La séquence préliminaire, dont le noyau correspond à la question préalable à la requête, a pour fonction d’atténuer non seulement l’ingérence provoquée par la visite, mais aussi un acte menaçant tel que la demande d’entrer dans l’appartement du particulier 307 . Cependant, malgré sa valeur d’adoucisseur, elle constitue elle-même un FTA puisqu’elle fait partie de l’offense générale qu’engendre la démarche du vendeur. Dans chacune des interventions du démarcheur, on peut relever de nombreux procédés de politesse négative 308 . A la substitution du présent par le conditionnel (« vous auriez », I34-4V) ou le passé de politesse (« on venait », I17-39V) s’ajoute une multitude d’accompagnateurs de l’acte menaçant. Les accompagnateurs les plus fréquents sont indéniablement les minimisateurs, parmi lesquels l’adjectif « petit » apparaît comme le « chef de file ».
« Petit » est un minimisateur au sens strict du terme. Il tend à réduire, à « rendre plus petite », la menace que constitue le FTA. Lors de la prise de contact, il est omniprésent et se combine avec d’autres minimisateurs tels que « juste », « quelque », « simplement », etc. Les exemples suivant ne représente qu’une poignée de tous ceux qu’il est possible de relever dans le corpus pour illustrer cette utilisation des procédés substitutifs et additifs.
‘ Interaction n°1 :’ ‘7 V : [...] c’est juste une petite enquête [...]’ ‘ Interaction n°17 :’ ‘39 V : […] on v’nait vous voir excusez-nous parce qu’on a mis une p’tite fiche dans la boîte aux lettres parce qu’on fait des p’tites enquêtes’ ‘ Interaction n°18 :’ ‘6 V : c’est pour récupérer la p’tite fiche que j’vous ai mise dans la p’tite boîte aux lettres madame’ ‘ Interaction n°34 :’ ‘4V : [...] est-ce que vous auriez quelques p’tites minutes à nous accorder’ ‘ Interaction n°2 : ’ ‘12 V : [...] pour savoir comment les gens s’informent tout simplement ’ ‘ Interaction n°4 :’ ‘33 V : [...] c’est juste pour savoir comment les gens s’informent [...]’ ‘ Interaction n°14 :’ ‘19 V : [...] nous devons voir toutes les familles pour les questionner un p’tit peu sur la scolarité de leurs enfants’ ‘31 V : j’vous prends deux p’tites minutes pour remplir une p’tite fiche non/’ ‘ Interaction n°18 :’ ‘14 V : [...] c’é:tai:t une p’tite enquête [...]’ ‘ Interaction n°20 :’ ‘16 V : [...] alors ça a un rapport simplement avec le programme télé’ ‘ Interaction n°24 :’ ‘15 V : [...] il faut simplement remplir ce p’tit heu: ce pet- petit résumé ici [...]’ ‘ Interaction n°25 :’ ‘26 V : [...] tout simplement d’un point de vue général [...]’ ‘ Interaction n°27 :’ ‘32 V : [...] c’est tout (.) savoir un p’tit peu comment ça s’passe à l’éco:le [...]’Dans l’ensemble de la séquence préliminaire, toutes les interventions du vendeur contiennent un nombre important d’atténuateurs de la menace. A l’image de ces extraits, le démarcheur combine l’utilisation de procédés additifs (« petit », « tout simplement », « juste », etc.) et de procédés substitutifs (« c’était », « vous auriez ») qui viennent renforcer l’effet adoucisseur des actes dans lesquels ils prennent place.
Ces préliminaires à la requête principale ont fait l’objet du point 2.1.2.4.
La politesse dite « négative » est celle qui consiste à adoucir les FTAs. La politesse « positive » consiste, elle, à produire des FFAs, de préférence renforcés. Sur ce point, voir notamment Kerbrat-Orecchioni, 1992.