3.2.2 Organisation de l’apprentissage par les professeurs-concepteurs :

3.2.2.1 Préparation de l’input grammatical :

Comme nous l’avons mentionné dans le chapitre précédent, c’est bien au début, même si ce n’est pas entièrement transparent, qu’est donnée l’orientation gram­maticale de la leçon, notamment dans les dialogues. Nous allons maintenant étu­dier dans quelques dialogues de nos supports la didactisation de la langue-cible dont le but est d’attirer l’attention des apprenants sur la différence entre des faits de la langue-cible nouveaux et l’état de leur interlangue.

Si l’on observe les dialogues présents dans les trois premières leçons du CD-rom et du manuel, on peut remarquer dans une perspective quantitative que les dialo­gues du CD-rom sont plus nombreux. Il nous faut également constater que ces derniers n’apparaissent pas uniquement au début des leçons mais aussi au mi­lieu et à la fin 47 , ce qui semble faire des dialogues un matériau récurrent et donc d’une signification particulière dans le CD-rom.
Si nous passons maintenant à la qualité des dialogues, nous pouvons nous aper­cevoir que les concepteurs du CD-rom ont créé des exercices à partir de ces dialo­gues, où les tirades sont morcelées. Les apprenants peuvent y manipuler la langue, c’est-à-dire non seulement des signifiés mais aussi des signifiants à travers des exercices, comme par exemple :

  • compléter le dialogue à trous par un mot ou une phrase (exercice 4 le­çon 2) ;
  • identifier la bonne réponse parmi plusieurs (exercice 2 leçon 3) ;
  • construire des phrases courtes à partir d’une amorce proposée pour re­constituer le sens du dialogue (exercice 5 leçon 3) .

Par l’intermédiaire de ces exercices sur les dialogues, les apprenants ont l’opportunité de rentrer en contact avec l’input grammatical.
Le manuel propose également des exercices similaires en rapport direct avec les dialogues (Ü7-8, leçon 2).

De plus, nous avons constaté que de la leçon 1 à la leçon 5 du CD-rom, le lieu de la communication était toujours le même : un lieu de restauration ; pour le même nombre de personnages : un serveur et deux clients ; et enfin la même ac­tion : prendre sa commande auprès d’un serveur. Par contre, l’élément qui change à chaque fois est l’intention de communication : le contenu de la commande et la réaction du serveur.
Ainsi, dans le CD-rom, la leçon 1 présente une simple commande dans un bar, puis on passe, dans la leçon 2, à une commande pour le petit-déjeuner puis à une com­mande plus élaborée pour ce même repas au dialogue 5 de cette même leçon. A la leçon 3, l’apprenant se trouve confronter à une commande plus compliquée qui donne lieu à un malentendu communicatif au dialogue 1 puis à une discussion simple lors de la commande d’un petit-déjeuner au dialogue 3.

Le manuel, par contre, change de situations de communication d’une leçon à l’autre et par là même sont introduits à chaque fois de nouveaux éléments lexi­caux et gramma­ticaux :

  • leçon 1 : présentation de personnes inconnues, leur pays d’origine et leur langue maternelle ;
  • leçon 2 : arrivée dans une ville et différentes étapes jusqu’à la réserva­tion d’un hôtel ;
  • leçon 3 : découverte d’un groupe de musique.

La conséquence que nous dégageons de ce résultat est que le CD-rom sem­ble s’appliquer beaucoup plus dans cette préparation de l’input. De plus, il paraît ac­compagner davantage l’apprenant dans la prise en main de l’input à tra­vers des exercices qui portent entre autre sur la forme, tels les exercices concer­nant les dialogues que nous avons cités ci-dessus. Toutefois, cela ne signifie pas forcément que la progression dans la transmission du savoir est plus lente que dans le ma­nuel. Cela est peut-être dû aux conditions d’utilisation du CD-rom pour l’apprenant qui ne sont pas celles du manuel. En effet, l’apprenant se retrouve devant son support d’apprentissage, un enseignant n’est donc pas là pour rendre le savoir accessible à son public. C’est donc le savoir qui doit être rendu accessible par les concepteurs du CD-rom et c’est ce qui a été fait ici.

Nous nous sommes ensuite posés la question de savoir ce qu’implique concrète­ment cette attitude des concepteurs du CD-rom pour l’apprenant. Pour cela, nous avons étendu notre analyse au contenu linguistique des dialogues du CD-rom. Grâce à cette méthode, nous avons remarqué qu’ils ne sont pas indépen­dants les uns des autres mais qu’ils s’articulent indéniablement avec les dialogues issus des leçons qui précèdent et qui suivent.

A travers cette mise en parallèle, on peut observer que le dialogue de la leçon 2 formule les idées de souhait et des concepts lexicaux, objet du souhait : différents types de boisson. Puis ces mêmes concepts sont repris dans la leçon 3 avec l’introduction de formules syntaxiques qui intègrent la conjugaison du verbe « trinken ».
En tant qu’observateur/linguiste extérieur, on peut dégager la fonction de l’arti­culation entre ces deux dialogues : la ressemblance et la différence entre deux dia­logues met en évidence la reprise et l’introduction de structures grammaticales et de lexèmes qui devraient déclencher la curiosité et faciliter la réflexion méta­lin­guistique chez l’apprenant. Par conséquent, on peut affirmer que le CD-rom favo­rise plus l’autonomie chez ces usagers que le manuel, même si l’on sait que le CD-rom s’utilise d’emblée en autonomie.

Notes
47.

Voir chapitre 3.2.1