L’unité spatiale de référence pour une étude en hydrologie ou en géomorphologie est le bassin-versant ; pour cette étude, nous avons retenu le cadre urbain et ses environs (Figures 1). Comme un point dans l’espace, la ville de Bangui est située, en son point kilométrique 0 (Place de la République), à 4°22’00’’Nord-18°35’00’’Est ; si nous considérons l’espace urbain avec le « Grand Bangui », ses limites sont grossièrement comprises entre 4°18’30’’ et 4°30’00’’ de Latitude Nord, et entre 18°28’13’’ et 18°38’00’’ de Longitude Est. Ces coordonnées géographiques ne comprennent pas les postes de péage aux deux sorties Nord de Bangui. Né au pied des Rapides de l’Oubangui et des Collines de Gbazabangui, le poste militaire colonial s’est déplacé dans l’espace et dans le temps, en quête des terrains hors d’eau entre les Rapides et la confluence avec la Mpoko en aval, avant de s’installer définitivement en 1892 sur le promontoire rocheux, lequel abrite aujourd’hui l’ex-Hôtel SOFITEL (Planche I, Photos A, B et C). Coincé entre les collines aux versants ouest escarpés à l’Est et l’Oubangui au Sud, le site s’est progressivement développé vers l’Ouest, le Sud-Ouest et le Nord dans une Plaine où sont confondus les chenaux de petites rivières et les bas-fonds marécageux. La présence de la Colline de Gbazabangui (Figure 1), qui comporte encore des témoins de la forêt dense au centre-ville, rompt en effet la continuité de la ville d’est en ouest, créant de ce fait un bicéphalisme entre l’Est, avec les ensembles Ouango, Kassaï, Gbangouma et Ndress, et l’Ouest, avec la Plaine marécageuse dans laquelle s’est étalée la majeure partie de la ville.
D’une superficie de 2,12 km2 en 1912 (soit 212 ha), l’espace urbain a successivement atteint 6,42 km2 en 1945, 22,56 km2 en 1960, 37 km2 en 1976, 63 km2 en 1990, 72 km2 en 1994 et 80 km2 à l’heure actuelle ; cette superficie atteindrait 140 km2 avec le Grand Bangui. Quant au taux de croissance de la population, il a été estimé à 6-7 % de l’origine de la ville en 1889 à 1975, en raison d’un important exode rural. Ce taux, revu à la baisse par le Recensement Général de la Population (RGP) de 1975, aurait été de 4,40 %, et l’effectif de la population de 279 792 habitants.
Le recensement de 1988 a dénombré une population de 451 690 habitants, pour un taux de croissance de 3,8 % ; sur la base de ce taux, nous estimons actuellement la population de la ville de Bangui à plus de 700 000 habitants 1 . Les plus fortes densités de population sont localisées dans les quartiers à développement spontané. Ceci apparaît comme un indicateur du contraste spatial qui caractérise l’occupation du sol et la répartition des citadins dans les processus d’urbanisation du site.
En effet, Bangui est une ville coloniale dont un dualisme a déterminé les modes de vie entre la population autochtone et la population européenne. Ce schéma, lié certes à l’histoire, influence encore beaucoup de villes post-coloniales. Ainsi l’évolution de la ville de Bangui, qui est aussi calquée sur ce schéma, a été discontinue dans l’espace et dans le temps, avec d’un côté les quartiers des Européens et des Evolués devenus fonctionnaires, administratifs, commerçants, et de l’autre ceux des Indigènes. Cette situation explique aujourd’hui la coexistence à Bangui de deux groupes de quartiers : les uns lotis et équipés, les autres dits populaires, densément peuplés et sans infrastructure. Les quartiers populaires représentent l’essentiel de la ville tant en surface qu’en population, alors que les quartiers de type européen concernent une surface relativement réduite.
Nous pensons que cette distinction a aussi une signification en termes d’occupation du sol et de surfaces drainant les eaux pluviales. Ainsi, les quartiers à développement spontané ont un coefficient élevé d’occupation du sol, avec une densification notable du bâti, et participent plus au transfert des eaux pluviales par rapport aux quartiers lotis en raison d’une moindre infiltration. Du fait qu’ils colonisent les zones inondables, les quartiers populaires sont davantage exposés aux risques liés à l’eau.
La ville de Bangui a toujours connu des problèmes liés à l’eau pour son extension et son développement. La fragilité du site, liée d’un côté à la présence des collines aux pentes fortes et de l’autre à une plaine à pente nulle (<1 %) où l’eau est mal drainée, et les processus d’urbanisation, constituent des facteurs de vulnérabilité que peut nous révéler l’aléa hydraulique (pluvial). Ainsi, l’urbanisation conditionne l’imperméabilisation du sol et l’accroissement du ruissellement dans cet espace tropical humide où les pluies sont abondantes (1 558,5 mm en moyenne), en accentuant les contraintes hydrologiques (drainage, inondation…) du fait de l’inadéquation des aménagements. Cette lacune dans la gestion de l’eau à Bangui remonte à l’époque coloniale et n’a guère trouvé de solutions.
Selon le recensement de décembre 2003, Bangui compte 531 763 habitants et Bimbo 144 086, soit une agglomération de 640 000 habitants.