Arbre généalogique

A l’écoute des consignes, René se montre enthousiaste : " Çà fait longtemps que je ne suis pas allé à l’école… Le truc avec les grands-parents, les parents…. ?"

Mais après l’énoncé des consignes, il bute sur la feuille blanche : " Je ne sais pas comment faire, par où je dois commencer… " Après lui avoir dit qu’il pouvait faire comme il voulait, il réagit :  "Vous pouvez m’aider, non ? C’est vous qui me demandez de faire un truc et après vous me laissez dans la m… vous voulez pas m’aider un peu…"

Il se fait très charmeur : " Vous devez bien savoir comment il faut faire, vous feriez comment vous ?"

Cela se poursuit encore plusieurs minutes : "Je ne sais pas comment faire, aidez- moi". Lucile répète la composition d’une famille.

Enfin René se décide à noter sur sa feuille ses grands-parents " Mais je ne les ai pas vus souvent…çà fait longtemps, quand j’étais petit."

Il hésite à nouveau. Veut-il arrêter ? " Non, non, çà ne me dérange pas, il n’y a pas de problèmes ! " Puis René réalise rapidement son arbre généalogique en ajoutant ses parents et sa fratrie. Il ne note aucun autre membre de sa famille : "Je ne me souviens plus de quel côté c’est ". Il déclare qu’il ne sait pas s’il s’agit de la famille paternelle ou maternelle. "En plus, je ne les vois pas souvent."

Puis pendant le temps de l’enquête, il esquive ou renvoie des questions. " Et votre nom, il est de quelle origine ? "

Que pensez–vous de la représentation de votre famille ?

" C’est une question bizarre, on ne me l’a jamais posée, je ne peux pas répondre, c’est bien une question de psy".

L’entretien s’étire. Il parle de la prison : " Les gens disent que je suis toujours de bonne humeur, mais il le faut bien, çà sert à rien de faire la g…Ici, il ne me reste qu’une chose l’espérance " Il prononce ce mot avec un plaisir non dissimulé.

Il questionne sur la recherche : "Ils vous disent quoi les autres ? Comment ils ont fait leur famille ? Ils doivent vous dire aussi ce que je vous dis…." Puis, "çà vous sert à quoi tout çà ? Je vous donne quelque chose, je vous parle de moi, je m’en fous j’ai rien à cacher…"

Malgré de nouvelles explications, il poursuit

Il se demande à nouveau s’il a dit " ce qu’il fallait dire".

Au moment de se séparer, il fait allusion au lien créé par l’entretien, " un lien sentimental ". S’en suit une nouvelle explication sur le cadre de la rencontre. Là, il banalise la rencontre, en renvoyant l’étudiante à ses obligations mais aussi à ses affiliations  : " Vous êtes ici parce que vous êtes obligée, pour vos études… pour avoir votre diplôme ? "

Cet entretien renforce le sentiment de malaise chez Lucile. Peut-on penser à un retournement ? René pris en défaut narcissique devant l’étudiante essaie de la séduire. Il retourne l’emprise qu’il sent de sa part. Que me veut-elle ?

Le ‘‘je suis un autre ou je suis pris pour un autre" est finalement le point de départ d’un lourd malentendu où il y trouvera à la fois du plaisir et de l’angoisse.