2.3 L’état de l’art :

La première étape pour répondre à ces interrogations consiste à faire état des ré­sultats obtenus par les chercheurs jusqu’à nos jours sur le multimédia et ses véri­tables « caractéristiques ». Nous distinguerons entre plusieurs points de vue :

Ceux qui abordent le thème des nouvelles technologies à la suite d’une rétros­pective historique des pratiques didactiques. C’est le cas de Mar­tinez , à la fin de son ouvrage paru en 1996. Il parle de «  tournant du siècle » 34 à propos des TICE appliqués aux langues, mais quelques li­gnes plus loin, il émet quelques doutes sur la méthodologie associée aux TICE (110):

‘On ne pourra pas se contenter d’adapter des outils déjà existants [ …] de transfé­rer sur écran des « exercices à trous faits jadis sur le papier ».’

puis il ajoute plus loin :

‘L’emploi des technologies modernes dans l’apprentissage des langues [ …] ap­pelle donc des pro­grès techniques, des efforts pédagogiques et un surcroît de ré­flexion. ’

Ceux qui ont une vision générale mais empirique.
C’est le cas de Legros, Crinon et Gautellier. Ces auteurs penchent en­tre des pro­duits dont on ne voit que les ‘«’ ‘ discours publicitaires qui mys­ti­fient les supports ’ ‘»’ (1998 : 56) et d’autres produits grands- pu­blics dont la ‘«’ ‘ perti­nence n’est pas toujours évidente ’ ‘»’ (1998 : 55). De plus, ces derniers recommandent vivement une ‘«’ ‘ réflexion sur les contextes d’utilisation ’ ‘»’(idem) et surtout d’introduction de ces outils qui remet­tent en cause ‘«’ ‘ les ha­bitudes tradi­tionnelles de nos systèmes éduca­tifs ’ ‘»’(idem).
C’est également le cas de H. W. Giessen 35 qui, en 2003, a réuni envi­ron dix études ainsi que leurs résultats réalisées à chaque fois sur un groupe d‘apprenants témoins assistant à des cours traditionnels (cours classi­ques en présentiel ou magistraux) et un groupe expérimental d’apprenants (cours avec divers médias ou à distance). Avant ces expé­riences ayant eu lieu en 1999, les apprenants avaient une pré-esti­ma­tion des médias utilisés dans le groupe expérimental (vidéo, chat, pé­riodi­ques, etc.) comme étant des supports plutôt « modernes et intéres­sants » (2003 : 135). L’objectif de Giessen était de contrôler si ‘«’ ‘ cette percep­tion pré-expérience se ressentait dans les bilans d’apprentissage ’ ‘»’ (idem). Le résultat semble généralisable :

Par rapport à cette unanimité, Giessen (136) pose la question suivante :

‘Il faut se demander si l’euphorie initiale [en faveur des nouvelles technologies] n’était pas plutôt un beau rêve.’

Ceux qui s’appliquent à considérer les potentialités techniques des nou­velles technologies et en particulier des CD-roms. C’est le cas de Lan­cien (1998). Il rap­pelle l’énorme « capacité de stockage » (17) qui peut ac­cueillir son, images numériques fixes ou mobiles, textes, liens, etc. ; la capacité de liens authentiques et vivants en systèmes ouverts avec le chat, forum, etc., la multicanalité qui doit permet aux ap­pre­nants de faire appel à toutes leurs compétences et enfin l’interactivité qui crée des liens entre des éléments isolés. Après avoir rappelé le bel avenir de tels produits grâce à « l’explosion des ven­tes d’ordinateurs » (35), Lan­cien énu­mère les attributs particuliers du multimédia pour les langues. Il accorde à la mul­ticanalité une aide considérable pour la compréhen­sion orale avec le « maillage des diffé­rents médias ». De plus, il attribue à l’hypertexte un statut de grand soutien pour la compréhension écrite avec un « retour à l’écrit sous forme d’exposition à des énoncés variés » (ex : sous-titrages, liens, etc.) (idem).

A l’aide de cet aperçu de la recherche, on peut remarquer que certains avis sont contradictoires. De plus, on y fait pas du tout mention d’apports ou de dé­fail­lan­ces éventuels en grammaire, le domaine qui nous intéresse ici. Face à ce bilan préalable, nous pouvons nous interroger sur des justifications.
C’est justement à cette lacune de la recherche que nous allons maintenant nous consacrer en comparant le traitement de la grammaire dans notre manuel et notre CD-rom d’allemand grand-public.

Notes
34.

Pour retrouver les références bibliographiques, se référer au chapitre 2.1.2.1

35.

Ce scientifique ne base pas ses expériences sur des cours de langue mais sur des cours de technologie, comme par exemple de Electrical engeneering.