5- La sous-traitance et la coopération

En interprétant les chiffres des tableaux suivants, nous pouvons avancer, avec prudence, que la sous-traitance n’a pas empêché la coopération, alors que le contraire peut être vrai. Le taux de bibliothèques adhérant à des projets de partenariat et pratiquant la sous-traitance et beaucoup moins important que le taux de bibliothèques sous-traitant certaines activités et ayant des projets de partenariat. Il est à noter que parmi les 55 bibliothèques, qui pratiquent la sous-traitance, nous trouvons 46 bibliothèques ou 83% d’entre elles, qui pratiquent en parallèle la coopération, alors que seule 41,8% des bibliothèques qui coopèrent sous un format associatif ou en réseau, sous-traitent une partie de leur activités.

Tableau n°38 : Le taux bibliothèques sous-traitantes parmi les bibliothèques qui coopèrent
Sout Nb.cit. Fréq.
Oui 44 41,8%
Non 61 58,2%
TOTAL OBS 110 100%

Certains de nos interviewés signalent que l’absence d’un réseau bibliographique structuré les amènent à opter pour la sous-traitance du traitement des documents (récupération des notices). D’autres trouvent que la récupération des notices de la BNF ou d’ELECTRE leurs revient sûrement moins cher que d’instaurer et d’entretenir un réservoir bibliographique commun. La récupération des notices représente l’exemple, souvent cité, pour une éventuelle comparaison des coûts. En effet, les économies d’échelles peuvent être considérées comme un facteur favorable à la gestion déléguée, comme le confirme François Troger (1995). Par conséquent, une telle solution peut les décourager à opter pour certaines formes de coopération, telle que l’adhésion à un réseau bibliographique.

Cependant, d’autres éléments de réponses nous laisse croire, d’une part, que la coopération ne peut réellement dissuader les responsables des bibliothèques à ne pas sous-traiter. Comme le confirme notre interlocuteur (B34) « le recours à la sous-traitance n’est pas lié à l’existence ou à la non existence d’une coopération, c’était dans l’immédiat et je ne vois pas comment je pourrai faire autrement. » L’existence d’un réseau de catalogage partagé a pu, en effet, réduire le nombre de notices achetées, mais n’a pas pu supprimé les achats de notices. D’ailleurs certains trouvent que c’est même plus intéressant de récupérer les notices bibliographiques lors d’un fonctionnement en réseau, pour plus d’harmonisation au niveau du catalogue.

‘« On a pensé, au niveau du réseau, que c’est mieux d’avoir recours à l’extérieur : c’était un choix réseau. Nous avons un catalogue collectif sur le réseau et ça suppose des choix de catalogage communs. » P95’

De plus, il est vrai que les animations peuvent faire l’objet d’une coopération mais les programmes qui peuvent être valables pour une bibliothèque peuvent ne pas l’être pour d’autres. Les orientations et les objectifs sont différents et par conséquent les programmes et les contenus doivent l’être aussi. De ce fait, la coopération ne peut entraver le recours à des intervenants extérieurs pour effectuer des choix indépendamment de ses partenaires.

De nombreuses activités font l'objet d'une sous-traitance et en même temps d'une coopération. Il s'agit, précisément, des animations, du dépouillement de périodiques, de la fourniture de notices bibliographiques, etc. Dès lors, comme nous le confirme notre interlocuteur [A61] « Pour chaque partie de la gestion de la bibliothèque, il y a l’un ou l’autre qui est possible et parfois les deux en même temps. La coopération peut nous apporter un peu plus sur le plan formation professionnelle, alors que la sous-traitance, ce n’est qu’un chèque à remplir et on a, ou non, des bénéfices. »

Ceci dit, la pratique de la sous-traitance n’a pas empêché le regroupement de collectivités, afin de mettre des moyens nécessaires à la réalisation d’un service donné et de même pour la coopération, elle n’a pas entravé le recours à la sous-traitance. Il s’agit plutôt de deux démarches managériales différentes et complémentaires. L'accomplissement de certaines tâches en ayant recours à la coopération peut être plus efficace, qu’en ayant recours à la sous-traitance et vice-versa. Comme le pense un de nos interlocuteurs : « Je ne crois pas à la coopération pour l’échange des notices. La coopération ce n’est pas là dessus qu’elle doit se faire. La coopération doit être sur des services rendus au public, pas sur la fourniture des prestations ou des produits. Une notice est un produit comme n’importe quel produit…acheter une notice c’est comme l’achat d’un stylo bic… c’est pour ça que je pense qu’il suffit de trouver les fournisseurs privés ayant un bon rapport qualité/prix. La coopération se fait sur des services rendus pour la mise en commun de la compétence, etc. » A74