6.2.3.4 Synthèse

La mandibule d’un bovin, les dents d’équidés, les stades de soudure des ossements d’une gazelle et le reste d’une oie donnent des résultats parfaitement cohérents (Fig. 6.26). Nous avons vu par contre qu’une D2 d’équidé introduisait une estimation décalée. L’origine stratigraphique de ce spécimen est peut-être problématique puisque c’est la seule lactéale, avec la D3 isolée, dont les coordonnées spatiales n’ont pas été enregistrées. Quoiqu’il en soit, le nombre d’indicateurs est suffisant pour suggérer que l’abattage de tous ces animaux ait pris place en automne ou en hiver (octobre à janvier). Dans cet exercice, nous avons été amenés à employer d’autres méthodes que celles que nous avons développées pour notre recherche. Nous avons notamment constaté que le degré de soudure des épiphyses est un critère qui ne permet généralement pas d’obtenir des estimations précises, sauf lorsque le processus est en cours comme ce fut le cas pour certains des restes de la gazelle.

Au regard de l’effectif minimum, de la taille des animaux consommés et de la nature saisonnière du contexte, cet assemblage peut être interprété comme les produits d’une activité collective et épisodique. Même si la totalité du secteur n’a pas été encore fouillée, nous pouvons évaluer à plus de 2 tonnes le poids de viande récupérée sur les carcasses, en utilisant les équivalences proposées par E. Vila (1998) pour les équidés et par D. Helmer (2000b) pour les bovins.

Cette découverte n’est pas unique à Dja’de el Mughara car les assemblages qui ont été peu après mis au jour dans les couches sous-jacentes du même secteur possèdent les mêmes caractéristiques générales : épandage d’ossements sur une aire extérieure et colmatage rapide et intentionnel au moyen de cendres ou de terre. Nous n’avons pas encore analysé le matériel recueilli dans ces niveaux mais il est clair que les mêmes pratiques se sont répétées durant toute la période d’occupation du bâtiment qui leur est associé. Pourrait-il s’agir d’occupations temporaires, entrecoupées d’épisodes d’abandon du site par la communauté ? Les autres niveaux correspondent-ils à la même période saisonnière ? Les animaux provenaient-ils tous d’une chasse collective ou les bovins étaient-ils domestiques ? Ce contexte est-il lié à des « festins » ou au système de subsistance ordinaire ? De nombreuses questions sur ces amas restent pour le moment sans réponse. Aussi font-elles partie des objectifs que nous nous sommes fixés pour les prochaines missions d’étude à Dja’de el Mughara.