6.2.1.1 Fréquences relatives des taxons

La liste des mammifères identifiés jusqu’à présent atteint une vingtaine d’espèces (D. Helmer, communication personnelle). Les carnivores comprennent le chat sauvage (Felis catus cf. sylvestris), le chat des marais (F. chaus), le chien (Canis familiaris), le chacal (C. aureus), le renard commun (Vulpes vulpes), le blaireau (Meles meles) et le putois marbré (Vormela peresguna). Parmi les équidés, nos études préliminaires suggèrent au moins deux espèces (Equus hemionus et E. africanus). Il est démontré que la réduction de la taille des bovins (Bos) de Dja’de el Mughara par rapport à ceux du PPNA (Jerf el Ahmar, Mureybet) marque le début du processus de domestication de cet animal dont le statut domestique est clairement attestée au PPNB moyen dans les premiers niveaux d’occupation du site voisin de Halula (Saña Seguí, 1999 ; Peters et al., sous presse). Des spécimens de grande taille indiquent tout de même la coexistence de l’aurochs (Bos primigenius) et des bovins domestiques. Les gazelles appartiennent à l’espèce Gazella subgutturosa et semblent en moyenne de taille légèrement inférieure à celle des populations de Jerf el Ahmar (Helmer, 2000a). Le daim de Mésopotamie (Dama mesopotamica), le sanglier (Sus scrofa) et le mouflon oriental (Ovis orientalis) étaient chassés occasionnellement. Outre certains carnivores déjà mentionnés, les mammifères de petite taille sont représentés par le lièvre (Lepus cf. capensis), le hérisson oriental (Erinaceus concolor), le castor (Castor fiber) et plusieurs micromammifères dont l’étude fut confiée à A. Haidar (thèse en préparation).

Les données quantifiables recueillies par D. Helmer avec notre collaboration sont présentées dans le tableau 6.1 et concernent la séquence partielle du sondage C (couches F à A3, en partant de la base). Les fréquences relatives sont, de manière générale, proches de celles observées à Mureybet III et à Jerf el Ahmar. Il existe des variations entre les niveaux mais il est encore trop tôt pour parler de tendances évolutives, compte tenu de la nature localisée de cet inventaire. Ainsi, certains secteurs du site paraissent plus diversifiés que d’autres en fonction des contextes archéologiques (zones détritiques, espaces extérieurs, aires d’habitat, etc.). Dans les assemblages étudiés, on constate la prédominance des gazelles et des équidés qui constituent respectivement 34 à 70 % et 20 à 47 % de la faune. Les bovins occupent une place secondaire mais relativement importante avec plus de 13 % des restes en moyenne, comme dans le PPNA de Mureybet et de Jerf el Ahmar, mais on note que leurs restes peuvent atteindre jusqu’à 23,5 % dans le « niveau » G des secteurs C-D. Cette fréquence est en revanche toujours inférieure à celle obtenue dans les niveaux contemporains de Mureybet (phase IVA), qui, nous l’avons vu, est imputable à la faiblesse des effectifs déterminés et non forcément à une augmentation soudaine de l’exploitation de cet animal comme l’avait tout d’abord suggéré P. Ducos (1978). Les autres ongulés ne forment qu’une part mineure de la faune chassée puisque leurs fréquences cumulées ne dépassent pas 5 %, et la petite faune mammalienne semble représenter moins de 2 % des restes.

A l’instar des sites PPNA de la moyenne vallée de l’Euphrate, Dja’de el Mughara se caractérise donc par une chasse à la fois spécialisée sur les grands mammifères et diversifiée du point de vue du cortège taxinomique. Il se singularise surtout par le fait que la domestication des bovins est très probablement effective dans ces occupations.