F - Ouverture de l’école sur le monde extérieur

L’école est le lieu favorable où les enfants peuvent comprendre leur environnement historique et archéologique, local en particulier, grâce à des projets éducatifs : les monuments anciens de la commune, les transformations de l’espace dans le temps, les lieux de présentation du mobilier préhistorique et historique (les musées essentiellement, des collections particulières parfois). Ils apprennent à maîtriser des outils intellectuels qui leur serviront à résoudre des problèmes similaires mais rencontrés dans des situations différentes au cours de leur vie personnelle et professionnelle. Ils travaillent des savoirs, des savoir-faire qui permettent l’acquisition des connaissances.

L’enseignant a pour objectif didactique l’autonomie 531 . Il doit être considéré comme un professionnel de l’apprentissage 532 . Il enseigne, mais sa mission va plus loin. Il s’agit d’éduquer l’élève, ici, grâce à des projets culturels, pour le rendre acteur et citoyen d’une société difficile, qu’il a besoin de comprendre. La plupart des projets archéologiques exploités dans notre recherche sont conçus dans cette démarche : enrichir les savoirs, apprendre des savoir-faire, pratiquer des savoir-être, indispensables au collège ou dans des animations extérieures.

Les enseignants doivent se considérer davantage comme un personnel d’une entreprise, qui a en charge une mission et doit la mener à bien jusqu’au bout. Ils ont plus ou moins une obligation de résultat : ils doivent mettre en oeuvre tout ce qu’ils peuvent faire dans leur discipline et à côté, pour la réussite de l’élève. Leur mission, c’est l’éducation des enfants, que nous ne pouvons pas laisser en échec sans avoir essayé d’employer ou de demander tous les moyens nécessaires : nous pensons à l’ensemble des spécialistes qui soignent, réconfortent ceux qui vivent parfois des problèmes personnels graves et qui peuvent perturber l’acte d’enseignement et d’apprentissage. Ce sont notamment les chronobiologistes, les pédopsychologues, les assistantes sociales, les infirmières, les médecins, les travailleurs sociaux , etc. Il est nécessaire que tout le monde travaille en équipe, et s’entraide. L’apprenant a besoin d’être bien, en sécurité intellectuelle, pour que par exemple les projets archéologiques puissent contribuer pleinement à l’épanouir. Notre travail est difficile.

Les enseignants doivent valoriser les projets des élèves auprès des différents publics de l’établissement et à l’extérieur, par des articles de presses, des invitations à des journées portes ouvertes, des spectacles scolaires ou des animations réalisées sous leur direction. Ils doivent rechercher aussi leur confiance par ces actions 533 . Nous pensons que ces deux démarches font partie de l’évolution du métier. L’équipe éducative de l’atelier «  Archéologie, Patrimoine, Ecriture » de Suze-la-Rousse a recherché tout au long de l’histoire de ce projet la confiance des membres du collège, celle des parents et des représentants des cinq collectivités territoriales locales représentées au collège.

Nous pouvons illustrer ce propos par des compte-rendus d’animations archéologiques du collège de Suze-la-Rousse, rédigés par les classes de sixième et de cinquième, et publiés dans la presse locale. Les élèves de cinquième ont préparé en cours d’histoire et, avec la documentaliste, des dossiers de visite historique et archéologique de l’ancien village de Suze-la-Rousse, retravaillés à l’oral avec le professeur de français, afin que certains volontaires fassent une visite guidée à l’occasion des journées nationales du Patrimoine de septembre.

Le premier forum de l’archéologie en milieu scolaire a réuni cent-cinquante élèves de différents collèges des Bouches-du-Rhône, qui ont présenté leurs travaux archéologiques le 22 mai 2001 en Arles, au musée d’Arles antique 534 . La matinée a été consacrée à l’exposition de leurs travaux au public : des pages internet, des reconstitutions sous forme de maquettes, des études sur les amphores, une exposition sur les résultats d’une fouille expérimentale. Ils ont rencontré pendant l’après-midi des archéologues professionnels. Ce forum a été renouvelé en 2002 et en mai 2003 dans le même lieu.

Il faut proposer des actions concrètes. Chaque année, la classe de sixième prépare le scénario et le costume d’une saynète sur le néolithique, la Grèce antique, l’Egypte, qu’elle joue en public à la journée Portes ouvertes de l’établissement.

Développons les animations périscolaires en archéologie, localement. Si des écoles ont mis en place un fonctionnement périscolaire, les archéologues ont des opportunités à saisir, en collaboration avec l’Education Nationale et le ministère de la Culture. Nous connaissons l’expérience de 1998 d’une école primaire de Crest (Drôme), qui proposait un travail basé sur les prospections archéologiques de surface, en relation avec l’histoire et les transformations de l’espace. Les objectifs pédagogiques et sociaux ont été atteints. Le projet avait pour but de renforcer la citoyenneté 535 . Les séances de prospections se sont déroulées l’après-midi.

Pour notre part, nous n’avons pas mené de projet dans ce cadre périscolaire. Mais nous connaissons les impressions et les changements de ceux qui ont participé à nos expériences extra-scolaires de chantiers d’initiation à la fouille archéologique durant trois années 536 , et s’adressant, en particulier aux niveaux de sixième et de cinquième. Ils ont toujours manifesté une grande curiosité, ils sont ouverts aux différentes connaissances. Ils affichent une soif de savoirs culturels, souvent avec un enthousiasme étonnant. Une faible proportion désire être archéologue, mais ils sont contents de ce qu’ils ont fait, si les animations se sont déroulées dans de bonnes conditions. Ils aiment l’histoire et veulent enrichir leur culture générale. Il faut répondre à cette attente de connaissances et donner l’opportunité de pratiquer une activité archéologique, qui soit formatrice. C’est une démarche démocratique et citoyenne : il faut donner l’accès aux connaissances à un plus grand nombre.

Nous pensons que les différents acteurs culturels ont pris nettement conscience de l’engouement des jeunes pour l’archéologie. L’Education Nationale, le ministère de la Culture, l’Institut national de recherches archéologiques préventives, les collectivités territoriales devraient travailler davantage en réseau, renforcer la médiation culturelle, s’entendre plus efficacement pour proposer plus d’animations scolaires et périscolaires à des coûts raisonnables et éviter une discrimination culturelle basée sur les ressources financières des établissements. Les problèmes que nous avons définis ne sont pas insurmontables.

L’offre culturelle à destination des professeurs devient très intéressante en matière d’archéologie. L’Education Nationale a amorcé un processus de changement qu’il s’agit d’amplifier ; elle a lancé des réformes. Des enseignants réussissent à proposer des animations archéologiques de grande qualité pédagogique à leurs élèves. Des types de projets tels que les ateliers artistiques, les itinéraires de découvertes existent. Il faut au préalable que l’Education Nationale encourage leur développement, propose des solutions pour résoudre les problèmes rencontrés et, avec les autres partenaires, s’entende sur les grands choix de politique éducative.

Notes
531.

MEIRIEU 1991 b, 125 et 136.

532.

DEVELAY 1996, 38.

533.

PERRENOUD 1999, 116.

534.

ARKEOjunior, n°77, 7-8/2001, p. 5.

535.

PLANEL 2000, 148-149.

536.

Nous avons été le responsable de quatre chantiers pendant des vacances scolaires en 1997, 1998 et 1999.