4. Problématique générale et objectifs de l’étude

L’eau est un des principaux agents de la morphogenèse, mais elle est aussi indispensable à la vie sous toutes ses formes. Son abondance ou son insuffisance dans un milieu donné permet d’apprécier l’équilibre vital ou du moins le rythme de vie de végétaux, des animaux ou des hommes qui en dépendent. Or dans une cité, quelle que soit sa taille, l’eau devient une question délicate si elle commence à manquer, même épisodiquement.

De la création de la ville de Bangui à nos jours, l’eau a fortement influencé l’occupation du sol : d’abord, par la présence des marais ou zones inondables pendant près de six mois dans l’année, ensuite par les méfaits de l’eau liés à son abondance (précipitations, ruissellement, érosion) et à l’insuffisance des aménagements (inondations, drainage, assainissement), suite à l’accroissement spatio-démographique de la cité. Mais depuis peu, un autre problème s’y ajoute : il existe un manque d’eau, parfois accentué, en saison sèche, qui s’exprime par une baisse significative du niveau hydrostatique de la nappe phréatique. Il est peut-être dû à l’imperméabilisation du sol urbain, soit parce que l’eau qui tombe ruisselle toute, pour l’essentiel, et ne s’infiltre pas, soit parce que les conditions géomorphologiques ne s’y prêtent pas. Cette situation peut aussi s’expliquer par une réduction de l’infiltration des eaux pluviales, qui jouerait sur l’alimentation de la réserve de la nappe. Dans cette ambiance, l’eau potable n’est pas accessible à tous les citadins, ce qui a tendance à accroître le taux des maladies d’origine hydrique.

La problématique générale se rapporte aux « effets » de l’eau dans un espace urbain et à sa gestion. Car au-delà du fait que l’eau a une influence sur la ville de Bangui, elle est aussi source de vie et base de développement ; par conséquent, elle l’est dans une certaine mesure pour la population citadine. L’étude des interactions de l’eau dans son cadre nous permettra de voir comment elle détermine l’équilibre de la population de Bangui.

A travers cette étude hydrogéomorphologique, l’intérêt principal est de comprendre les interrelations de l’eau (météorique, superficielle et souterraine) avec son milieu (topographie, géomorphologie, nature des terrains) pour faire ressortir les interactions ; ensuite, de coupler l’eau et l’espace urbanisé dans le but des les analyser conjointement dans un milieu anthropisé où les conditions de la circulation de l’eau se sont artificialisées. Dans ce contexte, les bas-fonds marécageux ont fait l’objet d’une étude sédimentologique (voir chapitre VI) dans le but de faire ressortir le poids de l’eau dans leur mise en place. Car l’extension du site dans la plaine marécageuse a fait participer cette dernière à la dynamique actuelle de l’eau. Ainsi, l’importance du ruissellement urbain, à l’origine les eaux pluviales, concourt au risque d’inondation le long des cours d’eau collecteurs, qui se colmatent avec les débris issus de l’érosion et les déchets domestiques, et dans les bas-fonds insalubres habités. De ce fait, les objectifs du travail se résument en les points suivants :

Nous avons abordé la problématique de la gestion de l’eau dans la ville de Bangui selon deux approches conjointement menées : recherches bibliographiques et études de terrain. Trois domaines ont été développés :

Nous avons aussi étudié l’interface nature (conditions de gisement et de dynamique de l’eau : eau de surface et eau souterraine, pluies exceptionnelles) / société (politique d’aménagement de la ville de Bangui). Le problème des inondations de l’Oubangui et du haut niveau de l’eau des bas-fonds marécageux a été examiné. Depuis 1950, des efforts d’aménagement ont été faits pour assainir la ville (ouverture et curage des collecteurs, des fossés de drainage, viabilisation des bas-fonds marécageux, etc.) et pour doter la ville en eau potable (construction d’une station de pompage d’eau fluviale et d’une station d’épuration moderne) afin de résoudre le problème de la demande en eau due à l’augmentation rapide de la population et à l’extension de la ville qui est largement sous-équipée. Malgré tout, les problèmes de l’eau persistent encore à Bangui.

A travers cette approche globale de la dynamique de l’eau à Bangui, nous avons mis l’accent sur ses aspects nuisibles, notamment sur les inondations et leur fréquence (NGUIMALET, 2003 a), qui caractérisent les problèmes de la gestion de l’eau dans cette cité. Dans ce contexte, le principal apport de ce travail est de démontrer que l’extension rapide de la ville en accroissant l’impluvium, contribue au risque d’inondation par l’importance du ruissellement à chaque épisode pluvieux (le cas des inondations urbaines, voir chapitre VIII, p. 361).