Belle - famille

‘"Je vais commencer l’arbre généalogique de ma mère. Quand les personnes sont décédées, comment on fait ?’ ‘Je ne me rappelle même pas de la date de décès de ma mère…Là, une personne décédée mais ce n’est pas ma mère, je ne l’ai jamais connue… "’

Il poursuit donc la réalisation d’une troisième arbre.

‘" Mon arrière grand-mère, adorable. Son mari est décédé, ils étaient agriculteurs. Une famille petite et pauvre et de l’autre côté de la famille, riche et grande. çà fait un bon mélange…Deux extrêmes qui créent un juste milieu. I( sa belle- mère) retrouve son côté nature’ ‘Mon père va démissionner, il veut élever des chèvres. Ils en ont marre de la ville." ’

Comment vous sentez-vous dans ces familles ?

‘"Dans cette famille, impression d’être…" Il trace 2 bulles qui l’isole de sa fratrie…"Je ne suis rien. Ils m’aiment beaucoup mais je ne le ressens pas. "’ ‘"On ne dit pas que je suis en prison. Ce milieu là, si eux ils savaient que j’étais en prison…Officiellement, je suis dans le nord."’ ‘Dans la famille paternelle, rien n’a été dit non plus. " La famille maternelle 1, ils sont au courant, c’est dû au fait du mariage de mon cousin… Papy et mamy sont au courant. Ma tante D a téléphoné, ma mère lui a parlé de l’avocat, elle a cru que c’était ma grand-mère…’ ‘Dans ma famille paternelle, il y a certaines personnes qu’il ne faudrait pas qu’elle le sache et dans la famille de ma mère2, si un jour ils le savent…’ ‘Dans ma famille maternelle 2, F, c’est comme si j’étais son neveu. C’est assez luxueux chez eux. J’aime bien çà…la salle de billard…’ ‘Dans ma famille paternelle, les enfants sont divisés en deux groupes parce que Pépé était violent avec sa femme et ses enfants. Personne ne l’aime à part mon père et un autre.’ ‘Pépé était violent avec sa femme mais ils s’aimaient beaucoup, elle lui manque énormément.’ ‘La famille maternelle1 est une famille très soudée. Çà crée plus d’engueulades. Ils critiquent tous les uns les autres mais ils s’adorent. Dans les deux autre familles, ils se jugent beaucoup.’ ‘Pour mes oncles et tantes, j’ai pris la place de ma mère, ils me considèrent plus que comme un neveu. Ils étaient fiers de leur sœur. Ma grand-mère me considère comme son enfant. Mes cousins sont moins importants que moi. Ils se font critiquer assez facilement. Ils habitent tous dans la même région, Ils sont trop près les uns des autres. ’ ‘Alors que dans la famille de mon père, c’est mon père qui se soucie des uns, des autres.’ ‘Comme mon petit frère, il ne travaille presque pas, c’est un génie…’ ‘Mon autre frère bosse comme un dingue, il redouble sa 2nde. Il veut porter un uniforme : sapeurs pompiers de Paris, maintenant militaire ".’

Qu’est-ce qui vous étonne sur le dessin ?

‘" Il y a comme un ricochet de frères et sœurs dans ma famille paternelle :Quand je pense à l’un je pense à l’autre ; D me fait penser à mon père et ainsi de suite… »’

Qui est l’aîné de la famille ? Il n’a pas classé la fratrie par ordre de naissance.

Qui sont nés du premier mariage ?

E/J

S +papa+ D + G (n’en est pas très sûr)

Il parle à plusieurs reprise d’E , institutrice, femme de J, fils de…E est la belle-fille et est notée à la place de la fille de la famille. Les filiations ne sont pas respectées. Tous les adultes sont identiques, ils ne se distinguent pas par leur origine.

‘" Je crains le décès de mes grands parents maternels1…toutes les histoires d’héritage…çà ne fait que des engueulades…surtout au nez de mes cousins…plus âgés que moi…propulsé comme si j’étais leur oncle."’ ‘"Dans la famille maternelle2,il n’y a pas d’engueulade. çà ne se dit pas. C’est plus caché. Quand mes grands parents veulent dire quelque chose à quelqu’un, Ils le prennent à part et personne n’entend…Comme dans un film de capes et d’épées, les invités avec leurs belles robes… " ’

Il entend par là que le faste extérieur voile la pauvreté des relations.

A la fin de l’entretien, il me fait part de sa demande de se séparer de son compagnon de cellule qui est porteur du VIH et de l’hépatite C. Il ne veut pas garder de « séquelles de son incarcération, que ce soit vraiment fini après ». Il a écrit plusieurs mots pour demander à être avec un autre détenu mais n’a pas dit qu’il souhaitait éloigner le premier, veut que cela se passe plus discrètement.

Il prolonge l’entretien, comme si c’était difficile de partir aujourd’hui.

" Pourquoi je suis suivi par un psychologue et un psychiatre ? " Et puis : « Quels rapports y a-t-il entre ma famille et moi ? »

Au cours des semaines qui suivront, Jean passera par des phases d’abattement dues à la promiscuité en cellule et au fait qu’il se mette parfois en danger. Il est lié par le secret familial, taire son incarcération. Il cautionne la position parentale, même s’il en ressent les limites mais ne veut pas s’en départir. Ce secret ligote ses relations, ses pensées, tout travail psychique.

A d’autres moments, il apparaît surprenant dans sa toute puissance, se vivant comme sauveur de sa famille, protecteur de son père qui ne serait que…