Nombre minimal d’individus

Le nombre minimal d’individus, d’après la définition de F. Poplin (op. cit., p. 63), est le « nombre minimal de sujets individualisables avec sûreté dans l’échantillon », qu’il ne faut pas confondre avec le nombre réel d’individus ayant contribué à l’assemblage (NRI). Il y a différentes manières de le calculer et toutes consistent à éviter de compter plusieurs fois le même animal. Dans le même temps, l’objectif est toujours d’obtenir la valeur la plus élevée possible conformément à ce principe. Le NMI de fréquence se base sur l’élément anatomique le plus fréquent situé sur un même côté du squelette (droit ou gauche). Ce calcul est communément employé et peut être amélioré en appariant, lorsque c’est possible, des éléments ayant appartenu au même individu (NMI d’appariement). Pour les mammifères, il est en général tenté sur les mandibules ou les maxillaires à partir des caractères discrets produits par l’usure dentaire 70 . Il faut d’ailleurs noter que le NMI de fréquence est en quelque sorte un NMI d’appariement par excès puisqu’il est implicitement postulé qu’à tout élément droit présent dans l’assemblage doit correspondre un élément gauche (ou inversement). Enfin, la répartition des restes en catégories distinctes (classes d’âge, sexe, taille) permet également d’augmenter le NMI en cumulant les valeurs obtenues pour chacune (NMI de combinaison).

Par rapport au NR, ce paramètre est moins sévèrement affecté par la fragmentation, la récolte ou la détermination différentielles. Cependant, l’inconvénient majeur du NMI est la tendance à surestimer la fréquence relative d’un taxon représenté par peu de restes (e.g. Ducos, 1968 ; Poplin, 1976 ; Watson, 1979) : par définition, un individu peut fournir un seul os ou bien autant d’os qu’en contient son squelette. Une espèce identifiée par vingt éléments appartenant chacun à des zones anatomiques distinctes, par exemple, aura le même « poids » en terme de NMI qu’une espèce identifiée par un reste unique, bien qu’il soit impossible de démontrer que ces vingt éléments proviennent réellement du même individu. S’appuyant sur des estimations de la taille des échantillons osseux par rapport à la thanatocénose originelle pour une grande variété de sites, A. Gautier (1984) soutient que le degré d’interdépendance, i.e. la probabilité pour qu’un animal soit représenté par plusieurs os et donc compté plusieurs fois, est beaucoup plus faible que celui envisagé habituellement par les analystes.

Un autre inconvénient du NMI est que sa valeur varie parfois fortement suivant les procédures de calcul (NMI de fréquence, d’appariement, de combinaison) pour un même assemblage. Il est certes nécessaire de bien préciser la méthode adoptée dans chaque cas, mais cela peut être un obstacle pour la comparaison des résultats fournis par des auteurs différents. Enfin, comme D. K. Grayson (1979) l’a souligné, le NMI ne fonctionne pas sur un mode additif, contrairement au NR, ce qui implique une variation selon l’unité de fouilles choisie pour l’analyse. Il doit être en effet recalculé chaque fois que l’assemblage est augmenté d’un nouvel échantillon. S’il s’avère impossible que les éléments d’un même individu soient répartis dans deux unités stratigraphiques distinctes, alors c’est un non-sens de calculer le NMI à partir d’un horizon qui regroupe ces deux niveaux (Ringrose, 1993). Inversement, distinguer deux unités qui contiennent chacune en réalité une partie des restes du même individu fait prendre le risque de le compter doublement (Fieller et Turner, 1982). Ces décisions sont prises en fonction de l’interprétation de la séquence stratigraphique mais il n’est pas toujours possible d’en assurer la pertinence à ce niveau, surtout dans les gisements de grande superficie tels que la plupart des sites néolithiques et ultérieurs. Pour toutes ces raisons, certains auteurs ont ainsi préféré ne pas utiliser ce paramètre et ne s’en tenir qu’au NR (e.g. Ducos, 1973 ; Gautier, 1984).

Notes
70.

Sur les os longs, seuls des anomalies individuelles ou des pathologies peuvent permettre d’associer deux éléments de côté différent, une situation qui se rencontre rarement.