Nous avons succinctement décrit les résultats des prévisions concernant, de 1898 à 1939, quelques déprédateurs des vignes et de certains fruitiers. Eu égard au nombre d’espèces cultivées en France, nous n’aborderons, postérieurement à 1945, que quelques exemples permettant d’illustrer notre propos. Par ailleurs, l’analyse des méthodes de prévisions, données scientifiques, modifiées et affinées en permanence, n’entrent pas dans le cadre de notre étude.
En revanche, la prévision de risques de plus en plus variés, intéressant des cultures des plus diverses, permet au S.P.V. de gagner une audience certaine. En effet, « progressivement, les stations d’avertissements se sont occupées, outre des questions viticoles, des problèmes d’arboriculture fruitière, puis de cultures légumières et de grandes cultures »1933.
La prise en compte de déprédateurs de plus en plus nombreux s’accompagne également de campagnes publicitaires. Alors que 4 500 affiches de 1947, destinées à inciter les cultivateurs à lire les avertissements agricoles, demeurent dans les placards des stations de Lyon, Paris et Avignon, il est envisagé par le S.P.V. d’en éditer de nouvelles en 1950. Le nombre prévu correspond à trois par commune soit environ 120 000 pour l’ensemble du territoire national1934. La réussite d’une telle propagande repose cependant sur la véracité des prévisions et sur le nombre de plantes cultivées intéressées par les avertissements.
Ainsi, le rapport d’activité de la station champenoise indique en 1950 : « Le nombre des abonnés est passé de 72 en 1949 à 129 pour l’année 1950. L’extension des avertissements aux parasites des plantes de grandes cultures, notamment les oléagineux, doit permettre d’augmenter assez rapidement le nombre des abonnés »1935. À cette date, le S.P.V. fournit régulièrement des avertissements, ayant pour cible de nombreux déprédateurs, concernant les cultures traditionnelles. Le tableau ci-dessous indique la situation en 1950. Il s’agit d’un inventaire national. Les stations élaborent les avertissements en fonction des cultures principales de la circonscription concernée.
Culturesccd | Ravageurs | Maladies parasitaires |
Vignes | Eudemis, cochylis, pyrale, noctuelles | Mildiou, oïdium, black-rot, rot-brenner |
Fruitiers à pépins | Carpocapse, anthonome (pommier et poirier),hoplocampe du poirier, divers pucerons, chenilles défoliatrices | Tavelures (pommier et poirier) |
Fruits à noyaux | hoplocampe des prunes, carpocapse des prunes,tordeuse orientale du pêcher | Monilia, coryneum |
Houblon | puceron, acarien rouge | Mildiou |
Pomme de terre | doryphore | Mildiou |
Betterave | Teigne | cc |
Cultures grainières | Divers pucerons, lixus, punaises des crucifères, piérides | cc |
Parfois, les agriculteurs d’une région demande au S.P.V. des précisions sur les déprédateurs de leurs cultures. En 1961, le nombre de ravageurs et de parasites des productions maraîchères relevant des méthodes préventives constitue une minorité : mildiou de la tomate, mouche de l’asperge, teigne du poireau, anthracnose, cladosporiose, oïdium des cucurbitacées1937. Par ailleurs, si certaines stations fournissent des renseignements précis d’autres s’en tiennent à des informations générales. Ainsi, par exemple, les stations d’Orléans et de Clermont-Ferrand diffusent de véritables informations sur la mouche de l’asperge, alors que Lyon, Angers et Paris se cantonnent à une documentation d’ordre général. À la même époque, dans certains départements, les abonnés des avertissements agricoles souhaitent des informations plus précises afin de lutter efficacement contre les ennemis des cultures légumières. En 1966, la station de Rennes considère cette action comme un objectif uniquement retardé par des questions scientifiques concernant la mise au point des prévisions1938.
Les cultures légumières ne représentent pas un fait exceptionnel. D’autres productions échappent également, localement, aux avertissements agricoles pour des raisons sans lien avec les connaissances biologiques incomplètes des ennemis combattus. Ainsi, en 1971, la circonscription Languedoc compte environ 1 000 hectares de pruniers qui ne peuvent recevoir d’indications de la station faute de moyens et de correspondants1939.
Cependant, au milieu des années 1970, les principales cultures métropolitaines bénéficient d’une prévision des risques majeurs. Le tableau ci-après indique, par circonscription phytosanitaire, les types de cultures soumises à des bulletins d’alerte, élaborés grâce à environ 1 080 correspondants nationaux1940. Les regroupements culturaux souffrent cependant d’une certaine imprécision. En effet, les termes de “fruitiers” et “céréales” recouvrent des végétaux variés aux ennemis multiples. Afin de cerner l’étendue des études réalisées, nous pouvons citer l’exemple de la station “Aquitaine” qui, entre le 17 octobre 1977 et le 13 juin 1978, observe l’évolution biologique de onze déprédateurs, (et publie huit avis concernant dix d’entre eux dont la présence constitue un danger), uniquement pour le blé tendre d’hiver1941.
Circonscriptions | Cultures concernées |
Auvergne/Limousin | Céréales, colza, fruitiers, cultures légumières, pommes de terres, vignes |
Aquitaine | Céréales, colza, fruitiers, maïs, vignes |
Basse/Haute-Normandie | Betteraves, céréales, colza, fruitiers, cultures légumières, lin, maïs, pommes de terre |
Bourgogne/Franche Comté | Betteraves, céréales, colza, fruitiers et petits fruits, cultures légumières, maïs, pommes de terre, vignes |
Centre | Betteraves, céréales, colza,fruitiers, cultures légumières, maïs, pommes de terre, vignes |
Île-de-France | Betteraves, céréales, colza, fruitiers, cultures légumières, pommes de terre |
Languedoc | Céréales, colza, fruitiers, cultures légumières, oliviers, vignes |
Nord-Pas-de-Calais | Betteraves, céréales, fruitiers, cultures légumières, maïs, pommes de terre, vignes |
Pays de la Loire | Fruitiers, cultures légumières, maïs, pommes de terre, vignes |
Poitou-Charentes | Céréales, colza, fruitiers, maïs, pommes de terre, vignes |
Provence-Alpes-Côte d'azur | Fruitiers,lavandins, cultures légumières, œillets, olivier,vignes |
Rhône-Alpes | Céréales, colza, fruitiers et petits fruits, lavandes, cultures légumières, vignes |
A.N.-F., 5 SPV 115, Compte-rendu de la réunion du groupe d’étude de la région sud, Bordeaux, 15 février 1966, 9 p.
AN.-F., 5 SPV 114, Compte-rendu de la réunion annuelle des agents de la P.V. chargé des avertissements agricoles, Paris, 29&30 novembre 1949, 23 pp.
AN.-F., 5 SPV 109, Rapport sur le fonctionnement de la station en Champagne des avertissements agricoles, 1950
D’après Fernand WILLAUME, « Ce qu’il faut savoir de l’organisation de la défense des végétaux en France », dans Phytoma, février 1951, pp. 7-16
J. BOUCHET, « Les stations d’avertissements agricoles et les parasites des cultures maraîchères en 1961 », dans Phytoma, avril 1962, pp. 17-22
A.N.-F., 5 SPV 99, F. BARBOTIN, G. PAITIER, J. DELOUSTAL, « Réponse au questionnaire de janvier 1966 », dans annexe au bulletin technique des stations d’avertissements agricoles n°75, 28 décembre 1966, 4p.
A.N.-F., 5 SPV 117, Réunion nationale du 21 janvier 1971.
A.N.-F, 98 0474-12, Rapport d’activité du S.P.V., Direction de la qualité, [Information concernant les avertissements en p. 29]
A.N.-F., 16 DQ 54, Fonctionnement du réseau céréales, Evolution des maladies et des ravageurs des céréales, S.P.V.-Avertissements agricoles 1977-1978, 44 p. [Rapporteurs : G. LECHAPT (Poitou-Charentes), J.-P. PIQUEMAL (Nord/Pas-de-Calais/Picardie) ]. Chiffres provenant de l’annexe n° 25 intitulée : thèmes traités dans les avertissements agricoles.