0.2.1.2. Les approches anthropologiques et sociologiques

a) L’ethnographie de la communication et la sociolinguistique interactionnelle

Ce courant interactionniste se caractérise par ses fondements anthropologiques. Le programme de l’ethnographie de la communication, conçu dans les années 60 par ses deux co-fondateurs Gumperz et Hymes, invite à « (…) décrire les différents usages du discours – s peech – au cours de différents types d’activités dans différentes sociétés (…) » (S. Bruxelles, in Charaudeau et Maingueneau, 2002 : 233). Le champ d’investigation est alors particulièrement étendu et la méthode adoptée est inductive, empirique et naturaliste 22 . La perspective de Hymes est tant anthropologique que linguistique : elle prône la nécessité de l’étude des comportements communicatifs et préconise celle du fonctionnement du langage en situation. L’intérêt est porté aux événements de communication qui sont décrits en rapport avec leur contexte ; les paramètres situationnels à retenir sont proposés dans le modèle speaking 23 .

La perspective de Gumperz présente une orientation plus sociolinguistique 24 . Ses premiers travaux portent sur le contact entre les langues et les phénomènes d’alternance codique 25 . Cet auteur met également l’accent sur les processus de compréhension actualisés par les participants au cours d’une interaction, processus dont l’analyse repose sur la notion de « contextualisation ». Gumperz se démarque ainsi des approches linguistiques qui étudient le langage comme un tout autonome.

‘Gumperz préconise la démarche inverse, partant de la situation où est employé le langage, pour observer la façon dont l’événement de communication est interprété par les acteurs, et sur la base de quels indices. (Traverso, 1999 : 10)’
Notes
22.

L’importance accordée aux données pose quelques problèmes : « le risque est alors qu’un souci trop scrupuleux du détail en vienne à masquer les régularités significatives, et que ce culte des “data” finisse par entraver l’élaboration de la théorie » (Kerbrat-Orecchioni [1990 : 60] faisant référence à ce « malaise » évoqué par Bachmann, Lindenfeld et Simonin [1981 : 201]).

23.

Pour une présentation plus détaillée de ce modèle et l’utilisation d’une de ses variantes, voir le point 3 de cette Introduction Générale.

24.

Bruxelles note sur ce point que « (…) les deux ouvrages de J. Gumperz traduits en français en 1989 comportent dans leur titre le syntagme “sociolinguistique interactionnelle”. » (S. Bruxelles, in Charaudeau et Maingueneau, 2002 : 233).

25.

« L’alternance codique, ou « code switching » consiste à passer d’une langue à l’autre au sein d’un échange ou d’un énoncé. » (Traverso, 1999 : 10). Pour une étude de l’alternance entre langue française et langue arabe voir notamment Hmed (2003, Chapitres 10 et 11).