3.2 Méthode de présence/absence : les oiseaux migrateurs

Par leur faculté de se déplacer d’un lieu à l’autre, parfois sur des distances parfois considérables, en quête de sources de nourriture ou fuyant des conditions climatiques insupportables, les oiseaux – et en particulier les oiseaux migrateurs – suivent et marquent par leur présence ou leur absence les changements de saisons qui se manifestent dans une région donnée. Le rassemblement périodique de centaines voire plusieurs milliers d’oiseaux se préparant au voyage ou arrivés depuis peu à destination, aussi bien que les allers et venues de certains migrateurs peu sociables et plus discrets, à l’exemple du coucou gris (Cuculus canorus) dans nos contrées, constituent véritablement des événements biologiques, à la fois prévisibles dans le temps (la saison) et visibles dans l’espace (l’environnement).

On trouve dans l’Ancien Testament les premiers témoignages écrits sur ce phénomène, ainsi que chez certains auteurs de l’Antiquité grecque et romaine tels que Homère, Anacréon, Hésiode, Aristophane, Aristote, Pline (Curry-Lindahl, 1980). Aussi, en tant qu’indicateurs du cycle des saisons, les oiseaux migrateurs occupent une place non négligeable dans les savoirs populaires et ont ainsi alimenté nombre de mythes, de proverbes, de préceptes (e.g. Palermo et Pujol, 1987 ; Malet, 1987). Il est donc permis de penser qu’ils jouaient un rôle important dans les représentations culturelles des sociétés préhistoriques.

L’archéologie est cependant mal équipée pour mettre en évidence cet aspect symbolique de la saisonnalité chez les sociétés préhistoriques à partir de leur culture matérielle, bien que certaines tentatives aient été faites dans le domaine des représentations artistiques pour le Paléolithique supérieur du Sud-Ouest de la France (Eastham, 1988 ; Casey, 1995). Nous nous contentons ici d’en approcher seulement certains aspects économiques, en prenant pour principe général que la coïncidence de certaines activités de subsistance avec des événements naturels survenant invariablement à certaines périodes de l’année fournit des informations de nature temporelle sur l’organisation des ressources par une communauté humaine et sur son mode d’occupation du territoire.