3.2 Récit culturel et d’affiliation

Seuls, Jean, Abdel et Mimoun émettent des projets d’avenir dans une continuité familiale soit manifeste, soit plus latente.

Abdel s’identifie à un de ses frères plombier. Mimoun irait travailler avec son père ou son frère aîné et Jean veut prouver sa réussite à toute la famille.

Ce retour aux affiliations se greffe sur un étayage, voire une incorporation de la socialisation des frères ou du père. Cette prise en compte des héritages pourrait être comprise comme un mouvement de désaffiliation-réaffiliation.

Ce double mouvement qualifie le double mouvement adolescent dont nous avons parlé avec le roman de Wadji Mouawad, Le visage retrouvé. Le premier temps de l’étrangeté, de la confrontation à l’étranger en soi et en l’autre se transforme en reconnaissance de l’autre en soi. Le désinvestissement du projet parental évolue vers la découverte de la continuité transgénérationnelle en soi.

Le roman prend fin quelques années plus tard, le héros a 19 ans, il travaille et vit seul. Il se rend à l’hôpital où sa "mère retrouvée" vit ses derniers jours empêchant à tout jamais un éventuel retour dans le ventre maternel.

Cependant, je me dois de pointer là le travail souterrain de la mélancolie. Le futur est indicible, ne peut se figurer.

Taïr ne peut envisager un projet de sortie du quartier car il a trop peur d’y revenir. Malek aurait aimé faire des études mais à 19 ans, c’est trop tard. Mario passe son bac mais ne peut rien dire d’un souhait quant à son avenir.

Adjib veut redevenir un mec blanc…

Le versant mélancolique entrave la pulsion de vie alors que la violence tend à renouer avec l’environnement.