II - 5 - 6 - Première reproblématisation

a - LE RETOUR EN FAMILLE

Quatre jours après ce dernier entretien, soit trois semaines et demie après son accueil dans l’établissement, Amélie a fugué dans la nuit. Un appel téléphonique a été donné aux parents par la personne de l’équipe éducative de permanence le lendemain matin samedi pour les avertir de cette disparition. Le père d’Amélie répond sur son téléphone mobile… qu’il est avec sa fille "en train de faire des courses".

Venue s’expliquer au service de cette fugue et de ses intentions, Amélie s’effondre rapidement devant la personne qui l’accueille, exprimant ouvertement sa difficulté grandissante à rester loin de ses parents, au fur et à mesure que se concrétise le projet de placement en institution.

Le père, qui l’a accompagnée pour cette visite, est décrit dans des attitudes de négation du contexte légal du placement de sa fille, l’encourageant à rentrer avec lui à la maison. Niant massivement l’intérêt d’une prise en charge éducative ainsi que la gravité des faits dénoncés par Amélie à la police, ce père appuie dans cette rencontre la nécessité du retour en famille de sa fille sur l’état de santé de son épouse.

Il est négocié in extremis avec cette jeune fille qu’elle passe la fin du samedi chez ses parents et revienne le dimanche en fin d’après-midi pour attendre le rendez-vous chez la Juge pour enfants. Amélie respecte cet engagement… et repart le dimanche soir en fugue avec d’autres jeunes hébergées, donc quelques heures après son retour.

L’absence de cette famille au tribunal dix jours plus tard n’empêche pas la Juge pour enfants, si elle reconfie bien Amélie à ses parents au vu de la situation de refus de chacun de se séparer, de prendre une mesure d’aide éducative en milieu ouvert, susceptible d’aider cette adolescente dans ce retour en famille. Cette mesure exercée par l’éducatrice qui avait été sa référente dans le cadre de son placement institutionnel se révélera rapidement inexerçable. Amélie refuse de se présenter aux rendez-vous proposés, et ne répond à aucun message ou courrier qu’elle reçoit à ce sujet.

Quelques échos de disputes entre père et fille, lesquelles se soldent par des fugues rapidement suivies de retours en larmes à la maison égrènent une fin d’aide éducative qui n’en a plus que le nom, au vu de la résistance que celle-ci engendre dans la famille. Rien ne permet de dire si les violences se sont reproduites après le retour. Deux mois après le dernier épisode de fugue, et sans nouvelles d’Amélie ou de sa famille malgré plusieurs visites et appels téléphoniques, une fin de mesure est demandée à la Juge, qui l’accorde au service. Six mois se seront écoulés entre le placement de cette jeune fille et cette mainlevée de mesure.