3.3. De la circulation de l’eau à l’échelle urbaine

Ce nouveau mode de fonctionnement en relation avec le fait anthropique est dû à la géomorphologie ou à la topographie qui attire les écoulements de par la faiblesse de la pente. Ainsi, la circulation de l’eau à l’échelle urbaine suit cette logique notamment dans les zones marécageuses qui participent à l’écoulement ou à la concentration des eaux de ruissellement par l’hydromorphie de leurs terrains argileux. Les eaux de ruissellement qui les gagnent ne peuvent s’infiltrer ni s’écouler à partir d’un certain niveau en raison de la faiblesse de la pente, c’est pourquoi nous parlons de manque d’exutoire. Toutefois, nous admettons que les marais sont globalement situés au-dessus du niveau de l’Oubangui, mais d’autres réalités sont que ces dépressions ont des pentes locales si faibles qu’elles ne peuvent chasser les eaux qui s’y concentrent. Le processus de ruissellement sur milieu hydromorphe soumet momentanément la ville à des débordements d’eau dans ces secteurs précis lorsque s’abattent des pluies de fortes intensités. C’est à la suite de l’identification de cette dynamique que le PNUD et l’OMS (1972) ont financé un programme d’assainissement et de drainage des eaux pluviales dont la réalisation a modifié la structure des cours d’eau marécageux du site, artificialisant de ce fait le réseau (Figure 36 : p. 97) ; cela n’implique pas que les problèmes d’assainissement à Bangui soient résolus. De plus, le rôle d’éponge que les zones marécageuses de Bangui (éponge de la zone inféroflux, des marais riverains de Ouango et de ceux du SO, des cours d’eau collecteurs Ngoubagara et Guitangola) ont joué dans les inondations de l’Oubangui en octobre et novembre 1999, mérite d’être signalé. N’eût été la présence de ces zones marécageuses, le centre-ville et quasiment les quartiers riverains eussent été sous l’eau (ou inondés). La majorité des habitations, qui ont colonisé non réglementairement les bas-fonds du sud-ouest, ont malheureusement été immergées aux trois quarts de leur hauteur (Planche X, Photo E), car depuis les inondations de la fin du XIXe siècle, l’Oubangui avait rarement débordé de son lit durant le XXe siècle : 1916, 1917, 1938, 1948, 1961, 1962, 1964, 1969, 1975 et 1999 (NGUIMALET, 2003 a). Lors de cet épisode, elle a pris de cours les nouveaux locataires de ces marécages connectés au fleuve via la Mpoko et les cours d’eau collecteurs urbains (Ngoubagara essentiellement) (Figures 6 et 36). En complément de ce rôle d’éponge, nous supposons que l’Oubangui draine la nappe phréatique des marais en basses eaux puisque c’est son ancien lit, ce qui renforce ses débits d’étiage dans ses environs immédiats (VII § 6.1).

Nous avons noté le rôle d’éponge des bas-fonds marécageux le long de l’Oubangui durant les inondations de 1999 ; ces marais et marécages ont constitué le lit holocène ou son ancien lit qui est aujourd’hui séparé du lit actuel par des bourrelets argilo-sableux, lesquels supportent la route riveraine. Ces bas-fonds communiquent actuellement avec le fleuve via la Sapéké (ou la Ngoubagara, le collecteur Kouanga) et la Mpoko dont le niveau à la confluence est toujours influencé par les eaux de l’Oubangui. Pendant cet épisode inondant, le fleuve a coulé dans son ancien lit. C’est ainsi que ces bas-fonds ont absorbé une partie des crues, de même que les affluents sus-cités. Voilà comment ces bas-fonds ont protégé la ville des inondations.

Par ailleurs, l’engorgement des sols par la nappe phréatique, qui tend à affleurer en surface crée l’hydromorphie ; celle-ci a un rôle hydrologique indéniable dans les bas-fonds. Elle n’a pas d’influence seulement sur la circulation de l’eau en surface, mais elle agit aussi sur l’équilibre des habitations qui s’écroulent rapidement lorsqu’elles ne sont pas solidement construites, ou qui s’enfoncent lorsque leur soubassement n’est pas fixé sur une couche ferme. Beaucoup de maisons sont victimes de cette hydromorphie ; elle se traduit par un excès d’humidité qui affecte les différents compartiments (murs, charpente, toitures, etc.). Ce processus est le résultat de la topographie et de l’abondance de l’eau dont bénéficient les zones humides de la ville tels que les marais du SO.