4.1.4 Représentations symboliques

Rappelons que la fouille de Mureybet est à l’origine des questionnements qui ont conduit J. Cauvin à élaborer sa théorie de la « Révolution des symboles » pour rendre compte des changements survenus dans les mentalités préhistoriques à la veille de l’adoption du système de production agricole (Cauvin, 1997). Il fait débuter ces changements au sein de la culture khiamienne au moment de l’apparition concomitante des premières figurines féminines et, seulement pour le Levant nord, des dépôts intentionnels de cornes d’aurochs (Bos primigenius).

La phase II de Mureybet a ainsi livré une figurine anthropomorphe en calcaire représentant un torse et le haut des cuisses, et une autre plus petite en argile crue (ibid.). Les « pierres à rainures », ces petits objets interprétés en général comme des redresseurs de hampes de flèches et déjà connus dans le Natoufien, sont à partir de cette période décorées de lignes et de chevrons. Notons que dans la phase IA, des parures en pierre, en coquillage ou en os d’oiseaux, sont les seuls éléments en rapport plus ou moins direct avec un mode d’expression artistique et symbolique.

Huit autres figurines en calcaire ou terre cuite ont été recueillies 114 dans des habitations de la phase III. Sur cinq d’entre elles, les attributs féminins sont clairement représentés. Deux autres sont anthropomorphes mais beaucoup plus schématiques. Sur la dernière, deux yeux globuleux et un nez longiligne évoquent clairement, selon nous (infra), un profil humain bien que la silhouette d’un rapace nocturne ait été proposée comme autre interprétation (Pichon, 1985b). Près d’une dizaine de phalanges 1 d’équidés dont toute la surface du corps central a été volontairement raclée est présente dans les niveaux PPNA (un seul spécimen dans le Khiamien). Par analogie avec celle que nous avions trouvée pour la première fois dans le matériel faunique de Dja’de el Mughara et sur laquelle ont été clairement gravés des attributs sexuels, ces objets ont été interprétés comme des figurines, vraisemblablement féminine, au même titre que celles en pierre ou en terre. L’intérêt symbolique pour cette partie squelettique aux formes naturellement évocatrices est redoublée par la découverte d’une autre phalange intacte mais entièrement couverte d’ocre. Enfin, les « pierres à rainure » et les bâtons polis sont plus abondants à cette période que dans la précédente.

La phase IVB n’a livré qu’une petite pendeloque en pierre polie figurant une tête masculine.

Notes
114.

Curieusement, dans le même temps, à Jerf el Ahmar, les figurines anthropomorphes sont peu fréquentes alors que s’y développe un symbolisme animalier associé à des signes abstraits sur des supports très variés (galets, plaquettes en pierre, dalles, stèles, terre à bâtir, etc.).