21. – Ennode à Albinus

Première lettre à Albinus 1855  : Ennode lui a déjà adressé quatre lettres restées sans réponse ! C’est probablement la faute du porteur. Mais qu’Albinus daigne malgré tout envoyer quelques lignes !

1. Quatre fois j’ai envoyé mes écrits à votre Grandeur et me voici encore accusé comme si j’étais paresseux. Ma langue s’est mise au service de mon affection : mais votre amitié ne récompense pas mon assiduité. Je crois que c’est la négligence ou l’hostilité du porteur 1856 qui m’a conduit à cette disgrâce. Voici pourtant que je multiplie mes écrits et, vous donnant comme vous le souhaitez des nouvelles de ma bonne santé, je désire me réjouir de votre bonheur 1857 . 2. Adieu, mon cher Seigneur, et relevez celui qui vous aime en lui prodiguant votre considération parce que vous faites une chose toute proche de Dieu, en relevant par votre pleine confiance et communion 1858 celui qui s’en remet à votre patronage.

Notes
1855.

Albinus, fils du préfet Basilius, était un membre de la famille des Decii, consul en 493, préfet du prétoire en Italie en 500(?)-503 puis patrice. Ennode lui écrivit quatre lettres restées sans réponse et aujourd’hui perdues ainsi que deux autres lettres (epist. 2, 21 et 6, 12). Ennode le recommande à son parent Faustus Niger (epist. 2, 22) (voir PLRE, « Albinus 9 », p. 51-52).

1856.

Le porteur endosse la responsabilité de la rareté de l’échange épistolaire (voir epist. 2, 7 à Firminus, p. 375, note 10). Cette excuse est un lieu commun des correspondances. Elle permet de se justifier ou de relancer un correspondant récalcitrant sans lui adresser des reproches (voir Symm. epist. 6, 56 : quae si casu aliquo aut neglegentia portitoris elapsae sunt… ; « si par quelque hasard ou bien par la négligence du porteur, [la lettre] vous a échappé… » trad. J.-P. Callu).

1857.

Se donner mutuellement des nouvelles de sa santé constitue la base de tout échange épistolaire. Ennode demande donc à Albinus d’entretenir avec lui des relations minimales. Le silence épistolaire de ce dernier est peut-être une marque d’hostilité qui pourrait s’expliquer par le schisme laurentien. En effet, Ennode était l’un des principaux défenseurs du pape Symmaque qui avait « cassé » le décret de Basilius (la scriptura de 483 qui refusait l’aliénation des biens ecclésiastiques) afin d’empêcher l’aristocratie de contrôler la gestion du patrimoine de l’Église romaine (voir commentaire, chapitre 6, p. 189-190). Or, comme la majorité de l’aristocratie consulaire, les fils de Basilius (Albinus, Theodorus, Inportunus, Avienus) soutenaient Laurent, le rival de Symmaque. Par cette lettre insistante, Ennode s’efforce donc probablement de rétablir des relations mises à mal, voire rompues par le contexte du schisme.

1858.

Nous pensons que le complément plena fide et communione porte sur releuare plutôt que sur credentem qui a déjà pour complément patrocinio uestro.