2.3. Le rôle de la répétition dans la déstabilisation du récit.

Le lecteur remarque que certains thèmes se répètent d'un chapitre à l'autre, ce qui contribue encore plus à freiner l'évolution du récit; ces thèmes sont par exemple:

‘Il prit les mains du vieil homme.’ ‘"S'il te plaît, donne-moi ta bénédiction de Dieu." ’ ‘Ma el Aïnine passa ses mains sur la tête de Nour, massa légèrement sa nuque. Puis il fit relever le jeune garçon et il l'embrassa. p53’
  • au chapitre trois, le cheikh donne la bénédiction aux hommes et aux femmes:
‘Parfois, le soir, quand ils arrivaient devant le puits, des hommes et des femmes bleus, sortis du désert, accouraient vers eux avec des offrandes de dattes...Le grand cheikh leur donnait sa bénédiction, car ils avaient conduit leurs petits enfants malades du ventre ou des yeux. Ma el Aïnine les oignait avec un peu de terre mêlée à sa salive, il posait ses mains sur leur front...p245’ ‘Avec un coin de son haïk bleu ciel, Ma el Aïnine a essuyé le visage de l'homme. Puis il a passé la main sur son front, sur ses paupières brûlées, comme s'il voulait effacer quelque chose. Le bout de ses doigts mouillé de salive, il a frotté les paupières de l'aveugle...p371 ’
  • au chapitre six, c'est au tour du cheikh de recevoir la bénédiction:
‘Lentement, comme s'il cherchait à se souvenir de gestes anciens, Nour passe la paume de sa main sur le front de Ma el Aïnine, sans prononcer une parole. Il mouille le bout de ses doigts avec sa salive, et il touche les paupières qui tremblent d'inquiétude. p405 ’
  • le chant:
    • au chapitre deux, avant leur départ de Saguiet el Hamra, il y avait des chants:
‘Comme il approchait du mur d'enceinte de la ville, il entendit grandir le bruit rythmé de la musique...Nour entendit le son aigre des flûtes qui montait, descendait, montait, puis s'arrêtait, tandis que les tambours et les rebecs reprenaient inlassablement la même phrase. p51 ’
  • au chapitre trois, à l'annonce de l'arrivée imminente aux terres promises par le cheikh, il y a eu des chants:
‘Il y eut comme une fête cette nuit-là. Pour la première fois depuis longtemps, on entendait le son des guitares et des tambours, et le chant clair des flûtes. p241’
  • les femmes qui chantent pour leurs enfants:
    • -au chapitre premier:
‘De l'autre côté du brasero, les femmes parlaient et l'une d'elles chantonnait pour son bébé qui s'endormait sur son sein. p12’
  • au chapitre deux:
‘Nour entendait les mélopées douces des femmes qui endormaient leurs bébés. p34 ’
  • la détresse des nomades:
    • au chapitre deux:
‘La plupart de ceux qui arrivaient maintenant étaient des vieux, des femmes et des enfants, fatigués par les marches forcées à travers le désert, les vêtements déchirés, les pieds nus ou entourés de chiffons. Les visages étaient noirs, brûlés par la lumière, les yeux pareils à des morceaux de charbon. p34’
  • au chapitre quatre:
‘Maintenant la troupe des guerriers du cheikh n'avait plus la même apparence. Ils marchaient avec le convoi des hommes et des bêtes, harassés comme eux, leurs vêtements en lambeaux, le regard fiévreux et vide. p361 ’
  • la répétition de la même question par l'aveugle:
    • au chapitre troisl'aveugle demande s'ils sont arrivés aux terres promises:
‘...le guerrier aveugle demandait, toujours avec la même inquiétude: ’ ‘"Est-ce que c'est ici ? Est-ce que nous y sommes ? Dis-moi, est-ce que nous sommes arrivés à l'endroit où nous devons nous arrêter pour toujours ?" p234’
  • au chapitre quatre, il répète la même question:
‘"Est-ce que nous sommes arrivés, est-ce ici, notre terre ?" demandait toujours le guerrier aveugle. pp363-364 ’