L’Espoir, roman de guerre, nous semble également être, si l’on peut dire, le roman de l’homme, tant il nous semble s’attacher à célébrer la gloire splendide du soldat. L’auteur y exprime toute l’exaltation que lui inspirent l’action militaire et ceux qui l’incarnent. Cette action est présentée sous un jour supérieurement bienfaisant dont les personnages eux-même sont convaincus, vivantes bannières des seules valeurs essentielles que sont le courage, la générosité, la dignité. C’est au nom de ces valeurs que la guerre sera menée et fièrement accomplie, car elle devient leur expression sacrée. Combattre devient alors le but suprême de tout homme véritable, sa joie la plus haute et celui qui s’y dérobera ne méritera pas le beau nom d’homme car il méconnaît la noblesse de l’action collective et se fourvoie dans le culte fallacieux de la liberté individuelle. Ainsi, se dégage du roman l’impression d’une virilité monolithique, sans nuances et par instants si caricaturale, que l’image de l’homme confine parfois au grotesque.
Le front, univers de la fraternité virile
Comme le note Maurice Rieuneau à propos du terme même de fraternité, ‘« aucun mot ne revient plus fréquemment dans L’Espoir, au point de devenir obsédant. Dignité, justice, courage, toutes les valeurs morales importantes se fondent dans ce sentiment vécu et pour ainsi dire physique de la fraternité. ’ ‘ 318 ’ ‘»’ ; c’est ainsi qu’on peut lire :
‘_ « En prison, dit Puig, je n’imaginais pas qu’il y avait tant de fraternité. 319 »’ ‘_ « Pour Jaime, qui avait vingt-six ans, le Front populaire, c’était cette fraternité dans la vie et dans la mort. Des organisations ouvrières(…)il connaissait surtout ces ‘‘militants de base’’ anonymes(…)qui étaient le dévouement même de l’Espagne ; dans ce grand soleil et sous les balles des phalangistes(…)il combattait dans la plénitude de son cœur. 320 »’ ‘_ « Les autos passaient à toute vitesse, dans les deux sens, couvertes des énormes initiales blanches des syndicats, ou du U. H. P. ; leurs occupants se saluaient du poing, criaient : Salud ! et toute cette foule triomphante semblait unie par ce cri comme par un cœur constant et fraternel. 321 »’ ‘_ « [Gonzales]avance vers eux, soulevé(…)par une exaltation fraternelle et dure. 322 »’ ‘_ « Pour la première fois, [Manuel] était en face d’une fraternité qui prenait la forme de l’action. 323 »’ ‘_ « Il y a une fraternité qui ne se trouve que de l’autre côté de la mort. 324 »’Il est intéressant de remarquer qu’Antoine Prost démythifie cette valeur sublime accordée par Malraux à la notion de fraternité en expliquant qu’elle est pour ainsi dire utilisée, instrumentalisée par les soldats au front :
‘« Le privilège accordé à la fraternité répond à la nécessité intime et vitale de donner un sens à ce que l’on vit. Surtout quand la situation est absurde, inhumaine. Pour l’assumer et ne pas se défaire intérieurement en la vivant, les combattants ont été sommés de lui donner un sens. 325 »’Il est également remarquable que cette notion de fraternité virile entraîne parfois dans le roman de Malraux une forme de mépris tacite pour la femme :
‘_ « La guerre unissait les mercenaires aux volontaires dans le romanesque ; mais l’aviation les unissait comme les femmes sont unies dans la maternité. 326 »’ ‘_ « L’anarchisme, pour moi, c’était le syndicalisme, mais c’était surtout le rapport d’homme à homme. 327 »’Il semble que sous la plume de Malraux la femme ne soit perçue que sous l’angle de la maternité, comme une pourvoyeuse de futurs soldats dévoués à la cause.
En outre, cette comparaison établie entre l’aviation et la maternité, nous paraît, sous prétexte d’illustrer l’unité humaine dans l’épreuve, tendre à un certain ridicule car le parallèle est fait entre deux domaines n’ayant rien à voir l’un avec l’autre. De surcroît, cette comparaison entre l’expérience de la guerre, dont l’aviation est ici la métonymie, et l’expérience de la maternité, peut apparaître pour le moins paradoxale si ce n’est incongrue puisque la première engendre la mort et la seconde engendre la vie. Il y a là par ailleurs une sorte de dévalorisation implicite de la fonction procréatrice de la femme.
Dans la seconde occurrence, l’idée semble être que l’anarchisme, comme le syndicalisme, sont deux mouvements politiques exclusivement réservés aux hommes, et qui favorisent ce « (…)rapport(…) »intime, privilégié ; tout cela peut ainsi mettre à mal la générosité dont Malraux semble vouloir doter ses personnages, valeureux soldats se battant contre la dictature franquiste, et pour davantage de justice et d’égalité dans ce monde.
D’autre part, on l’a dit, le roman de Malraux est, comme chez Montherlant, souvent caractérisé par un lyrisme romanesque qui parfois nous semble à la limite du mauvais goût et qui en outre tend à véritablement mettre en scène l’authenticité de la bravoure militaire.
Le soldat, une figure grandiose
‘« (…)dans ce grand soleil et sous les balles des phalangistes(…)[Jaime]combattait dans la plénitude de son cœur. »’La dimension de « plénitude »dans le combat, possède une connotation de plaisir, de bien-être quasi mystiques que l’on a déjà rencontrée chez Gilles et dont on a souligné le caractère paradoxal d’un état de grâce de la guerre, comme si celle-ci était une bénédiction divine pour l’homme ; ainsi, comme l’écrit Maurice Rieuneau, chez Malraux ‘« le lien physique à la guerre fait de l’acte de tuer un plaisir. ’ ‘ 328 ’ ‘»’
Par ailleurs, on observe le même lien privilégié que chez Montherlant entre le soldat et l’enfant:
‘« Des soldats passèrent, en manches de chemise, entourés de vivats et suivis d’enfants…(…)La même impression domine d’une hérédité, d’une continuité, le même sentiment d’un orgueil mâle (car, à n’en pas douter, ces «(…) gosses qui passent (…)», si enthousiasmés par les soldats, sont essentiellement des garçons.)
D’autre part, la présence enfantine participe du lyrisme en conférant à ce passage une atmosphère d’innocence, de pureté morale, atmosphère qui enveloppe du même coup le soldat ; cette présence constitue aussi un élément d’idéalisation, de poétisation du combat qui, par « (…)la bonne humeur » ambiante, perd également son caractère dramatique et s’apparente comme chez Montherlant à un grand jeu sain et viril où n’entrent ni la crainte ni la défaillance.
Cette même tonalité idéalisée, poétisée de la guerre revient quelques lignes plus loin dans une autre scène de liesse populaire :
‘« Les autos passaient à toute vitesse, dans les deux sens, couvertes des énormes initiales blanches des syndicats, ou du U. H. P. ; leurs occupants se saluaient du poing, criaient : Salud ! et toute cette foule triomphante semblait unie par ce cri comme par un cœur constant et fraternel. »’On retrouve une certaine esthétisation, ou plutôt une certaine théâtralisation du combat dans le détail des « (…)énormes initiales blanches(…) » qui allient l’idée implicite de grandeur morale et de pureté, dans le geste et le cri emphatiques des «(…) occupants(…) » des voitures, sonnant comme un geste et une réplique de théâtre, dans ce sentiment de « triomphe » qui semble animer la foule, attribuant ainsi un caractère solennel et majestueux à la scène et à ses protagonistes, ainsi que dans la référence à ce « (…)cœur (…)» unique battant au rythme de la fierté patriote.
Ce contexte particulier nous paraît trouver son incarnation au travers de plusieurs des personnages masculins du roman.
Tout d’abord dans le personnage de Shade qui nous apparaît comme l’icône, à la limite de la caricature, du héros des temps modernes dans la description que Malraux fait de lui :
‘« Shade avait cinquante ans. Revenu de pas mal de voyages(entre autres de la misère américaine, puis de la longue maladie, mortelle d’une femme qu’il avait aimée), il n’attachait plus d’importance qu’à ce qu’il appelait idiotie ou animalité, c’est à dire à la vie fondamentale : douleur, amour, humiliation, innocence. 330 »’Shade personnifie tous les clichés de la représentation romanesque de la virilité : il est un héros entre deux âges, sans illusions, éprouvé, patiné par la vie, meurtri dans ses affections les plus intimes, affichant un faux détachement qui cache une sensibilité bourrue, réceptif aux valeurs primordiales de l’existence et ne s’embarrassant pas de nuances ou de complexités existentielles.
Cette vision lyrique du soldat, de l’homme, qui veut donner à ce dernier une noblesse certaine, se retrouve dans le personnage de Gonzales :
‘« Les chars(…)avancent avec un bruit qui tourne au chahut ; en face, la ligne tremblante des dynamiteurs glisse dans un extraordinaire silence(…)Quelques Catalans ont mal caché leur cigarette dans leur main. Idiots ! devrait penser Gonzales. Il regarde ces points imperceptibles : il est un peu en arrière, peut-être sont-ils moins visibles de l’avant. Il avance vers eux, soulevé par la même marée, par une exaltation fraternelle et dure. En son cœur, sans quitter du regard le tank qui vient vers lui, il chante le chant profond des Asturies. Jamais il ne saura davantage ce que c’est qu’être un homme. »’Ici, la dimension lyrique est à prendre au sens premier puisque la situation belliqueuse inspire au personnage un chant patriotique.
D’autre part, comme pour Gilles et comme pour les personnages de Montherlant, il est frappant de constater dans la dernière phrase du passage un identique rapport du personnage à sa propre identité virile dont il ne parvient à prendre pleinement conscience qu’au cœur du contexte de la guerre, comme pour implicitement rappeler l’intimité étroite qui existe entre l’homme et le fait de se battre, comme pour insister sur le fait que sa virilité ne peut se révéler à l’homme que lorsqu’il se bat.
Maurice Rieuneau explique à ce propos :
‘« C’est que l’horreur et la cruauté font partie, dans l’univers de Malraux, des ‘‘fatalités’’ de l’Histoire et de la condition humaine. Comme telles, elles sont tragiques, mais assumées comme des données essentielles de l’existence virile.Enfin, on relève, là encore comme chez Drieu et Montherlant, une nuance mystique dans la perception de la fraternité virile et du combat de ce personnage, et dont le sentiment l’ « exalte »; il ne s’agit donc pas ici de la fraternité née de la simplicité voire de la trivialité du quotidien de la guerre et qui permet aux soldats d’être unis par des actes prosaïques, tangibles et humbles.
Cette définition de l’homme qui se rapproche de l’archétype masculin s’observe encore particulièrement à travers le personnage de Manuel :
‘« La conscience qu’avaient ces hommes de représenter des vies, des faiblesses et des responsabilités(…)était si évidente que la révolution, dans sa part la plus simple et la plus lourde, était entrée avec eux : la révolution, pour celui qui parlait, c’était le droit de parler ainsi. Manuel l’étreignit, à l’espagnole, et ne dit rien.Dans le comportement du personnage de Manuel entre une part involontairement caricaturale tant cette étreinte toute de fière dignité silencieuse se rapproche d’un prototype masculin(car un « vrai »homme ne parle pas, ne se livre pas, laissant ces manifestations intempestives à la femme. ) Même l’emploi d’un terme argotique, ou tout au moins familier, apparaît comme un indice langagier d’une virilité brute et bourrue qui ne s’embarrasse d’aucun artifice et ne se préoccupe que d’actes fondamentaux.
Il est à noter que l’action guerrière elle-même est empreinte d’un certain lyrisme :
‘« Les hommes unis à la fois par l’espoir et par l’action accèdent, comme les hommes unis par l’amour, à des domaines auxquels ils n’accèderaient pas seuls. L’ensemble de cette escadrille est plus noble que presque tous ceux qui la composent. 332 »’En effet le caractère lyrique procède ici de la comparaison avec l’amour et l’expérience de la guerre retrouve une nouvelle fois sa qualité d’état de grâce.
Toutefois, force est de constater que, derrière la glorification de notions telles que la communauté, le groupe, l’activité collective, chères à Malraux, un paradoxe demeure rattaché à cette même comparaison qui unit l’amour et une action collective ayant pour but la mort et la destruction, quand bien même elle s’origine dans des motifs louables. Dans cette logique, Maurice Rieuneau souligne au sujet de Malraux :
‘« (…)il a fondu en un seul le thème guerrier et le thème révolutionnaire, et par-là même réhabilité l’idée de guerre, discréditée par tant de témoignages sur l’horreur et l’absurdité, en lui rendant un visage noble et un sens généreux, en fondant un nouvel humanisme sur l’idée de combat pour la justice et sur des valeurs d’action. 333 »’Enfin, la guerre est encore vue avec un certain lyrisme dans le passage suivant :
‘« (…)l’essentiel de l’homme(…)est à mes yeux en de tels domaines. ‘‘ Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front.’’ Pour nous aussi, voyez-vous, même et surtout quand la sueur est glacée… 334 »’En ramenant l’existence de l’homme et la tâche du soldat à une signification biblique et en évoquant «(…) la sueur(…)glacée(…) » de la peur, lot quotidien de l’homme au front, Malraux non seulement intègre le soldat et l’univers de la guerre dans une sphère de la transcendance, lui donnant une identité se rapprochant de l’ordre de la sainteté ; mais d’autre part, peut-être la référence à la notion de vital contenue dans ce commandement divin accentue-t-elle l’aspect élémentaire de cette virilité originelle qui se rapproche de celle célébrée par Montherlant. Ainsi, ‘« (…)pour Malraux(…)une humanité pacifique serait presque aussi inconcevable qu’une humanité sans religion ou sans art. Ce serait une humanité mutilée de tout désir déterminé, de toute dignité métaphysique. La guerre aussi est un anti-destin, plus viril que l’art, sinon plus fort. ’ ‘ 335 ’ ‘»’
Le soldat, symbole d’une virilité monolithique
Par ailleurs, il est à noter que le courage développé par le soldat malrusien est, comme chez Montherlant, un courage orgueilleux, belliqueux, aventureux, et qui renvoie l’image d’une virilité rude, inflexible, indomptable, comme en témoignent les passages suivants :
‘_ « (…)Puig les regardait tomber les uns après les autres.De plus, la notion de courage apparaît dans le roman sous un visage exclusivement militaire, non pas humain :
‘« Le courage est une chose qui s’organise, qui vit et qui meurt, qu’il faut entretenir comme les fusils… 338 »’L’effort louable devient ici stratégie utilitaire et mécanique. En outre, la comparaison avec l’arme donneuse de mort ôte à la valeur du courage tout caractère altruiste en l’assimilant à une réaction belliqueuse. L’homme courageux, dans cette optique, ne serait alors plus, par une sorte de contresens, celui qui sait dompter ses failles puisqu’il est censé ne pas en avoir.
Ainsi, la dimension humaine de la guerre paraît totalement occultée par les personnages du roman :
‘« ‘‘(…)un officier doit être aimé dans la nature de son commandement(…)et non dans les particularités de sa personne. (…)un officier ne doit jamais séduire(…)il y a plus de noblesse à être un chef qu’à être un individu, reprit le colonel : c’est plus difficile…’’ 339 »’Ici encore se dégage la seule dimension militaire au détriment de la notion d’être humain, ce qui nous semble quelque peu contradictoire avec l’idée de fraternité chérie par Malraux. Seul le rôle social du militaire acquiert de la valeur ; la complexité, la difficulté du développement de toute identité humaine est méconnue.
Par le biais de ses personnages, Malraux fait donc l’apologie d’une force morale péremptoire :
‘« C’est pas facile pour les hommes de vivre ensemble(…)Bien. Mais il y a pas tant de courage que ça dans le monde ; et avec le courage, on fait quelque chose ! Pas d’histoires(…)Vivre comme la vie doit être vécue, dès maintenant, ou décider. Si ça rate, ouste. Pas d’aller-retour. 340 »’Dans cette mentalité masculine n’existent ni la fragilité, ni la défaillance ni le compromis ; la virilité ne peut être qu’autoritaire, sans autre forme d’expression concevable. Il s’agirait peut-être alors davantage de témérité que de courage.
L’idéal révolutionnaire aux principes humanistes défendu par ces hommes fiers de leur action comme l’attestent les passages suivants, nous paraît donc quelque peu antithétique :
‘_ « A quoi sert la révolution si elle ne doit pas rendre les hommes meilleurs ? 341 »’ ‘_ « Les mythes sur lesquels nous vivons sont contradictoires : pacifisme et nécessité de défense, organisation et mythes chrétiens, efficacité et justice, et ainsi de suite. Nous devons les ordonner, transformer notre Apocalypse en armée, ou crever. C’est tout. (…)Beaucoup d’hommes(…)attendent de l’Apocalypse la solution de leurs propres problèmes. Mais la révolution ignorent ces milliers de traites qui sont tirées sur elles, et continue… 342 »’ ‘_ « La générosité, c’est d’être vainqueur. 343 »’ ‘_ « Il n’y a pas cinquante manières de combat, il n’y en a qu’une, c’est d’être vainqueur. 344 »’L’utopisme des combattants de Malraux ne nous paraît guère différer de l’attachement sanguinaire et égoïste de Gilles ou d’Alban à l’activité destructrice et meurtrière du conflit. En effet, on ne peut s’empêcher de remarquer que les généreux personnages de L’Espoir défendent un idéal en s’appuyant sur des moyens et sur des idées exprimant une constante volonté belliciste. Nous rejoignons alors pleinement Maurice Rieuneau lorsqu’il affirme que dans l’éthique malrusienne la guerre ‘« (…)garde pourtant une ambiguïté foncière : lieu de l’affirmation de soi par l’héroïsme de la volonté, de la dignité profonde par l’affrontement lucide de la mort, moyen de la fraternité virile, elle est aussi le témoin d’une déchéance originelle puisque l’action héroïque est d’abord divertissement, refuge contre l’angoisse, et que l’idéal de fraternité ne s’atteint qu’à travers la violence et le meurtre.’ ‘ 345 ’
‘On voit toutefois, au cours de la première période de l’œuvre de Malraux(…)la guerre perdre une partie de son caractère négatif en s’assimilant de plus en plus les vertus d’innocence et de justice que lui confère l’idée révolutionnaire. L’assomption de la guerre en révolution signifie donc une valorisation. Malraux aime la guerre beaucoup plus qu’il ne la hait. Elle le fascine, comme indispensable à son éthique virile ; elle préserve de l’avilissement et de la déchéance d’un bonheur quiet, et affirme la valeur éminente du risque. ’ ‘ 346 ’ ‘»’
(Il est également troublant de relever par ailleurs dans la deuxième occurrence, l’observation du personnage à propos de ces hommes qui cherchent à régler dans la guerre leurs conflits personnels, car cette observation n’est pas sans rappeler l’attitude de Gilles. )
Il est frappant de constater dans les trois dernières occurrences que l’individualité, l’individu sont niés car confondus avec la notion d’individualisme ; ce qui aboutit à la vision d’un monde bipolaire dont le principe, qui pourrait se résumer à vaincre ou mourir, est un principe d’autorité absolue qui ne laisse pas de place au sentiment, pourtant au fondement même de la notion de personne.
Ce principe sans concession exprimé clairement dans la conviction de Manuel à la troisième occurrence, rappelle comme chez Montherlant que la défaite, la chute, sont indignes d’un homme.
Et il est particulièrement frappant d’observer que dans la dernière occurrence on retrouve, sous des dehors nobles, une variation de la loi du plus fort.
Enfin, il nous paraît intéressant de souligner le traitement particulier de la femme opéré par Malraux, à travers l’unique figure féminine du roman :
‘« Shade avait vu la Pasionaria, noire, austère, veuve de tous les tués des Asturies, conduire dans une procession grave et farouche, sous des banderoles rouges qui portaient sa phrase fameuse ‘‘Il vaut mieux être la veuve d’un héros que la femme d’un lâche’’, vingt mille femmes qui(…)scandaient(…)no pasaran(…)» 347 ’Ce personnage féminin implicitement révéré par les soldats autrement que pour son rôle procréateur est une femme affichant une absence totale de féminité, de personnalité propre, tout entière, comme eux, dévouée à la cause et partageant leurs convictions. Elle participe, par sa vision de la masculinité, de l’image survirilisée de l’homme.
in Guerre et révolution dans le roman français, op. cit. p. 522
L’espoir, Paris, Gallimard, collection « Le livre de poche », 1966, p. 37
ibid, p. 44
ibid, p. 48-49
ibid, p. 233
ibid, p. 269-270
ibid, p. 362-363
in Les Anciens Combattants, 1914-1940, op. cit. p. 45
op. cit. p. 76
ibid, p. 88
in Guerre et révolution dans le roman français, op. cit. p. 528
op. cit. p. 48
ibid, p. 54
in Guerre et révolution dans le roman français, op. cit. p. 318-319
op. cit. p. 318-319
in Guerre et révolution dans le roman français, op. cit. p. 314
op. cit. p. 319
Maurice Rieuneau, op. cit. p. 335
op. cit. p. 30
ibid, p. 33
ibid, p. 170
ibid, p. 173
ibid, p. 200
ibid, p. 210
ibid, p. 212
ibid, p. 256
ibid, p. 390
souligné par nous
in Guerre et révolution dans le roman français, op. cit. p. 338-339
op. cit. p. 380