A. Novius cardinalis, première réussite de lutte biologique

En 1896, l’entomologiste Decaux n’hésite pas à affirmer : « Nous avons montré par de nombreux exemples, depuis trente ans, que l’Homme peut se servir, avec succès, de ces auxiliaires naturels (les parasites) et les propager où ils n’existaient pas, même à des distances assez considérables »743. Pourtant, dans le cas de nouvelles invasions, aux conséquences économiques et sociales incontestables, les tentatives d’acclimatation d’un auxiliaire demeurent vouées à l’échec au cours du dix-neuvième siècle. C’est ainsi que l’acarien prédateur (Tyroglyphus phylloxeræ) envoyé en 1873 par l’américain C.V. Riley à Planchon, lequel propose la dissémination d’insectes américains au Président de la Société des agriculteurs de France dès 1870744, pour combattre le Phylloxera n’engendre aucune lutte efficace. Cet acarien est d’ailleurs jugé par Planchon lui-même comme ayant « une action peu sensible »745.

Au tournant du vingtième siècle, les méthodes de destruction directe des ravageurs, par le biais des procédés insecticides ou mécaniques, souvent coûteux et d’une efficacité très relative, demeurent les plus usitées. Cependant, les premières véritables réussites de lutte biologique, s’inscrivant dans une conception de réduction permanente des effectifs des déprédateurs, apparaissent avant la Grande guerre. La réussite de l’acclimatation d’une coccinelle au début du vingtième siècle permet alors tous les espoirs. Cet insecte, élevé et lâché en France pendant plusieurs décennies, nommé Novius cardinalis 746, illustre parfaitement la lutte biologique par acclimatation. Mais, afin de cerner l’importance économique de cet animal, nous devons dans un premier temps, aborder les actions néfastes du ravageur des cultures dont il se nourrit.

Notes
743.

F. DECAUX, « Sur les noix véreuses. Quelques considérations sur les insectes parasites utiles, moyens de les propager », dans Journal de la Société nationale d’horticulture de France, tome 18, 1896, pp. 1136-1146

744.

Gilbert GARRIER, Le Phylloxera, une guerre de trente ans, 1870-1900, Paris, Albin Michel, 1989, 197 p.

745.

Actes du congrès phylloxérique international réuni à Lausanne du 6 au 18 août 1877, Lausanne, Imprimerie Lucien Vinant, 1877.[Réuni avec la conférence de Berne en 1878 pour un total de 122 p.]

746.

Bien que le nom le plus usité soit Novius cardinalis, les déterminations de la fin du dix-neuvième siècle décrivent cet insecte sous le terme générique Vedalia. Ce dernier nom est parfois utilisé à la fin du vingtième siècle. De plus, cette coccinelle est aussi nommée Rodolia cardinalis. Afin de conserver une certaine homogénéité au texte, nous évoquerons la coccinelle auxiliaire sous l’unique appellation de Novius cardinalis.