Trajectoire spatiale

Cette fois, nous recevons René toutes les deux. L’étudiante est plus dans une position d’observation et de prise de notes.

Aux consignes, il réagit à " lieux imaginaires" : " un rêve tout simplement."

" Comment faire plus simple que les dessins ? Je ne sais plus faire…Je ne suis pas architecte. …pour dessiner des maisons de vacances aux Antilles…Faut que je fasse des bâtiments ? …En fait, on dirait que je vais dessiner une prison…sauf qu’il n’y a pas de barreaux" . Il dessine un premier bâtiment en bas à droite, un grand rectangle avec une suite de carrés qui représentent des fenêtres. A la suite des trois lignes de fenêtres, il trace un grand trait et dessine en–dessous les entrées, des passages sous les immeubles. Chaque porche est cloisonné. Ce dessin semble détaché de la barre, sous proportionné par rapport au bâtiment. "Je suis en train de faire n’importe quoi ! Je ne m’en souviens pas".

Il a déménagé deux fois dans le même quartier : "C’était pareil parce que c’était toujours au quartier".

Comment est le quartier ? "C’est convivial, il y a des enfants qui jouent ".

Il habitait au quatrième étage ( le bâtiment dessiné n’a que trois étages). Il affirme qu’en général, les enfants vivent tous de la même manière mais le plus important est la famille.

Y a-t- il eu des lieux de vacances ?

"Tout m’a marqué quand je pars en vacances…vous fouillez dans mes souvenirs, il vaudrait mieux m’hypnotiser pour savoir çà"

Il se rappelle avoir été en colonie de vacances dans les années 80. Il est " tombé" en prison à 18 ans, à 15-16 ans, ici à Saint–Paul, après son BEP électrotechnique… Il se pose à lui–même la question : Comment çà se fait qu’à 23 ans il n’arrive pas à faire quelque chose ?

"Les éducateurs ne me font pas dessiner… ils veulent pas que j’aille à l’école ". Il n’a jamais eu de réponse à ses courriers adressés au centre scolaire pénitentiaire. Comme le directeur des écoles ne l’a jamais appelé, il laisse "tomber". Ici, il ne fait rien de toute la journée : " Elle m’abrutit cette télé, je tue le temps, j’essaie en faisant rien…. Je tuais le temps en marchant en béquilles en bas de chez moi avant la prison… çà s’oublie pas la prison… "

Il est libérable en 2005. René ne viendra pas au dernier entretien.