2.1. Les puits traditionnels ou nappes libres

Les puits traditionnels représentent la solution la plus classique et la plus courante d’approvisionnement en eau des villes ou des communes, mais l’emplacement d’un puits doit avoir un périmètre de protection immédiat d’une circonférence de 25 m (GUYOT, 1974), dont l’intérêt vise à protéger le captage des causes de pollution (fumier, étable, fosse d’aisances, …). Malheureusement, ces conditions ne sont pas remplies à Bangui.

L’origine des puits à Bangui remonte à la fondation du poste militaire en 1889 car antérieurement les autochtones ne se servaient que de l’eau de source ou de l’eau des marais ou rivières pour leurs besoins. C’est ainsi qu’une source potable a été découverte en 1894 aux confins de la mission (I § 1.3 : p. 26), à Gbangouma (du nom d’un cours d’eau), et a été aménagée par les Pères du Saint-Esprit 44 .

Les Pères de Saint-Paul, au moment de construire un grand internat au nom des enfants de la mission, ont aussi creusé un puits afin de disposer de l’eau, car la mission s’est implantée sur un témoin de plateau du même type que celui de Fatima. En fait, la découverte d’une source proche de la mission et le creusement de quelques puits fournissaient de l’eau de boisson et de l’eau à usage domestique, pour satisfaire les besoins d’une population locale dont la concentration autour du poste administratif et de la mission Saint-Paul, devenait de plus en plus importante dès la fin du XIXe siècle (NGUIMALET, 2000). Actuellement, la profondeur des puits à Bangui est fonction de la nature des terrains et de l’altitude : 2 m en moyenne dans les terrains argileux des bas-fonds inondables, et 4 à 5 m, voire plus dans les témoins de plateaux cuirassés ou latéritisés (atteignant 15 à plus de 20 m), comme dans les quartiers Foû, Gobongo ou Fatima.

Les puits traditionnels sont plus nombreux à Bangui, particulièrement dans les quartiers à développement spontané (Fig. 10 : p. 35), sans infrastructure ; les quartiers lotis ou urbanisés et desservis en eau courante en comptent mais de manière lâche, car dans ces quartiers ils ne viennent qu’en complément des besoins. NGBOKOTO (1988) a estimé les débits de quelques puits traditionnels (Tableau XXVII) ; leur localisation par quartier nous a permis de définir les unités de relief correspondantes : piémont, plateaux et plaine. La majorité des puits traditionnels ici considérés sont creusés majoritairement dans des terrains latéritisés et cuirassés, et schisteux ; les terrains argileux ne concernent que le puits du quartier Kpéténé. L’épaisseur de cette nappe phréatique superficielle est très mal connue.

Tableau XXVII : Débits mesurés dans les puits traditionnels à Bangui (in : NGBOKOTO, 1988, modifié)
Puits Quartier Unités de relief Débits (m3.h-1)
D1
D2
D3
D4
D5
D6
D7
D8
D9
-
Boy-Rabé Bafio
Kpéténé Mission
Gobongo Mission
Galabadja Marché
Galabadja 2
Boy-Rabé Kaïmba
Kpéténé
Boy-Rabé Bafio
Boy-Rabé Mandaba
Kassaï
Piémont
Piémont
Plateau / piémont
Piémont / plateau
Plateau
Piémont
Plaine
Piémont
Piémont
Piémont
1,2
4,2
2,4
0,3
0,6
1,2
1,2
6
3,6
7,2

Il existe par ailleurs un risque de contamination pour la majorité de la population qui s’alimente en eau de puits, tirée de la nappe phréatique superficielle. La proximité des fosses d’aisance et des puits est une source de contamination par infiltration et exfiltration de l’eau, notamment dans les quartiers populaires de Bangui où l’on peut trouver 1 à 3 puits pour 5 maisons. Jusqu’ici à Bangui, les efforts de protection et de purification de cette eau qui ravitaille plus des trois-quarts de la population « citadine », ont été presque inexistants. La prépondérance des maladies d’origine hydrique en est la conséquence, mais la nappe profonde elle-même ne semble pas épargnée par cette pollution d’origine humaine.

Notes
44.

Selon BOULVERT (2003, comm. orale), le premier puits fut creusé en 1895 par la mission noire qui construisit également le premier four à chaux à partir d’huîtres, les premières briques, car il manquait de l’eau potable.