2.2.2. Des raisons affectives, liées aux personnes :

Le sentiment de ne pas former une équipe de pilotes :

Le manque de confiance les uns envers les autres (se traduisant notamment par la peur de voir répéter ce que l’on dit sur son CE ou d’autres personnes), la difficulté à travailler ensemble en dehors des PAP, le rejet des responsabilités sur l’équipe du matin, de l’après-midi ou de la nuit, le sentiment de ne pas fournir les mêmes efforts de travail et de communication, ne militent pas en faveur de la construction d’une identité collective de groupe…

« Mais bon, c’est pareil s’il faut attendre une réunion pour dire à quelqu’un « il faut faire un tableau, il faut sortir ci ou ça », bon…. On va pas avancer bien vite… »

La difficulté à se construire des objectifs et intérêts communs :

Les moments de discussion dans le PAP pour arriver à une représentation commune des problèmes sont importants. Parfois il semble qu’à l’issu du PAP, le consensus existe. Dans l’intimité des entretiens surgissent de nombreux prétextes à ce qu’il n’en soit pas ainsi : les intérêts et objectifs de chacun divergent parce qu’ils ne se donnent pas les mêmes priorités au quotidien ou parce qu’ils ont une manière différente de les hiérarchiser. Ce qui peut sembler un véritable problème pour l’un ne l’est pas forcément pour l’autre, d’où l’importance de se construire une représentation commune et non alternative des problèmes et de les mesurer. Ce problème existe ! Existe-t-il de la même manière dans toutes les équipes ? Quels en sont les indicateurs ? Quelles en sont les conséquences ?

[ Témoignages circonstanciés en annexe (T34) ]

Une identité professionnelle de pilote en souffrance :

Une mise en œuvre individuelle et non collective : conséquence directe du manque d’interrelations entre pilotes qui se traduit souvent pas des positions attentistes (on attend le prochain PAP pour voir) ou une difficulté à prendre des initiatives.

« Chacun travaille dans son petit coin sans se soucier de l’autre… sans chercher à savoir ce que l’autre met en place »

« Moi je veux bien essayer de faire des choses, mais faut que ça suive. Et là, c’est une autre histoire »

Des acteurs inégalement impliqués ou peu impliqués dans la mise en œuvre des actions du PAP, qu’ils soient pilotes ou non

Le sentiment de ne pas avancer parce que les protagonistes participant à la réalisation d’une action n’ont pas tous avancé. Il arrive même qu’ils soient absents au moment des décisions et donc peu mobilisés mais dans certains cas, c’est plus une fixation de priorités qui ne va pas dans le même sens que celles qu’on donne aux pilotes.

« Ils ont pas traité derrière nous, ça s’entasse ! »

« Pour les bacs bleus, le responsable qualité, il a bloqué. Il dit qu’ils ont autre chose à faire. Nous on se retrouve avec 50 000 pièces et on sait plus quelles sont les bonnes »

« Le technicien ça fait une paye qu’il doit poser les tableaux… Ben non… alors on fait qu’en parler et rien ne bouge »

« Ils font pas la nuit, pourquoi je le ferais ? »

Si l’on prend l’exemple de la mise en place d’ANC, c’est une procédure qui parait lourde aux yeux des pilotes dès lors qu’ils n’ont pas de visibilité sur ce qui est fait parce que les choses ont pris du retard (« traînent »), parce que les fiches ne sont pas toujours consciencieusement remplies, parce que l’on n’est pas convaincu que les « autres » travailleront aussi sur les fiches les concernant (ex : process), etc. Les pilotes dans cette action ne sont pas seuls. C’est eux qui remplissent les ANC mais ces derniers sont ensuite redispachés auprès des personnes concernées (service qualité, chefs d’équipe, techniciens…) et ils n’ont alors plus de nouvelles des problèmes qu’ils avaient identifiés. Si au début on les a sollicités pour faire des propositions d’actions sur les fiches ANC, ces derniers très rapidement ne se sont plus investis.

[ Témoignages circonstanciés en annexe (T35) ]

On peut dire aussi qu’il semble exister des difficultés à coopérer entre catégories professionnelles différentes, chacun cherchant à protéger son « domaine ». A cette difficulté pourrait s’ajouter la difficulté à communiquer et à se comprendre car à chaque métier, son langage.

Par ailleurs le dialogue interhiérarchique n’est pas aisé et les pilotes auraient tendance à apprécier l’absence des « chefs ».