3.4.3. Troisième objectif de l’étude

Notre troisième objectif était la comparaison de la dynamique de l’interaction à travers les quatre modes de communication : verbal/oral, kinesthésie, regard, toucher.

Nous avons postulé l’hypothèse : les interactions adultes-enfants « déficients visuels » seront étayées particulièrement sur les modalités verbale, tactile et kinesthésique (car la fonction visuelle est défaillante).

Ainsi, nous avons analysé les réactions des enfants face aux adultes et les réactions des adultes face aux enfants.

Les réactions des enfants face à la mère et face à la personne extérieure ont montré qu’avec la mère, toutes les interactions dans chaque mode de communication étaient plus nombreuses qu’avec la personne extérieure à la famille. Dans le groupe d’enfants « déficients visuels », nous avons observé que, face aux trois pères et face aux trois mères, les interactions étaient semblables pour les modes oral, regard et toucher. Mais, avec les mères, les réactions en mode kinesthésique étaient plus nombreuses. Face à la personne extérieure, les réactions de l’enfant étaient toujours moins nombreuses quel que soit le mode de communication.

Les réactions des adultes face aux enfants ont montré qu’elles étaient toujours plus nombreuses chez la mère que chez la personne extérieure, lorsque nous comparons la fréquence des événements, tous les modes de communication confondus. Dans le groupe d’enfants « déficients visuels » avec les trois pères, nous observons que le nombre de réactions sont plus nombreuses, tous les modes de communication confondus. Les réactions des mères face aux enfants se situent en deuxième position et les réactions de la personne extérieure se placent en dernière position.

Cependant, avec l’enfant le plus jeune parmi les trois enfants, nous observons des réactions (côté enfant et côté adultes) beaucoup moins nombreuses lorsqu’elles sont comparées avec les réactions des deux enfants plus âgés.

Lorsque nous comparons la communication en inter-groupes (mère, père et personne extérieure) et nous considérons les réactions des enfants face aux adultes, nous n’observons des différences significatives qu’entre la mère et la personne extérieure dans les trois modes de communication kinesthésique, regard, toucher. Le mode oral ne montre pas de différence.

Lorsque nous considérons les réactions des trois adultes face à l’enfant, seul le mode de communication par le toucher montre une différence significative lorsque nous comparons les réactions de la mère et les réactions de la personne extérieure à la famille.

Lorsque nous analysons la communication en intra-groupes (mère, père et extérieure), nous montrons que les modes de communication dans les réactions de l’enfant sont différents comparés aux modes de communication dans les réactions de sa mère (tous les modes confondus). En revanche, face aux deux autres adultes (père et personne extérieure), les réactions de l’enfant ne montrent qu’une différence significative en mode de communication toucher face aux réactions de la personne extérieure.

Lorsque nous considérons les effets simples du sexe, de l’âge et du handicap des enfants, nous observons que :

Nous avons ensuite analysé les effets d’interaction du handicap et de l’âge, de l’âge et du sexe et du sexe et du handicap des enfants.

En ce qui concerne notre hypothèse qui postule que les interactions adultes-enfants « déficients visuels » seront étayées particulièrement sur les modalités verbale, tactile et kinesthésique, nous devons préciser les situations. Lorsque nous considérons les réactions de l’enfant, les enfants handicapés visuels (« déficients visuels » et « déficients visuels avec un handicap associé »), avec le personne extérieure, communiquent plus en mode toucher et lorsque nous considérons les réactions des adultes, les mères des enfants « standards » privilégient le mode kinesthésique et la personne extérieure le mode regard avec les enfants « déficients visuels ». Ainsi, les modes de communication sont différents selon les acteurs de l’interaction. Mais nous détaillerons plus cette question lorsque nous aborderons la dynamique de l’interaction pour chaque couple (en émetteur et récepteur). De plus, les effets d’interaction âge et handicap, et sexe et handicap montrent des différences autant dans les réactions des enfants face aux adultes que dans les réactions des adultes face à ces enfants.

De nombreuses recherches font la différence entre les enfants « déficients visuels » et les enfants « déficients visuels avec un handicap associé ». Fraiberg (1977, 1979 ) est très connue comme « experte » dans les interactions parents-enfants « déficients visuels ». Ses études ont montré que les enfants « déficients visuels » avaient un répertoire limité de comportements communicatifs comparés aux enfants « standards » et que cette situation avait des répercussions sur le phénomène de l’attachement. Ceci n’est pas le cas dans notre étude car notre groupe d’enfants « déficients visuels » est très actif ainsi que leurs parents. Cependant, bien que le handicap visuel semble avoir des répercussions sur les interactions, un handicap qui s’ajoute à la déficience visuelle détériore beaucoup plus les interactions parents-enfants. Hatton (1995) a montré que les comportements communicatifs des enfants avec de multiples handicaps étaient plus difficilement interprétés par les parents et ces derniers devaient rechercher les moindres signes provenant de leur enfant. Hannon (1987), Hogg et Sebba (1987), Papousek et Papousek (1977), Traverthen (1977) et d’autres auteurs, ont montré que des comportements subtils tels que la position des mains ou l’orientation dans une relation de face à face pouvaient avoir une valeur de communication et aider le parent à comprendre son enfant mais que cela demandait un effort de la part des parents pour interpréter les signaux de leur enfant.

Les résultats de notre étude vont dans la même orientation que Fraiberg et montrent une communication très appauvrie lorsqu’un autre déficit s’ajoute au handicap visuel.