1.1.1. Les hauteurs d’eau et les débits

D’après CALLEDE et al. (1992), la station hydrométrique de Bangui est stable pour les moyennes et hautes eaux depuis les origines des observations. Cependant, les barèmes ont changé pour les basses eaux, notamment sous la cote 280 cm. Ainsi, pour les étiages, la courbe de tarage a baissé de l’origine à 1971 : ceci met en évidence l’instabilité du lit, car à la même cote s’écoule moins d’eau, et de faibles apports pour le débit de base. Ceci, nous l’expliquerions plus par une baisse du volume des ressources en eau que par une tendance au comblement du lit telle que suggérée par ORANGE et al. (1995) dans la période d'avant 1971. En revanche, le lit s’est creusé depuis 1971 selon ces auteurs, traduisant une autre dynamique de la charge de fond de l’Oubangui qui pourrait se comprendre par une augmentation de la compétence du fleuve (bien que le débit n’ait pas réellement augmenté), et aussi un changement de barème prenant en compte la cote 50 cm, au lieu de la cote 280 cm.

Selon les jaugeages réalisés (CALLEDE et al., 1992 ; WESSELINK et al., 1994), des classes de hauteur d’eau et de débit sont définies pour les principales périodes hydrologiques du fleuve à l’échelle annuelle : ce sont les hautes, moyennes et basses eaux. Les hautes eaux sont comprises entre les cotes à l’échelle 630 et 900 cm, ce qui correspond à des débits respectifs de 9 800 m3.s-1 et 16 300 m3.s-1 ; ce dernier n’étant jamais atteint à Bangui. Quant aux eaux moyennes, elles s’observent entre les cotes 300 et 630 cm pour lesquelles les débits équivalent à 4 000 et 9 800 m3.s-1. Enfin, en basses eaux les cotes varient de 300 cm à –100 cm, correspondant à des débits respectifs de 4 000 et 200 m3.s-1.

L’évolution interannuelle des débits extrêmes, que nous avons établie (Figure 71 a), montre une baisse régulière depuis la fin des années 60 jusqu’au début des années 90 ; depuis lors les débits tendent à augmenter, sauf pour les étiages où de très faibles débits s’enregistrent encore. Ce cycle hydrologique se traduit par l’inaptitude de la bathymétrie du fleuve à assurer le trafic fluvial à l’étiage.

Figure 71a) Evolution interannuelle des Q journaliers extrêmes de l’Oubangui à Bangui (1911-1999)
Figure 71a) Evolution interannuelle des Q journaliers extrêmes de l’Oubangui à Bangui (1911-1999)

Le régime de l’Oubangui présente un maximum en septembre, octobre ou novembre (Figure 71 b), et peut être assimilé au régime tropical boréal. Les crues annuelles se produisent fréquemment en octobre d’abord et en novembre ensuite, comme la fréquence mensuelle des crues nous le montre : 36 % en octobre, 29 % en novembre, et 8 % en septembre. Les étiages sont caractéristiques des mois de mars (34 %) et avril (33 %) ; la fréquence des minima est faible en février (2 %) et mai (3 %). Le choix de quatre années hydrologiques types nous permet d’observer l’importante variabilité des débits moyens mensuels de crue sur la période 1911-1999. Depuis 1970, les modules de l’Oubangui ne cessent de baisser, révélant la sécheresse qui caractérise l’évolution hydroclimatique de ces dernières décennies (WESSELINK et al., 1995 ; SERVAT et al., 1998). La baisse est de 60 % pour les débits d’étiage et de 39 % pour les modules annuels (ORANGE et al., 1995). Ces déficits pluviométriques ont touché l’ensemble du bassin-versant de l’Oubangui (SIRCOULON, 1976) bien que la pluie (P) n’ait pas changé à Bangui ; ceci s’explique par le fait que l’Oubangui est tributaire de la pluviométrie sur l’ensemble de son bassin. Si les lames précipitées sont relativement faibles sur l’ensemble du bassin, l’hydrologie à Bangui s’en ressent car elle dépend des apports du système.

Figure 71b) Q moyens mensuels de l’Oubangui à Bangui pour quatre années-types
Figure 71b) Q moyens mensuels de l’Oubangui à Bangui pour quatre années-types

Notre examen des données antérieures révèle un épisode déficitaire entre 1910 et 1922 et un autre, excédentaire, entre 1922 et 1936 ; ces indications soulignent l’existence d’une alternance de périodes sèches et humides, mais la diminution de la pluviométrie depuis 1970 a eu une incidence sur les modules du fleuve à Bangui (Figure 72). Ainsi, l’évolution des débits décennaux de l’Oubangui que nous avons établie montre deux séries de baisse de 1930 à 1960 et de 1970 à aujourd’hui, qui sont elles-mêmes entrecoupées d’une rupture durant la décennie 1960 car la ville de Bangui a connu quatre inondations dans cette période, responsable de forts débits annuels.

Figure 72 Débits décennaux de l’Oubangui à Bangui (1930-1990)
Figure 72 Débits décennaux de l’Oubangui à Bangui (1930-1990)