Chapitre 5 – Jerf el Ahmar

5.1 Présentation générale

Découvert en 1987 au cours de prospections, le site de Jerf el Ahmar fit l’objet d’une première fouille en 1989 dirigée par T. L. McClellan et M. Mottram de l’Oriental Institute of the University of Chicago (McClellan et Mottram, 1994), dans le cadre de la campagne internationale de sauvetage lancée par les autorités syriennes en prévision de la construction d’un nouveau barrage sur le moyen Euphrate. Ce dernier projet a été mené à son terme en 1999 et le site a depuis été englouti par le lac de Tichrine. A partir de 1995 et jusqu’à cette date, une équipe franco-syrienne conduite par D. Stordeur et B. Jammous réalisa six campagnes de fouilles qui révélèrent une importante série d’occupations datant de la seconde moitié du 10e millénaire et du début du 9e (Jammous et Stordeur, 1999 ; Stordeur, 2000a). L’essentiel de la séquence stratigraphique s’inscrit dans l’horizon PPNA et présente de nombreuses affinités culturelles avec les phases IIIA et IIIB de Mureybet, voire avec les phases khiamiennes. Les découvertes faites dans les niveaux les plus récents ont en outre permis pour la première fois de mettre au jour l’existence d’une phase de transition PPNA-PPNB émanant de traditions proprement locales (Stordeur et Abbès, 2002).

Le tell se trouvait à 60 kilomètres de la frontière turque, à 2 kilomètres en amont du barrage de Tichrine, sur la rive gauche de l’Euphrate (36° 23’ 30’’N, 38° 12’ 30’’ E). Il se présentait sous la forme de deux buttes naturelles de faible élévation, insérées dans un ensemble de collines crayeuses bordant le sud de la plaine alluviale et à proximité d’une zone d’étranglement de la vallée qui sert de point d’ancrage à l’actuelle construction hydroélectrique. Le Djebel Cheikh Anan qui surplombe le site à 500 mètres environ d’altitude ferme l’accès direct à la steppe environnante depuis la vallée mais celle-ci se déploie très largement à quelques kilomètres en amont et en aval.

Le matériel archéologique recueilli par l’équipe franco-syrienne est très riche et la majeure partie est en cours d’étude 130 . Les informations dont nous disposons sur le mobilier et l’exploitation des ressources naturelles sont de ce fait encore partielles ou provisoires. En revanche, les données architecturales et stratigraphiques permettent dores et déjà de comprendre dans une large mesure l’organisation villageoise pour plusieurs niveaux occupation.

Notes
130.

En 1989, seuls quelques secteurs superficiels ont été explorés par T. L. McClellan et M. Mottram. Les données initiales ont été depuis largement mises en lumière par les résultats obtenus par les fouilles de D. Stordeur et B. Jammous, auxquelles nous avons nous-mêmes participé de 1995 à 1998. C’est pourquoi tout ce chapitre se rapporte essentiellement à ces dernières.