Deux hypothèses ont été formulées faisant d’Ennode tantôt le fils de Firminus, tantôt celui de Camillus. La première solution, la plus fréquemment admise624, se fonde sur des données onomastiques. Dans la dictio 8, écrite à l’occasion de l’entrée de son neveu Lupicinus dans l’auditorium de Deuterius, Ennode demande à Lupicinus (Flauius Firminus Licerius Lupicinus) de faire fructifier l’héritage de ses maiores : « Firminus et Licerius, astres de leur époque, confortent ton talent par ces paroles : contemple (…) la souche de l’une et l’autre famille625 ». Cet encouragement semble révéler l’identité des grands-pères de Lupicinus (Firminus et Licerius) et, partant, celle du père d’Ennode (Firminus). Toutefois, il est possible qu’Ennode ait cité les noms des personnages les plus en vue dans chacune des deux familles. La Correspondance témoigne en effet de son admiration pour un certain Firminus (epist. 1, 8 et epist. 2, 7) qui fut peut-être le correspondant de Sidoine Apollinaire et le commanditaire du livre IX des épîtres de Sidoine626. Ce Firminus est bien un parent627 d’Ennode mais ne peut pas être son père, décédé depuis longtemps. Si le père d’Ennode s’appelle Firminus, il faut donc supposer l’existence de deux Firminus. Néanmoins, la révérence d’Ennode pour son correspondant montre que ce Firminus est suffisamment rayonnant pour être cité en exemple à Lupicinus. Pouvant être le grand-oncle du jeune homme, il ne serait pas surprenant qu’il fût présenté comme un de ses maiores.
Ce constat a conduit J. Sirmond, en 1611, à considérer que le père d’Ennode était le frère de Firminus, Camillus, le second fils de Felix Ennodius, proconsul d’Afrique vers 420. L’ascendance directe de Camillus nous est donnée par une lettre de Sidoine Apollinaire : « à côté [de Sévérinus] se trouvait Magnus, préfet honoraire depuis longtemps, consul honoraire depuis peu, une personnalité digne de cette double distinction, après lequel avait pris place Camillus, le fils de son frère, qui, en assumant lui aussi la charge de deux magistratures avait fait honneur à la fois au proconsulat de son père et au consulat de son oncle628 ». Reprise par G. Hartel dans son édition de 1882 et défendue récemment par B. Bureau629, cette seconde hypothèse s’appuie sur une lettre d’Ennode à Bassus qui entretenait, semble-t-il, une vieille amitié avec les parentes d’Ennode630. Ennode prie Bassus de se souvenir de Camillus : « si tu gardes à l’esprit Camillus, tu n’oublieras pas Ennode631 ». Cette lettre ne permet pas d’affirmer catégoriquement que le parens d’Ennode, Camillus, soit son père puisque le vocabulaire de la « parenté » ne désigne pas seulement les liens du sang632. Toutefois, « s’il est difficile d’aller jusqu’à dire que Camillus est le père d’Ennode, il est tout aussi difficile, et peut-être plus encore, de le faire pour Firminus633 ». Si la lecture des Épîtres nous conduit à préférer l’hypothèse de Sirmond, il faut bien reconnaître que ce choix ne bouleverse pas notre connaissance de la famille d’Ennode puisque Firminus et Camillus étaient probablement frères, fils de Felix Ennodius, proconsul d’Afrique vers 420.
C. Settipani, « Ruricius Ier évêque de Limoges et ses relations familiales », p. 195 ; PLRE, p. 393 ; PCBE II, p. 620.
Ennod. dict. 8, 4 : Peritiam tuam Firminus et Licerius, aetatis suae sidera, hac uoce conueniunt : ‘Suscipe, doctissime hominum, utriusque plantam familiae (…)’.
Sidon. epist. 9, 1, 1.
Ennod. epist. 2, 7, 2 à Firminus : propinquus ; epist. 2, 7, 4 : prosapia.
Sidon. epist. 1, 11, 10 à Montius, II, p. 38 : iuxta eum Magnus, olim ex praefecto, nuper ex consule, par honoribus persona geminatis, recumbente post se Camillo, filio fratris, qui duabus dignitatibus et ipse decursis pariter ornauerat proconsulatum patris, patrui consulatum (trad. A. Loyen).
B. Bureau, « Parthenius et la question de l’authenticité de la Lettre à Parthenius d’Arator », Moussyllanea. Mélanges de linguistique et de littérature anciennes offerts à Claude Moussy, 1998, p. 387-399.
Ennod. epist. 4, 25, 1 à Bassus : Si uetus diligentia quae a parentibus meis erga amplitudinem tuam fructus uberes de gratiae messe condebat, circa personam meam pro fidei memoria seruaretur, monstraret frequentia litterarum, et insepultam caritatem testis pectoris sermo recluderet.
Epist. 4, 25, 2 à Bassus : si Camillum mente retines, Ennodium non omittes.
M. Heinzelmann, « Pater Populi : langage familial et détention de pouvoir public », Aux sources de la puissance : sociabilité et parenté, 1989, p. 47-56 ; voir aussi S. A. Kennell, p. 140, n. 64.
B. Bureau, « Parthenius et la question de l’authenticité de la Lettre à Parthenius d’Arator », art. cit., p. 395.