Conclusion :

Pour conclure cette analyse, je peux affirmer que ce travail de comparaison entre la gram­maire dans un CD-rom et un manuel m’a dé­montré que cela en valait la peine de s’intéresser aux apports des nou­velles technologies tel que notre CD-rom.
En effet, même en étant de formation linguistique et didactique, l’utilisation que j’avais faites jusque-là de cet outil ne m’avait pas vrai­ment convaincue. J’avais plus l’impression que ces CD-roms n’étaient « que de la poudre aux yeux » qui mettent en avant des fonctions tech­nologiques apparemment exceptionnelles pour cacher de grosses faibles­ses sur le plan didactique.
Grâce à cette analyse, je me suis aperçue que je connaissais très mal ces CD-roms. Certes, il y en a beaucoup pour lesquels l’argument des fonc­tionnalités d’exception fait vendre et non apprendre, mais certains concepteurs, comme ceux du CD-rom que nous avons choisi, se sont vraiment adonnés à une réflexion pédagogique.

Les points que nous avons analysés dans nos deux supports sont ceux que nous avons retenus justement parce qu’ils nous ont surpris par rapport à nos premières impressions issues de nos utilisations sommaires de CD-roms. Parmi eux, nous avons retenu non seulement des diffé­ren­ces et des similitudes mais aussi des manques, et ce en considérant à cha­que fois les conditions d’utilisation que chaque support impose à ses usa­gers.

Nous avons remarqué que les concepteurs de notre CD-rom ont mis un point d’honneur à ce que l’apprenant soit actif dans son apprentis­sage en le construisant par lui-même et non en étant dépendant d’un sys­tème où tout est déjà prévu comme l’enseignant l’est la plupart du temps avec le manuel. Pour cela, les premiers éléments du CD-rom engagent chez l’apprenant une réflexion métalinguistique non-négligeable à côté du contexte thématique et lexical qui sous-tend ces leçons. Une fois que l’input grammatical est engagé dans les premiers dialo­gues, des exercices reprenant le contexte de chaque dialogue favorise la mise en place d’une grammaticalisation, toutes ces interrogations et hypothèses sur la langue se faisant d’abord inconsciemment pour, petit à petit, gagner en l’assurance. En cela, l’autonomisation de l’apprenant est à la fois contrainte et permise par le programme, ce qui sans les services de l’enseignant n’est pas toujours possible dans le manuel. De plus, ces conditions d’utilisation du CD-rom baignent dans un contexte évaluatif nouveau et assez favorable à un apprentissage autodirigé. Ceci dit, dans ce domaine, nous avons remarqué que les concepteurs n’ont pas toujours été au bout des possibilités offertes par le multimédia qui pourraient leur permettre de vraiment se démarquer du manuel toujours associé à des pratiques relativement classiques. Pour finir le cheminement chronologi­que du savoir de l’activité cognitive de l’apprenant à travers nos sup­ports, nous nous sommes penchés sur la mémorisation qui, dans le CD-rom, est favorisée par la simple mise en page.

Le résultat de cette analyse reflète une prise de position de la part des concepteurs de notre CD-rom sur la langue, la grammaire et l’apprentissage de la grammaire dans une langue : l’étude de la langue n’est pas forcément synonyme de grammaire au sens communément res­senti par les élèves et qui explique leur manque de motivation pour la discipline, à savoir comme une ‘«’ ‘ quantité de savoir complexe à ingurgi­ter obligatoirement à chaque fois que l’apprenant est confronté à la dé­couverte d’un fait de langue inconnu dans la langue-cible ’ ‘»’ ‘ 63 ’. L’approche de la grammaire dans ce CD-rom va vraiment dans le sens de méthodes qui, à la fois laissent la découverte de la langue à la responsabilité de l’apprenant et qui lui donne des aides discrètes pour qu’il s’autogère. Ainsi, nous pensons que l’apprenant peut choisir la mé­thode qui lui convient le mieux et apprécier cette découverte.

Par conséquent, nous ne pensons pas que l’enseignement de la grammaire sur un CD-rom représente une révolution de méthode ou de support. En effet, on peut s’imaginer qu’à cause ou grâce à ces conditions d’utilisation, l’autonomie, c’est-à-dire l’absence d’apprenants qui se trouvent face des concepteurs au moment même où ils crééent ce pro­gramme, les concepteurs de CD-roms doivent ou devraient réfléchir beaucoup plus sur les réactions poten­tielles de leurs futurs apprenants-usagers. En réalité, ce CD-rom rassemble donc des idées déjà connues mais uniquement perfectionnées pour favoriser une utilisation optimale. Il est vrai qu’on se rend vite compte à travers notre analyse que la qualité de ce CD-rom n’est pas uniquement tributaire du multimédia, ce qui ex­plique que de certains éléments du manuel sont tout de même communs au CD-rom.

Au terme de ce travail , nous avons certainement omis des élé­ments qui auraient pu, par ail­leurs, enrichir notre analyse. Cependant, nous ne souhaitions pas être exhaustif. A l’avenir, la grille d’observation des supports pourrait encore être très utile dans la perspective d’une pour­suite de cette analyse. L’objectif de ce travail était bien plus d’approfondir un domaine ainsi que mes opinions qui étaient encore branlants et d’éveiller mon intérêt sur des pistes nouvel­les. De plus, de manière plus générale, ce travail m’a permis, comme le préconise Vigner (2003 : 7), de :

‘mieux apprécier ce que peut être la part de la langue dans un pro­gramme de formation.’

Face à ces résultats qui se dégagent essentiellement de l’analyse du CD-rom, on peut se de­mander si ce support peut d’une manière géné­rale détrôner le manuel scolaire dans les écoles. En ce qui me concerne, je ne suis pas de cette avis car le CD-rom soumet à l’apprenant des conditions d’utilisation plutôt inhabituelles et qui requièrent beaucoup de motivation. Ce CD-rom est tout à fait adapté à un apprenant qui est suffi­samment mûr pour pouvoir s’imposer et respecter une certaine autodisci­pline. En ce qui concerne l’utilisation par des plus jeunes, il en va peut-être autrement. En effet, même si on introduit une pré-formation à l’autonomie avant la prise en main d’un CD-rom par l’apprenant lui-même, la grammaire ne fait pas cavalier seul dans un cours de langue. En effet, il est toujours primordial surtout dans un cours où l’on est sensé y apprendre à parler de garder un contact humain et de communiquer à l’oral. Cet aspect demeurant toujours la lacune du CD-rom, nous nous joignons aux chercheurs tels Cri­non et Gautellier ( 1997 ) qui préconisent une pratique associée des CD-roms et des cours de langue classiques, une mix-formation où l’un des outils est le manuel et l’autre des outils mul­timédia, le CD-rom entre autre. En effet, nous sommes d’avis que c’est aussi la variation des supports d’apprentissage et des méthodes de didac­tisation qui peuvent éveiller les appre­nants aux langues pendant leur scolarité. De plus, cette méthode se révèle être l’une des plus proches des situations linguistiques de communication qu’un individu peut rencontrer au quotidien. En cela, nous rejoignons, même si c’est dans un autre contexte, la parole de Klein (1989) : ‘«’ ‘ Plus l’apprenant a la possibilité et l’occasion de comprendre des énoncés et de construire lui-même des énoncés, plus le processus d’acquisition est susceptible de progres­ser ’ ‘»’.

Le CD-rom fait donc peut-être partie des éléments qui introdui­sent de nouvelles perspectives pour les enseignants et les apprenants. En cela, il s’insèrerait dans le mouvement initié depuis peu : l’Espace numé­rique des savoirs, portail contenant une multitude de ressources numéri­ques adressées aux enseignants et/ou aux apprenants, qui rend par exem­ple possible la visite en 3D du musée du Louvre. Testé depuis un an en vue de son introduction dans l’éducation, il semble aussi remettre en cause une partie de l’enseignement qui devra s’adapter en multipliant de plus en plus les sup­ports et en modifiant quelque peu la relation entre l’enseignant et l’apprenant car le premier ne sera plus le seul maître du savoir.

Notes
63.

Définition personnelle