasme d’agressivité / violence fantasmatique ne suffit pas toujours à aborder au sujet de Selma.