d - UN AVENIR DELICAT A CONCEVOIR

Q - Et pour l’avenir, là où vous souhaiteriez qu’elle aille, vous pensez quoi ?

- Elle est gentille Amélie, il lui faut un endroit où elle soit bien.

[Un long silence…]

Q - Votre mari n’est pas venu aujourd’hui, mais est-ce que vous savez ce qu’il en pense de ce qu’il faut pour Amélie ?

- Ça dépend. Lui, il ne veut pas qu’elle aille danser, surtout, qu’elle voit des jeunes tout ça. Il la veut plus.

Q - … ?

- Oui, quand il est énervé, il la veut plus… Il recommence à crier dessus, même qu’elle est plus là… Mais des fois pas tellement. C’était comme ça après qu’il la tapait, ça retombait. Des fois il pleurait.

Q - Ça vous paraît possible que quelque chose change à la maison, Madame ?

- Je sais pas… [Puis après un long silence] C’est compliqué…

Q - Oui, c’est vrai, c’est compliqué. Je crois que pour Amélie aussi, c’est compliqué. Je pense qu’il y a des choses dont elle ne veut plus, surtout la violence et les injures de son p…

- Oui, ça fait peur, on a peur !

Q - Alors c’est important d’en parler, et d’essayer de faire quelque chose. Amélie, elle, elle a décidé de partir. Mais ça veut pas dire qu’elle veut plus vous voir, vous Madame, et peut-être aussi son père… Vous pouvez la contacter ici, vous savez… Lui parler, la voir… Mais sur votre peur en famille, peut-être que vous devez faire quelque chose aussi pour vous. C’est sûrement pas facile pour elle de vous savoir dans cette situation. Ça l’inquiète sûrement un peu.

- Oui.

Je dois préciser que cet entretien a été prolifique en regards entre ma collègue et moi, ce que je vis comme autant de réassurances que mes attitudes contre-transférentielles marquées par l’ennui et la perplexité ne sont pas entièrement personnelles. Un dernier échange visuel me confirme que mon souhait d’interrompre cette rencontre est partagé…

Q - On va peut-être s’arrêter là… Est-ce que vous souhaitez dire quelque chose pour terminer, Madame, quelque chose que nous n’aurions pas évoqué au sujet de votre fille et qui vous semblerait important ?

- Non… Je voudrais qu’elle soit bien, quoi…

Nous nous levons alors, saluons cette dame, puis elle quitte ensuite le service avec Amélie, que l’éducatrice est allée chercher pour qu’elle raccompagne sa mère comme convenu.