V.Résumé des dialogues des étudiants

Afin d’analyser globalement les activités des quatre binômes nous avons procédé par découpage de plusieurs niveaux en situations, phases et étapes comme présentés précédemment.

A priori et avant les séances, nous avons défini les cinq phases de la situation B de la manière suivante :

la première phase se rapporte à la reconnaissance du matériel, la lecture des données et la réalisation des expériences demandées

les quatre autres phases concernent les réponses aux quatre questions posées.

D’après l’analyse des transcriptions, les quatre tableaux ci-dessous résument les grandes phases de l’activité des quatre binômes. L’intégralité des phases d’activités pour les quatre binômes enregistrés est donnée en annexes (Annexes C).

Tableau 37 : Les phases et les étapes de la situation B pour le binôme J&C

Phase
N° d’interventions du début et de la fin de chaque phase
Etapes de chaque phase de l’activité
1 1 - 34 Reconnaissance du matériel
Lecture des données
Réalisation des expérimentations demandées dans le mode opératoire
2 35 - 60 Réponse à la question1 :
Identification des couples mis en jeu et écriture des demi-équations et de l’équation globale
Vérification de la correspondance entre l’équation chimique et les observations expérimentales
3 61 - 79 Réponse à la question 2 :
Comparaison des potentiels de référence des couples mis en jeu
Remarque sur les conditions expérimentales non standard
4 80 - 122 Réponses à la question 3 :
Rappel des étapes expérimentales
Interrogation sur la présence des ions Fe3+
Identification du premier précipité à partir de sa couleur
5 123 - 382 Réponses à la question 4 :
Reprise des observations expérimentales
Identification du deuxième précipité à partir de sa couleur
Explication de la formation du deuxième précipité à l’aide du diagramme potentiel-pH et aussi à partir de la stabilité du précipité formé
Explication de la formation du deuxième précipité par l’écriture de l’équation impliquant les couplesI2/ I- et Fe3+/ Fe2+
Raisonnement sur le fait que l’agitation provoque seulement un changement de potentiel
Application du modèle de Nernst sans pouvoir rendre compte de la réaction
Raisonnement sur le fait que l’agitation a mis en jeu I2 qui ne peut pas réagir avec les ions Fe2+ selon le modèle des potentiels de référence.
Tentative pour trouver un nouveau couple afin de satisfaire au modèle des potentiels de référence
Raisonnement sans appui théorique que le pH varie alors que le potentiel reste constant
Argumentation de la formation du deuxième précipité par la non stabilité du premier précipité formé
Traçage du diagramme potentiel-pH
Confusion entre potentiel et potentiel de référence
Conclusion sur le fait que l’équation bilan n’est pas l’équation de la réaction, car elle n’obéit pas à la règle du gamma
Reprise des différentes étapes de l’expérimentation et bilan des entités chimiques présentes dans le système
Conclusion que la réaction est :
2 Fe(OH)2+ I2+ 2 OH-2 Fe(OH)3+ 2 I-
sans avancer de justification théoriques
Conclusion sur l’inutilité du diagramme potentiel-pH
Tableau 38 : Les phases et les étapes de la situation B pour le binôme S&A

Phase
N° d’interventions du début et de la fin de chaque phase
Etapes de chaque phase de l’activité
1 1 - 66 Reconnaissance du matériel
Lecture des données
Réalisation des expérimentations demandées dans le mode opératoire
2 67 - 85 Réponse à la question 1 :
Identification de I2 à partir des observations expérimentales
3 86 - 160 Réponse à la question 2 :
Identification des potentiels des couples comme étant des potentiels de référence
Rappel des étapes de l’expérimentation pour définir les couples
Ecriture des demi-équations et de l’équation
Comparaison erronée des pouvoirs réducteurs en les assimilant à des pouvoirs oxydants
Reprise de la comparaison selon le modèle des potentiels de référence
4 161 - 180 Réponse à la question 3 :
Identification du premier précipité d’après les entités présentes en solution et d’après la coloration verte
5 181 - 277 Réponses à la question 4 :
Définition des couples existants
Identification du second précipité à partir de sa couleur
Etude de l’influence de la variation de pH à partir du diagramme potentiel-pH
Argumentation sur la relation entre la formation du second précipité et l’instabilité du premier précipité en milieu basique
Reconsidération des différentes étapes de l’expérimentation et des entités existantes en solution
Constatation de l’absence d’ions Fe3+ en solution
Conclusion sur l’origine de la formation du second précipité en relation avec l’augmentation du pH et la confirmation par la coloration rouille
Tableau 39 : Les phases et les étapes de la situation B pour le binôme Y&B

Phase
N° d’interventions du début et de la fin de chaque phase
Etapes de chaque phase de l’activité
1 1 - 14 Reconnaissance du matériel
Lecture des données
Réalisation des expérimentations demandées dans le mode opératoire
2 15 - 18 Réponse à la question1 :
Identification des ions I2 à partir des observations expérimentales
3 19 - 47 Réponse à la question2 :
Bilan des couples mis en jeu
Comparaison des potentiels des couples à partir du sens de l’évolution de la réaction
4 48 - 51 Réponse à la question 3 :
Identification du premier précipité d’après les entités présentes en solution
5 51 - 93 Réponse à la question 4 :
Identification du second précipité à partir de sa couleur
Reprise des observations expérimentales et vérification des entités présentes en solution
Recherche d’explication de la provenance des ions Fe3+
Hypothèse que I2 à réagit avec Fe(OH)2
Evocation du couple H30+/ H2 et constatation de sa réaction avec Fe(OH)2
Tableau 40 : Les phases et les étapes de la situation B pour le binôme K&F

Phase
N° d’interventions du début et de la fin de chaque phase
Etapes de chaque phase de l’activité
1 1 - 29 Reconnaissance du matériel
Lecture des données
Réalisation des expérimentations demandées dans le mode opératoire
2 30 - 41 Réponse à la question1 :
Ecriture de l’équation bilan de la réaction d’après les couples existants en solution
Identification des ions I2 à partir des observations expérimentales et confirmation par l’équation de la réaction
3 42 - 53 Réponse à la question 2 :
Comparaison des potentiels de référence
Mise en relation de la constante de la réaction et des potentiels de référence
4 54 - 71 Réponse à la question 3 :
Réflexion sur la précipitation et sur l’importance des concentrations des entités
Identification du premier précipité à partir de sa couleur et à partir de sa concentration
Niveaux de connaissance mis en jeu par J&CCe tableau permet une analyse globale des réponses des étudiants. Pour la première phase, tous les binômes sont tour à tour passés par la reconnaissance du matériel, la lecture des données et la réalisation de l’expérience demandée ; ceci confirme (comme pour les situations A1 et A2) les étapes construites pour prévoir l’activité de l’apprenant. 5
Pour répondre à la première question, deux des quatre binômes (S&A et Y&B) ont procédé directement à une identification de I2 formé à partir des observations expérimentales alors que les deux autres (J&C et K&F) ont identifié I2 en premier, grâce à l’écriture de l’équation de la réaction ; ce qu’ils ont confirmé par la suite à l’aide d’observations expérimentales. Ces deux stratégies : identification directe d’un composé à partir des observations expérimentales, ou identification d’un composé à partir de l’équation de la réaction puis confirmation par les observations expérimentales ont été observées dans les situations A1 et A2.
Pour répondre à la deuxième question concernant la comparaison des potentiels des couples mis en jeu, trois des quatre binômes (J&C, S&A, K&F) ont procédé par comparaison des potentiels de référence des couples mis en jeu. Seul le binôme Y&B a comparé les potentiels de Nernst des couples mis en jeu à partir du sens de l’évolution de la réaction.
L’identification du premier précipité (troisième question) s’est faite principalement à partir de la couleur du précipité (J&C, S&A, K&F). S&A partent de la liste des entités présentes pour définir le précipité et confirment sa présence par sa couleur caractéristique. K&F insistent sur le rôle de la concentration des ions Fe2+ dans la formation du précipité. Le binôme Y&B définit le précipité directement à partir de la liste des entités présentes.
La quatrième question a entraîné une grande discussion (J&C :296 interventions sur 382 que compte la transcription de cette situation ; S&A : 96 interventions sur 277 ; Y&B : 42 interventions sur 93 ; K&F : 36 interventions sur 108) et a posé de grandes difficultés aux étudiants. D’après les différentes étapes, nous constatons que, pour les quatre binômes, la première difficulté réside dans la constatation de l’intérêt de l’agitation (introduction de I2) et par conséquent dans la définition des couples mis en jeu. La seconde difficulté réside dans la détermination de l’équation de la réaction qui n’obéit pas au modèle des potentiels de référence et que les apprenants n’ont pu ni expliquer ni justifier à l’aide du diagramme potentiel-pH.
Dans le but de savoir si l’apprenant conçoit la variation des potentiels des couples en fonction du pH, nous nous proposons de voir quels sont les niveaux théoriques et les processus cognitifs mis en jeu lorsque l’apprenant interprète une réaction d’oxydoréduction pour laquelle le pH varie. VI.Analyse des activités cognitives des étudiants relatives à l’évolution du système oxydoréducteur pour lequel le pH varieL’objectif de cette partie est d’analyser l’activité cognitive de l’apprenant face à une réaction d’oxydoréduction pour laquelle le pH varie.
La variation de pH entraîne la variation des potentiels de Nernst des couples mis en jeu, ce qui remet en question une éventuelle utilisation du modèle des potentiels de référence.
L’analyse sera faite à partir de la quatrième question :
4) Après avoir agiter ensuite le tube à essai la couleur vire du vert à la couleur rouille, interpréter cette observation en vous basant sur le diagramme potentiel pH du fer.
Pour analyser les interventions les plus illustratives des démarches des apprenants, nous nous appuyons sur notre deuxième hypothèse de modélisation et nous nous limitons aux passages impliquant différents niveaux de modélisation. Leur analyse repose sur les liens que font les apprenants entre ces niveaux lorsqu’ils interprètent l’évolution du système oxydoréducteur.
Pour chacun des quatre binômes, l’activité d’interprétation de l’évolution du système oxydoréducteur s’est présentée de la façon suivante :
Binôme J&C
L’interprétation, pour le binôme (J&C), a résulté du cheminement suivant :
Explication de la formation du deuxième précipité à l’aide du diagramme potentiel-pH et aussi à partir de la stabilité du précipité formé
129 J : « on doit tout d’abord interpréter la réaction (é) en se basant sur le diagramme potentiel-pH du fer dans le diagramme potentiel pH du fer (Mgr) on voit que le FeOH2 précipite dans un domaine bien précis (é, Mgr) et que le FeOH3 précipite dans un autre domaine bien précis (é, Mgr) »
138 C : « …pour la zone de pH dans laquelle on est quel est le précipité le plus stable (Mgr, o, p) et est ce que c’est FeOH2 ou bien FeOH3 qui est plus stable (o, p)… »
En s’appuyant sur le diagramme potentiel-pH, J articule directement l’événement précipitation avec le modèle graphique à travers le lien (é, Mgr, é, Mgr, é, Mgr). C discute la stabilité de Fe(OH)2 et Fe(OH)3 en milieu basique mais il n’implique pas le second couple I2/ I- mis en jeu dans la réaction; il fait alors le lien (Mgr, o, p, o, p)
D’après l’analyse a priori pour pouvoir rendre compte de la réaction de précipitation, l’apprenant doit tout d’abord identifier les entités et les couples présents; par la suite il doit se référer au diagramme potentiel-pH; il s’agit du lien : (o, Mgr). L’étudiant doit se baser sur le diagramme potentiel pH, pour constater qu’en milieu basique l’iode peut oxyder le fer (II) ; il s’agit du lien (p, é).
Niveaux de connaissance selon le savoir savant
72 - 108Réponse à la question 4 :
Identification du second précipité à partir de sa couleur
Recours au diagramme potentiel-pH et assimilation des potentiels aux potentiels de référence
Rappel des étapes de l’expérimentation et des entités existantes
Raisonnement sur l’inversion de la première réaction ( 2 Fe3++ 2 I-2 Fe2++ I2 ) par la loi de modération
Argumentation de l’inversion de la réaction par la faible différence entre les potentiels de référence des couples mis en jeu et aussi par la faible concentration des Fe3+
Argumentation de la formation du second précipité par la cinétique de la réaction chimique.
(o, Mgr) (p, é) (é, Mgr, é, Mgr, é, Mgr) (Mgr, o, p, o, p)

Nous remarquons qu’en faisant recours au diagramme potentiel-pH, J&C ne font pas la première étape qui est nécessaire et qui concerne l’identification de tous les objets impliqués dans la réaction. Cette étape qui manque fait que J&C ne font pas bon usage du diagramme potentiel-pH malgré qu’ils ont articulé plusieurs niveaux.

Explication de la formation du deuxième précipité par l’écriture de l’équation chimique impliquant les couples I 2 / I - et Fe 3+ / Fe 2+

C154 : « Est ce qu’on peut tout d’abord écrire la réaction de l’équation qui s’est passée ? » (é)

Pour interpréter la formation du deuxième précipité, C part de l’écriture de l’équation de la réaction

161 J : « et lorsqu’on a fait cette réaction (é) elle n’est pas possible cette réaction(é, p) par ce que le potentiel Fe3+ Fe2+ est plus grand que celui de I2 I- (Mch)»

 lien (é, Mch)

Tableau 42 : Niveaux de connaissances mis en jeu dans l’activité B par le binôme J&C
Niveaux de connaissance selon le savoir savant Niveaux de connaissance mis en jeu par J&C
(o, Mgr) (p, é) (é) (é, Mch)

Pour déterminer et interpréter la réaction qui s’est passée, C commence directement par l’écriture de l’équation de la réaction. Pour C le raisonnement commence par l’écriture de l’équation de la réaction : il s’agit du modèle de la réaction directe que nous avons repéré aussi pour les situation A1 et A2.

Après avoir fourni l’équation de la réaction, J se rend compte que l’équation n’obéit pas au modèle des potentiels de référence : il s’agit du lien (é, Mch), il conclut alors que la réaction est impossible.

Essai de trouver un nouveau couple afin de satisfaire au modèle des potentiels de référence

190 C :« et on sait que y’a pas un oxydant qui est plus fort que l’eau (o, p) donc normalement on devrait avoir une réaction dans laquelle H3O+ vont intervenir vu la solution qu’on a (é, o) l’oxydant le plus fort c’est H3O+ (o, p) donc il suffit qu’on ait un couple un autre couple redox qui à n’importe quel potentiel puisqu’on sait que dans notre cas le l’eau a le plus grand potentiel donc il suffit qu’on ait un autre couple redox pour qu’il y ait une réaction entre H3O+ entre le couple H3O+ H2 et un autre couple (é, Mch) »

 lien : (o, p, é, o, o, p, é, Mch)

Tableau 43 : Niveaux de connaissances mis en jeu dans l’activité B par le binôme J&C
Niveaux de connaissance selon le savoir savant Niveaux de connaissance mis en jeu par J&C
(o, Mgr) (p, é) (o, p, é, o, o, p, é, Mch)

Après avoir échoué dans l’interprétation de l’évolution du système chimique à l’aide du modèle de potentiel de référence, C introduit le coupleH3O+/ H2 le couple le plus oxydant des couples oxydoréducteurs et qui n’intervient pas dans la réaction. C utilise la propriété oxydante de l’eau qui lui fournit un deuxième oxydant plus fort que le premier déjà identifié. En trouvant un deuxième oxydant dont le potentiel de référence est le plus grand, C pourra expliquer la formation de Fe(OH)3 selon le modèle des potentiels de référence.

Raisonnement sur la variation du pH et du potentiel

J&C :255-258 J « on avait dit que le pH restait constant durant le (…) on a plus l’hypothèse parce qu’on a les OH- devaient être consommés par les FeOH2 (G, p, é). Voilà donc on doit ajouter de la soude (E)… normalement on s’est déplacé parallèlement à l’axe des pH ce qui explique la transition peut être de FeOH2 à FeOH3 par ce que le nombre de moles OH- a augmenté (Mgr, é) »

 lien : (G, p, é, E, Mgr, é)

J&C 264-267 : « au moment d’ajouter le NaOH (E) on est sûr que le pH va augmenter (G, é)…mais le potentiel ne change pas (G, é) »

 lien : (E, é, é)

Tableau 44 : Niveaux de connaissances mis en jeu dans l’activité B par le binôme J&C
Niveaux de connaissance selon le savoir savant Niveaux de connaissance mis en jeu par J&C
(o, Mgr) (p, é) (G, p, é, E, Mgr, é) (E, G, é, G, é)

Après avoir fait l’hypothèse que le pH reste constant, C et J changent radicalement d’avis, sans appui théorique, dans le but de trouver une solution à la formation de Fe(OH)3.

Constatation que l’équation bilan n’est pas l’équation de la réaction car elle n’obéit pas à la règle du gamma

J&C 339-343 : « … on va obtenir 2 FeOH2 + 2 OH- + I2 nous donne FeOH3 + I2I- (é)…ce n’est pas l’équation bilan parce qu’elle ne respecte pas la règle gamma // elle ne respecte pas la règle gamma (é,Mch) on a FeOH3 + I- nous donne I2 + FeOH2 moi je n’est vraiment pas trouvé l’utilité qu’il y a un pH derrière tout ça on doit se baser sur un diagramme pH (é, Mgr)»

Tableau 45 : Niveaux de connaissances mis en jeu dans l’activité B par le binôme J&C
Niveaux de connaissance selon le savoir savant Niveaux de connaissance mis en jeu par J&C
(o, Mgr) (p, é) (é, Mch, é, Mgr)

Accord final sur l’équation bilan sans appui théorique :

J&C : 378-379 : « …2 FeOH2 + 2 OH- + I2 donne 2 FeOH3 + 2 I- c’est la réaction qu’on la plus plausible (é, p) »

Tableau 46 : Niveaux de connaissances mis en jeu dans l’activité B par le binôme J&C
Niveaux de connaissance selon le savoir savant Niveaux de connaissance mis en jeu par J&C
(o, Mgr) (p, é) (é, p)

après avoir épuisé plusieurs pistes J&C sont d’accord sur l’équation bilan :

2 Fe(OH)2+ I2+ 2 OH-2 Fe(OH)3+ 2 I-

A la fin de la situation, J&C font la conclusion sur la non importance du diagramme potentiel-pH

C 382 : « et voilà et on voit pas dans tout ça l’intérêt de la courbe E en fonction du pH pour la variation le diagramme de potentiel pH du fer on voit pas l’intérêt du diagramme potentiel pH pour le fer voilà »