2.1.2.3.Approche interactionniste

Dans cette approche, les processus communicatifs s’inscrivent dans les interactions sociales. De nombreuses recherches (Tourrette & Guidetti, 1994 ; Streri, 1996...) ont montré que les premières relations du bébé avec son entourage s’appuyaient sur les compétences sensorielles et sensori-motrices qu’il peut mettre en œuvre dès sa naissance. D’autres recherches s’intéressent aux modalités d’interactions enfant-adulte. Ces interactions évoluent de façon considérable : les premiers échanges s’établissent dans une position en face à face, étayée par un engagement de regards mutuels. Ce moment est propice à l’installation de séquences proto-conversationnelles, basées sur les productions des deux partenaires : productions vocales ou verbales pour l’adulte, productions sonores ou orales pour le bébé. Les pauses respiratoires nécessaires à la succion du sein ou à la production verbale constituent des petites interruptions de continuité qui donnent au partenaire l’occasion de s’insérer dans la séquence produite et à inviter son interlocuteur par le regard ou la parole à en faire autant. Chacun, tour à tour, initie ou met fin à l’échange. C’est au cours de ces proto-conversations que se met en place l’alternance des tours de parole nécessaire aux échanges verbaux ultérieurs.

Le rôle de l’adulte consiste à accompagner l’enfant dans sa progression en lui fournissant l’étayage dont il a besoin. Les activités de tutelle ou d’étayage se déroulent au cours d’épisodes d’actions conjointes adulte/enfant et supposent un ajustement des comportements de l’adulte aux besoins et aux capacités du bébé. Le concept brunerien (Bruner, 1983) « d’interaction de tutelle » permet à l’adulte d’étayer la progression de l’enfant dans un apprentissage. Ce concept relève d’un autre concept exprimé par Vygotski (1956) : « la Zone proximale de Développement « (ZPD) ; ce concept correspond à la distance entre le niveau de résolution d’un problème atteint par l’enfant lorsqu’il est seul (et qui correspond à son niveau actuel) et le niveau qu’il peut atteindre quand il est dirigé, aidé par l’adulte. Dans son concept d’interaction de tutelle, Bruner relève la mise en place des formats d’action conjointe (structures de base des actions, correspondant à des scénarios) qui « encadrent les actions de l’enfant et rendent possible la transformation de leur niveau actuel en relation avec leur niveau potentiel » (Bruner, 1983, p.289). Ainsi, apprendre le monde avec l’adulte est l’occasion de bénéficier d’un étayage dans la co-construction cognitive et sociale qui se déroule dans le partage des émotions et des action.

Notre recherche analyse des interactions adulte-enfant et c’est pour cette raison que nous appuierons cette approche interactionniste. Mais d’autres approches sont aussi abordées dans la partie qui suit.