Synthèse

Les unités stratigraphiques fournissant des estimations basées à la fois sur des dents de gazelles et sur les dents de caprinés permettent de vérifier la cohérence des indicateurs recueillis. D’après les résultats de l’étude, elles s’avèrent plus souvent interprétables dans le sens d’une occupation de courte durée lorsque les petits ruminants domestiques sont supposés être nés au début de l’hiver plutôt qu’au printemps. C’est particulièrement évident pour la couche C2a du secteur DR101, les couches D1, D2 et E1 de DW86, la couche E2 de DW91 et la couche B6a de EB91. Des situations où l’hypothèse d’une mise bas printanière produirait des corrélations plus satisfaisantes que l’autre hypothèse n’ont pas été rencontrées dans les unités que nous avons passé en revue.

En principe, l’interprétation se complique dès lors que le nombre d’indicateurs saisonniers est élevé. Nous pouvons cependant remarquer que dans les trois couches où l’effectif est supérieur à quatre (A3 de DR86, D1 de DW86, et E2 de DW91) il a été possible chaque fois de reconnaître une période commune d’activité de subsistance. Ainsi, les abattages paraissent synchrones dans la couche A3 de DR86 qui comporte 8 dents informatives de caprinés, soit un nombre minimum de 5 individus.

Compte tenu des incertitudes concernant l’identification précise des niveaux d’occupation, le caractère saisonnier de certaines couches examinées ne peut être tenu d’emblée comme acquis. Il peut s’agir en effet de simples épisodes d’activités de subsistance insérées dans une période d’occupation plus étendue. Cependant, il nous paraît désormais hautement probable que les caprinés de Qdeir naissaient habituellement au début de l’hiver. En outre, fondée sur cette assertion, la coïncidence répétée des rythmes observés dans la chasse aux gazelles et dans l’abattage du petit cheptel n’est certainement pas fortuite et est vraisemblablement liée aux modes d’occupation temporaire du site. En conséquence, il nous semble que Qdeir était fréquenté surtout en automne et au printemps. Des occupations hivernales sont certes attestées mais, du point de vue des activités d’acquisition alimentaire, elles paraissent d’une intensité moindre par rapport aux périodes précédemment mentionnées. Par contre, d’après l’absence ou l’extrême rareté des indicateurs pour les mois les plus chauds de l’année (juin à août), l’été doit être considéré comme une saison morte. Il pourrait s’agir d’une période de repos, comme sur les sites précéramiques du Moyen Euphrate, caractérisée par une mise en suspens de la chasse et de l’abattage des caprinés. Mais cette période pourrait aussi traduire un abandon temporaire du site par les pasteurs. Cette dernière hypothèse accréditerait la nature nomade ou semi-nomade de ces populations telle qu’elle a été envisagée dès les premiers temps de la fouille (Aurenche et Cauvin, 1982) et retenue par la suite (Stordeur, 1993 ; Abbès, 2000).