b) L’influence particulière de Symmaque et d’Ausone

Si la présence de ces auteurs « tardifs » est au moins aussi importante, sur la forme comme sur le fond, que celle des « classiques », il est frappant de constater qu’Ennode ne cite jamais leur nom que l’on ne devine qu’au détour d’une citation ou d’une périphrase286. Seuls les « classiques » méritent d’être cités explicitement. Pourtant, les correspondances de Symmaque et d’Ausone ont exercé une influence particulière sur la conception, le style et le contenu des Épîtres d’Ennode. La Correspondance de Symmaque, « personnage d’une éloquence sublime287 », était considérée dès le Ve siècle, comme un modèle épistolaire288 : Sidoine Apollinaire, par exemple, justifiait sa décision de publier sa propre Correspondance en invoquant les précédents de Symmaque et de Pline le Jeune289. Les références à Symmaque dans les œuvres de Jordanès, qui cite l’epist. 1, 12290, et d’Arator, qui cite l’epist. 8, 22291, « prouvent », selon J.-P. Callu, qu’« au VIe s., la Correspondance était accessible dans la bibliothèque des Symmachi 292 ». La révérence d’Ennode à l’égard de Symmaque n’est donc pas surprenante. Elle explique les nombreuses citations de l’epist. 17 d’Ausone qui était adressée à Symmaque et transmise avec l’œuvre de ce dernier. Dans les seuls livres I et II des Épîtres d’Ennode, nous avons relevé vingt citations ou réécritures de Symmaque et cinq d’Ausone.

Notes
286.

Comme nous l’avons remarqué plus haut, le nom de Symmaque n’apparaît jamais, bien que sa Correspondance soit de loin l’œuvre épistolaire la plus citée.

287.

Epist. 2, 13, 1 à Olybrius : eloquentiae persona sublimis.

288.

G. Polara , « La fortuna di Simmaco dalla tarda antichità al secolo XVII », Vichiana, 1, 1972, p. 250-263. Malheureusement, cette étude ne dit pas un mot de l’influence de Symmaque sur Ennode.

289.

Sidon. epist. 1, 1, 1 à Constantius, p. 2 : diu praecipis, domine maior, (…) ut, si quae mihi litterae paulo politiores uaria occasione fluxerint, prout eas causa, persona, tempus elicuit, omnes retractatis exemplaribus enucleatisque uno uolumine includam, Quinti Symmachi rotunditatem, Gai Plinii disciplinam maturitatemque uestigiis praesumptuosis insecuturus : « depuis longtemps vous me pressez (…) de réunir en un volume, après avoir révisé et corrigé les originaux, toutes les lettres qui seraient, parmi celles qui ont coulé de ma plume en diverses occasions, un peu plus châtiées en raison du sujet, de la personne ou de la circonstance qui les ont provoquées, pour suivre de mes pas présomptueux les traces de Symmaque dans son style périodique et celles de Pline le Jeune dans sa science et sa perfection » (trad. A. Loyen).

290.

Iord. Get. 19, 104.

291.

Arator Act. 2, 455.

292.

Symm. tome IV, p. XIII, note 22.