1- Les bibliothèques et la coopération

La coopération inter-bibliothèques est, aujourd’hui, reconnue comme une nécessité. Face à l’augmentation constante de la production documentaire et afin d’éviter les difficultés engendrées par cette croissance documentaire (difficultés de stockage, contraintes budgétaires, etc.), les bibliothèques ne peuvent travailler en autarcie. Ajoutons qu'elles doivent compenser le manque de personnels qualifiés par l'échange d’expériences et de points de vue, afin de faire face à la croissance permanente du nombre de lecteurs et aux exigences accrues aussi bien pour la qualité de l’information que pour la rapidité et la facilité d’accès. Aucune bibliothèque n'est et ne peut être autosuffisante. D’ailleurs, comme le confirme Michel Melot (1992), toute bibliothèque doit être conçue et gérée comme un ensemble éternellement incomplet. Par conséquent, la coopération doit représenter son mode d’existence normal. Elle doit être intégrée à sa conception et prévue dans ses règles de fonctionnement. Elle n’est donc plus, un service supplémentaire, ni un palliatif d’une situation défectueuse.

Par ailleurs, la coopération entre bibliothèques existe depuis longtemps. Le partage des compétences et d’expérience, l’élaboration des projets en commun sont des activités traditionnelles chez les bibliothécaires. Cette coopération a pris plusieurs formes. Elle s’est établie, tout d’abord, en fonction du territoire. Sur le plan local, les bibliothèques pratiquent des partenariats avec les différents autres acteurs de la ville : acteurs culturels (musées, conservatoires, etc.), sociaux (les centres sociaux, hôpitaux, etc.) et scolaires (crèches, écoles, etc.). Ces acteurs sont devenus les partenaires habituels des bibliothèques, assurant un maillage géographique plus fin et complétant l’offre d’une centrale et de ses annexes.

Au-delà du territoire local, la coopération s’est étendue avec l’apparition des agences de coopération régionales. Leurs actions principales consistent :

  • à la conservation et la valorisation du patrimoine (l’élaboration des catalogues collectifs des fonds patrimoniaux, des plans de conservation et d’élimination partagés, etc.) ;
  • au développement de la lecture auprès des publics ne pouvant se déplacer (hospitalisés, détenus) ;
  • au développement des activités dans le domaine littéraire et de l’économie du livre (salon du livre, aide à la création et à la diffusion, etc.).

Cependant, certaines de ces structures de coopération créées sous forme associative ont disparu ou sont en sommeil. Actuellement, il n’y en a qu’une quinzaine qui sont actives.

De plus, avec le développement de l’intercommunalité, des nouvelles pistes en matière de coopération sont apparues. Pour certaines bibliothèques, la volonté de coopérer s’est intensifiée. Cette dernière représente le remède de la loi de décentralisation qui a provoqué l’isolement et l’évolution différenciée des établissements de différentes villes. Elle permet une meilleure répartition des équipements et des services, une meilleure harmonisation du fonctionnement et une cohérence au niveau des décisions, une mutualisation des ressources des municipalités au niveau de l’agglomération. La nécessité et la volonté d’atteindre des seuils qualitatifs et économiques viables aussi bien pour les bibliothèques que pour les autres équipements culturels (théâtre, cinéma, etc) ont conduit les communautés de plus en plus nombreuses à adopter la compétence culturelle. En revanche, le développement de la coopération culturelle intercommunale est assez complexe, constate Réné Rizzardo (2002), pour plusieurs raisons dont en particulier : le caractère symbolique des actions culturelles et la réticence à en partager les fruits et les effets sociaux ; le retard en matière culturelle des petites villes et des communes rurales, qui, face à d’autres priorités, hésitent à adhérer à des politiques culturelles intercommunales jugées coûteuses, etc.

En outre, la coopération a évolué progressivement. Elle a d’abord été établie entre les bibliothèques de même type BM, BU. C’est assez tardivement qu’une coopération hétérogène a été établie. Par ailleurs, plusieurs auteurs signalent un phénomène, toujours d’actualité ; la coopération sépare les petites, moyennes et grandes bibliothèques, les grandes ayant moins d’intérêt à coopérer avec les petites bibliothèques et les moyennes ayant tendance à s’assimiler aux grandes. C’est pourquoi, Michel Melot (1991) pense que la décentralisation doit se répercuter à chaque point où sont concentrés les moyens et le pouvoir et toute bibliothèque de quelque importance a un devoir de coopération avec les plus petites qu’elle.

Dans les années quatre vingt, avec l’émergence des nouvelles technologies, l’environnement bibliothéconomique a connu beaucoup d’amélioration. L’informatisation apporte une forme de solution efficace permettant de résoudre maints problèmes. Elle crée d’autres possibilités de diffusion et d’échange. Les bibliothèques ont la possibilité, en premier lieu, d’échanger leurs notices sur support magnétique et, plus tard, la coopération a pris la forme d’un réseau. Il constitue aujourd’hui le mode de coopération le plus répandu.