Taphonomie d’un assemblage osseux

De nombreux auteurs se sont intéressés à l’étude de ces processus, la « taphonomie » (Efremov, 1940), et ont présenté des modèles théoriques pour en rendre compte (e.g. Meadow, 1980 ; Gifford, 1981 ; Klein et Cruz-Uribe, 1984 ; Davis, 1987). Les quatre stades de formation d’un assemblage définis ci-dessous dans l’ordre chronologique s’appliquent au contexte archéologique mais aussi, après légère modification des termes, au contexte paléontologique :

  1. L’assemblage potentiel (Potentiel bone population ou Death Assemblage) : l’ensemble des ossements des animaux tués (i.e. la thanatocénose). Ici se situe l’information recherchée sur la relation entre les hommes et la « communauté vivante » (Living Community, Klein et Cruz-Uribe, 1984), i.e. les populations animales, domestiques ou sauvages, disponibles à l’époque.
  2. L’assemblage déposé (Deposited Assemblage) : les ossements enfouis dans les sédiments (i.e. ce qui reste après l’intervention de(s) agent(s) d’accumulation et de modification des carcasses). Ce stade est directement porteur d’informations sur la façon dont les hommes (ou les consommateurs secondaires tels que les charognards) ont manipulé les animaux morts (pratiques alimentaires et technologiques, gestion des déchets, etc.). Des facteurs climatiques et notamment saisonniers sont susceptibles à ce moment-là d’influencer la probabilité d’enfouissement d’un os abandonné (lessivage des zones de rejet, couverture végétale, etc.)
  3. L’assemblage fossile (Preserved fraction ou Fossil Assemblage) : les ossements qui se sont conservés jusqu’au moment des fouilles archéologiques. Entre ce stade et le précédent, les phénomènes susceptibles d’avoir modifié l’assemblage peuvent être multiples et sont très difficiles à identifier (mécanismes post-dépositionnels, conservation différentielle). La majorité participent aux relations complexes entre les propriétés physico-chimiques de l’os et l’histoire des sédiments encaissants (facteurs édaphiques, perturbations stratigraphiques, etc.).
  4. L’échantillon ou assemblage osseux (Sample Assemblage) : les ossements recueillis par les fouilles et par l’archéozoologue (i.e. ce qui est soumis à l’étude).

Cette séquence, une fois posée, permet de comprendre les difficultés soulevées par la recherche d’une solution pour mesurer l’abondance relative des taxons. Plusieurs méthodes de quantification, arithmétiques ou statistiques, ont en effet été proposées mais les défauts et avantages de chacune font l’objet depuis environ trente ans d’un débat passionné entre certains spécialistes. Faute de contrôles expérimentaux sur le long terme, il ne semble toujours pas exister aujourd’hui de réel consensus pour déterminer laquelle est la plus adéquate. Confrontées au problème fondamental posé par la dissociation et la fragmentation des carcasses initiales, ces méthodes divergent principalement sur le choix de l’unité employée. Parmi les paramètres existants, le nombre de restes et le nombre minimal d'individus sont les plus utilisés.