2.2.3.5.L’entraînement

Wallon (1949) considère que, dès le début de sa vie, le très jeune enfant est amené à vivre en « union vitale » avec son entourage ; c’est un être « totalement orienté vers la société », « hautement sociable ». Les étapes du développement qu’il décrit ont pour cadre la constellation familiale. Ce sont les premières interactions mère-enfant, à travers des mécanismes socio-émotionnels, qui seraient à l’origine du pré-langage et de l’émergence du psychisme.

Pour Vygotski (1931, publié en 1978) qui, contrairement à Piaget (1947) décrivait le facteur social comme le troisième facteur fondamental du développement (après la maturation du système nerveux et l’action sur les objets), considère que le développement de l’enfant ne prend son sens que dans le contexte social, à partir des interactions avec autrui. Dans son concept de « zone proximale », Vygotsky montre que la construction des savoirs passe par la transmission et la guidance dans des situations d’apprentissage au cours desquelles les interventions de l’adulte sont essentielles. Ainsi, il écrit qu’un processus interpersonnel se transforme en processus intrapersonnel. Chaque fonction apparaît deux fois dans le développement culturel de l’enfant : d’abord au niveau social, et ensuite au niveau individuel ; d’abord entre individus (interpsychologique) et ensuite dans l’enfant (intrapsychologique). Cela s’applique aussi bien à l’attention volontaire qu’à la mémoire logique et à la formation de concepts. Toutes les fonctions supérieures débutent comme des relations effectives entre individus humains.

Ainsi, progressivement, grâce à l’entraînement, l’enfant se construit. Il en est de même pour l’adulte en interaction avec cet enfant. Tous deux apprennent à se connaître et à « grandir » ensemble. L’adulte et l’enfant qui peuvent parvenir à la synchronie de signal et de réponse commencent à ajouter une nouvelle dimension à leur dialogue. Ils se mettent à anticiper leurs réponses l’un et l’autre dans de longues séquences. Ayant appris ce dont ils ont l’un et l’autre besoin, ils peuvent établir un rythme un peu comme s’ils utilisaient un ensemble de règles. La force de ce rythme institue bientôt une attente : à la fois pour les résultats obtenus quand on s’y soumet, et quand on l’interrompt. Cette attente est tellement puissante qu’elle paraît emporter chaque membre de la dyade. La contribution de chaque membre semble engloutie dans un courant que Condon et Sander ont appelé « entraînement » (1974). Ainsi, chaque membre s’adapte à l’autre. Cet entraînement alimente l’énergie et aide à la croissance de l’attachement.