B Les thèmes empruntés aux poètes persans

a) Le jardin

Le thème du « jardin » prend une place importante dans Les Nourritures terrestres. Les pages 54 à 58 sont consacrées entièrement à ce thème : de Florence à Séville, Munich, Naples, Montpellier, Malte, Biskra et Blidah, Gide décrit différentes formes de jardin ainsi que ses souvenirs de son passage dans ces lieux.

Chez Sa’di, malgré les titres de ses livres, Le Golestân ou Le Jardin des Roses et Le Boustan ou Verger, nous ne trouvons pas de passages consacrés entièrement au thème du « jardin » ; chaque chapitre de ses livres traite d’un sujet différent mais il semblerait que Gide ait emprunté ce thème aux titres d’œuvres de Sa’di, d’autant plus qu’il cite des textes persans avec les jardins de « Nashpur » et de « Shiraz » : « Je rêve aux jardins de Mossoul ; on m’a dit qu’ils sont pleins de roses. Ceux de Nashpur, Omar les a chantés, et Hafiz les jardins de Shiraz ; nous ne verrons jamais les jardins de Nashpur 433 . » Il cite également l’Alcazar : « Que te dirais-je de l’Alcazar ? jardin semblant de merveille persane ; je crois, en t’en parlant, que je le préfère à tous les autres 434 . »

Pourtant parmi les œuvres persanes connues de Gide c’est surtout dans Le Divân de Hâfez que le thème du « jardin » est récurent :

‘« C’est le renouveau du jardin,
l’éclat du temps de la jeunesse.
le rossignol mélodieux
reçoit l’annonce de la rose 435 . » ’

On lit à propos de l’Alcazar à la page 54 des Nourritures terrestres :

‘« J’y pense, en relisant Hafiz :
Apportez-moi du vin
Que je tache ma robe,
Car je chancelle d’amour
Et l’on m’appelle sage. »’

Ce qui laisse à penser que Gide se serait peut-être inspiré du recueil de Hâfez quand il traite le thème du « jardin ».

Notes
433.

Les Nourritures terrestres, p. 57.

434.

Ibid., p. 54.

435.

L'Amour, l'amant, l'aimé, éd. cit., p. 29.