1.2.2. Des stratégies plus étendues qui ont un effet sur la possible transaction

D’autres stratégies ont un domaine d’application plus large car elles s’étendent sur un plus long moment de l’interaction. Elles visent alors davantage la réussite de l’objectif final que la relation proprement dite. C’est le cas de la gestion de l’apparition du produit d’abord comme objet de discours et ensuite comme objet réel 717 . Cette préparation permet d’introduire de manière progressive le produit destiné à être vendu. Cette précaution est imposée par la nature du produit. Une encyclopédie est un objet conséquent qui ne peut être proposé à l’achat dès les premiers instants de la démarche. Le travail qui est réalisé par le vendeur dans une large partie de l’interaction permet au produit d’être « accueilli » dans les meilleures conditions. Une telle stratégie se déploie donc sur plusieurs étapes constitutives de l’interaction (dès les premières questions de l’enquête et jusqu’à l’apparition effective de l’objet) là où les plus ponctuelles, comme le compliment, sont susceptibles de se réaliser sur un seul échange (généralement lors de la prise de contact) 718 .

Regrouper les stratégies étudiées selon la place qu’elles occupent dans le déroulement de la démarche et selon leur effet sur la relation ou sur la réussite commerciale permet de les approcher sous un autre angle que celui de leur enchaînement linéaire. La pertinence d’une telle dichotomie est pourtant discutable. Si cette dernière permet d’apporter un éclairage différent, elle se heurte au fait que toutes les stratégies, quelle que soit leur étendue et leur « zone d’effet », sont liées. Celles qui agissent sur la relation ont une influence sur la réussite commerciale et réciproquement. Ainsi, l’activité d’échoïsation permet le rapprochement, qui permet à son tour d’encourager la parole, parole qui est indispensable au déploiement de stratégies plus larges. De la même manière, une stratégie étendue comme celle de la préparation à l’apparition du produit a un effet sur la possible transaction mais cette prudente progression permet également de ne pas briser la relation établie par ailleurs.

Toutes les stratégies mises en place par le vendeur se complètent et se mêlent. Elles participent toutes, à leur manière, à la réalisation du but final et peuvent être considérées, pour reprendre les termes de Bange, comme les « actions » d’une large stratégie commerciale.

‘Une stratégie (…) c’est un ensemble d’actions sélectionnées et agencées en vue de concourir à la réalisation du but final, c’est-à-dire que la stratégie comporte elle-même des buts subalternes et des moyens. (…) Une stratégie consiste dans le choix d’un certain nombre de buts intermédiaires et subordonnés dont on croit que la réalisation dans des actions partielles conduit de manière adéquate à la réalisation du but final. (Bange, 1992 : 76-77)’
Notes
717.

Voir sur ce point le Chapitre 7.

718.

Si les stratégies ponctuelles se déploient sur un court instant de la démarche, il convient de souligner qu’elles peuvent s’appliquer à plusieurs reprises. C’est notamment le cas de l’activité d’échoïsation menée par le vendeur. Si elle s’exerce à un moment précis où le comportement du particulier s’y prête, elle peut réapparaître ultérieurement.