2.3- Facteurs et critères influant les choix et les décisions

Par ailleurs, des différentes explications apportées, justifiant les choix des responsables des bibliothèques pour favoriser un service et pas un autre, pour transférer des sommes budgétaires sur une ligne au détriment d’une autre, se dégagent certains facteurs susceptibles d’influencer le fonctionnement, la nature de l’offre et de la qualité des services rendus au sein d’une bibliothèque. Par conséquent, ils constituent des critères sur lesquels des choix peuvent être fondés. Il s’agit :

En effet, le nombre des usagers profitant d’un service est un indicateur quant à la nécessité de le perpétuer ou de le supprimer.

‘« Pour les animations, dans le meilleur des cas, viennent 50 personnes, donc il serait peut être mieux d’acheter des livres qui peuvent s’adresser au plus grand nombre. » V69, ’ ‘« On fait le choix, parce que des animations qu’on a produit d’une façon régulière, n’ont pas rencontré leurs publics. Dans ce cas, il est raisonnable de ne pas poursuivre. » P95’ ‘« Il faut se donner des priorités. Et nous, pour l’instant, la priorité, je ne pense pas que ça soit les animations, car on n’a pas les locaux. » V94’ ‘« Notre taux d’inscrits se stabilise, voire a tendance à diminuer légèrement parce qu’on n’offre pas de nouveaux supports. On a le minimum du point de vue du multimédia, un seul poste d’accès Internet, etc. On ne peut pas faire plus dans les locaux où on est actuellement…On veut faire venir des conteurs, des musiciens, des comédiens, etc. Mais, on n’est pas dans les bonnes conditions pour les recevoir. On fait avec ce qu’on peut, c’est toujours mieux que rien. » V94’ ‘« Il y a des priorités qui sont tout à fait listées et affirmées dans la lettre de cadrage de la Ville. » B34’

Une multitude d’exemples cités reflète l’influence de la politique culturelle globale de la mairie sur la nature de l’offre, sur la qualité des services, sur l’organisation interne, sur la politique d’acquisitions tel que le cas de [O84], etc.

‘« La mairie intervient dans la gestion interne au coup par coup. Ils interviennent dans la politique d’acquisition. Elle nous demande d’acheter tel ou tel livre… Je lui présente tout ce que je vais acheter. J’ai besoin de leur signature pour les acquisitions… Pour toute proposition, il faut que je voie avec mon élu, on se voit toutes les semaines.. Il faut qu’ils soient au courant pour tout. » O84’

Aussi, certaines mairies cherchent à lutter contre le phénomène de la délinquance. Dès lors, elles assurent une ouverture au public plus large afin de contenir les jeunes et par conséquent les bibliothèques sont appelées à augmenter leurs horaires d’ouverture. De plus, les orientations politiques vers la petite enfance mobilisent les bibliothèques dans l’élaboration des projets de coopération avec les écoles. Leur intérêt pour les nouvelles technologies détermine la nature des acquisitions ou à titre d’exemple, le nombre de postes octroyant un accès Internet au public.

‘« Quand on a mis Internet à la libre disposition du public, il y avait 30 postes qui ont été tout de suite utilisés par les adolescents, on a donc immédiatement décidé de réserver dix postes à la consultation du catalogue. Ça a fait l’objet d’une demande d’autorisation vu l’importance de l’accès libre à Internet pour la municipalité. » V59 ’ ‘« L’élu a une vision très en avance concernant la nouvelle technologie, c’était parfois difficile de lui faire comprendre que le livre est une chose importante même s’il y a la nouvelle technologie. » ’

De plus, l’orientation patrimoniale des décideurs locaux pour des raisons politiques, touristiques ou autres mobilisent les bibliothèques sur un programme de numérisation et de gestion d’un tel fonds, mais encore ponctionne sur leur budget d’acquisition pour l’achat de tout document ancien, qui concerne la ville. [A74, V59, O84]

‘« J’ai réduit les animations car primo elles ne touchent qu’une soixantaine de personnes. Pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas faire plus, on ne peut pas accueillir plus de personnes et secundo je me dis que la ville a d’autre part une programmation culturelle avec des salles qui sont faites pour ça. Les usagers ne seront pas défavorisés, si moi je n’organise plus rien à la bibliothèque. » V94’

En outre, toute organisation interagit étroitement avec l’évolution générale de l’individu et de la société. Le nouvel univers technologique et informationnel dans lequel se trouvent les bibliothèques a engendré de nouveaux besoins chez les usagers et une nécessité d’adaptation et de compatibilité de la part des bibliothèques. Des choix différents se sont ainsi imposés.

De plus, la situation socio-économique de la ville détermine aussi bien la nature de l’offre que la qualité des services ainsi que la nature des missions et des actions menées. En effet, elle exige l’existence de certains fonds documentaires tels que le fonds insertion-formation (guide de recherche de l’emploi, aide sociale, etc.) qui n’existaient pas auparavant dans maintes bibliothèques et que la dégradation de la situation économique et sociale de la ville a justifié. Aussi, le vieillissement de la population dans certaines villes a encouragé des démarches importantes vers cette population (bibliobus, coopération avec des maisons de retraite, etc.)

‘« On a une image d’une ville de personnes âgées. On essaye de développer des actions pour se déplacer chez eux. » B34’

Une mission sociale vient ainsi s’ajouter à ces missions culturelles et éducatives.

‘« L’insertion n’est pas dans notre mission. C’est plutôt à l’ANPE d’aider les gens à trouver un travail, d’écrire une lettre de motivation. Maintenant, la situation sociale et économique de notre ville a beaucoup pesé sur cette affaire là. Il n’y a pas que nous, évidemment, il y a des bibliothèques qui ont un service forma-thèque. » V69’

Les bibliothèques s’orientent, par conséquent, vers des acteurs sociaux avec lesquels elles ne coopéraient pas auparavant tels que les centres sociaux.

‘« C’est une ville ouvrière, avec un taux de chômage assez important, ça induit forcément l’orientation de notre politique : on a mis des partenariats avec l’ANPE, des choses qu’on ne ferait pas si la ville était dans une autre situation économique. » T10’

Par ailleurs, la situation géographique, particulièrement pour les villes centres qui représentent un lieu attractif sur l’agglomération, n’a pas influencé les choix concernant l’offre et les services. Les responsables ne cherchent pas à moduler leur offre pour une certaine complémentarité au niveau de l’agglomération et en particulier dans le cas de la non-existence d’une coopération. Les usagers cherchent à vivre pleinement leur bibliothèque et surtout à ne pas avoir à se déplacer ailleurs pour trouver ce qu’ils cherchent. Dès lors les bibliothèques veuillent à assurer une offre pertinente et exhaustive au niveau de la ville.