Intérêt national de la protection des cultures

Bien que les pratiques phytosanitaires impulsent l’obtention de rendements supérieurs et des productions de qualités favorisant l’intégration des agriculteurs dans un système concurrentiel, elles permettent aussi la consolidation de la position agricole et commerciale de la France, notamment par rapport aux Etats-Unis. Cette préoccupation favorise, au cours du vingtième siècle le développement de certaines professions scientifiques dont les travaux sont liés aux applications agricoles. En effet, la volonté d’expérimentation de tous les moyens de lutte, qu’elle soit étatique ou industrielle, qui s’exprime de plus en plus précisément au cours du vingtième siècle, permet de réduire les échecs de terrain liés à l’inefficacité des produits commerciaux ou aux aléas des méthodes biologiques. C’est ainsi que les méthodes de lutte par usage d’auxiliaires, vont progressivement s’émanciper d’un raisonnement théorique fondé sur l’observation pour aboutir sur des démarches expérimentales plus approfondies. La mise en place de toutes les modifications en matières de protection des végétaux résulte alors d’un processus en grande partie de type vertical descendant. Bien que de nouvelles professions apparaissent au sein et grâce à l’Etat, les pouvoirs politiques ne privilégient certaines options phytosanitaires qu’en fonction des résultats possibles.

L’usage des arsenicaux, fondé sur une entorse manifeste de la Loi de 1846, encouragée par l’État dès la fin du dix-neuvième siècle, constitue un exemple particulièrement intéressant. Ainsi, bien que le corps médical réussisse à obtenir une canalisation des usages (1916), des dérogations apparaissent durant plusieurs années et, ultérieurement, en particulier pour les doryphores (1938), des décrets permettent l’utilisation de formulations auparavant interdites (poudrages si l’on considère les doryphores). Dans d’autres cas, la sauvegarde d’une production comme le colza, autorise des traitements nuisibles pour d’autres activités agricoles, l’apiculture dans ce cas précis. Enfin, autre fait d’importance capital, l’interdiction du D.D.T. intervient, malgré les réticences de quelques responsables ministériels, à une période où, à cause des phénomènes de résistances, cette substance n’est plus que faiblement usitée.

Dans la seconde moitié du siècle, dès l’apparition de conséquences néfastes et particulièrement visibles, ce sont cependant les structures officielles qui envisagent de considérer une production commercialisable tout en limitant les effets secondaires les plus indésirables. La lutte intégrée, ou du moins la lutte raisonnée, développée grâce aux recherches initiées par des organismes d’État, permet la sauvegarde d’une production à hauts rendements, imposée par la concurrence. Dans certains cas, elle permet même de relancer des cultures abandonnées à la suite d’un trop grand usage des seuls pesticides de synthèse (colza du Lauragais au début des années 1970).