5.1. Effet de l’ETR : les précipitations efficaces (PE)

La recharge des nappes phréatiques à partir des précipitations eut se calculer en utilisant le paramètre ETR, lequel se définit comme la réponse d’un milieu donné à la demande exercée par l’évaporation potentielle (ETP), selon la disponibilité de l’eau. Pour Bangui, nous avons obtenu l’ETR par la méthode de calcul du bilan hydrique de Thornthwaite (III § 2.2.3.4, Tableau XVII), à pas de temps mensuel, ce qui permet de suivre le rythme saisonnier de la disponibilité de l’eau qui équilibrerait le niveau des nappes phréatiques (Figure 110).

Le calcul du bilan d’eau selon la méthode de thornthwaite permet d’estimer la pluie efficace (« l’excédent » du tableau XVII) : c’est la quantité d’eau susceptible d’alimenter l’écoulement, directement ou par l’intermédiaire des nappes, compte tenu des prélèvements de l’évaporation, soit immédiats, soit par l’intermédiaire de stockage et de déstockages dans la tranche de sol soumise à l’évaporation (et dont la teneur en eau disponible constitue a « réserve hydrique » notée Ru).

Nous remarquons que les nappes se rechargent à partir du mois de juillet (Figure 110) lorsque la disponibilité en eau devient excédentaire par rapport à la Ru, et atteint son maximum en août, en septembre et en octobre ; les mois de novembre et de décembre qui annoncent le début de la saison sèche, voient leurs valeurs baisser régulièrement jusqu’en janvier. De février à juin, la recharge des réserves hydrologique est nulle, et les nappes enregistrent leurs bas niveaux. De ce fait, les pluies efficaces à l’échelle mensuelle suivent le rythme saisonnier des précipitations avec leur incidence comme moteur principal de régulation des ressources en eau de la ville. L’estimation des PE se chiffre entre 20 et 30 % des pluies à Bangui (§ 3).

Figure 110 Les termes du bilan de l’eau (1951-1989) d’après Thornthwaite à Bangui
Figure 110 Les termes du bilan de l’eau (1951-1989) d’après Thornthwaite à Bangui

Par ailleurs, la recharge de la nappe dépend aussi des conditions d’infiltration qui ne sont pas simples dans le détail. Une synthèse des travaux présentée par COSANDEY et ROBINSON (2000) montre une complexité des processus d’infiltration au travers de la zone non saturée, « l’eau qui arrive à la nappe pendant l’averse n’est pas de l’eau de pluie, mais de l’eau préexistante dans le sol qui est déplacée vers le bas par différentes vagues d’infiltration ». Ce processus est l’équilibrage hydrostatique qui aide à comprendre la réponse souvent rapide des nappes aux précipitations, surtout lorsqu’on est dans des matériaux peu perméables, et que le sol est déjà humide. Le battement de la nappe phréatique superficielle à Bangui est bien caractérisé par le processus d’équilibrage hydrostatique, notamment en saison pluvieuse d’après nos observations. Lorsqu’il pleut de manière relativement abondante, la nappe des puits traditionnels enregistre fréquemment une remontée du niveau hydrostatique de l’ordre de 30 à 50 cm environ, voire plus, pour une averse, malheureusement le manque de données piézométriques journalières ne nous permet pas de préciser ce rythme d’alimentation. De plus, ce qui frappe dans ce processus est que localement la remontée de la nappe dans certains puits s’accompagne d’un changement de la coloration de l’eau : de teinte limpide, l’eau devient trouble, tantôt laiteuse, tantôt rougeâtre en fonction de la topographie (vallées des rivières urbaines, proximité des zones marécageuses…) et des terrains (argileux/latéritisés). Par exemple, cela se serait produit lors des pluies exceptionnelles de 1999 où le niveau hydrostatique était très proche de la surface, ce qui avait donné lieu au fonctionnement de nombreuses sources à l’échelle de la ville (Planche V, Photo F), même sur le piémont ; quand il pleuvait, l’eau de ces sources et même celle de puits avait la couleur brunâtre des eaux de ruissellement. Ces observations attestent donc de l’influence directe des précipitations sur l’alimentation des nappes, laquelle est confirmée par la comparaison des pluies moyennes mensuelles (1985-1995) et du flux des eaux souterraines (Figure 111) ; la piézométrie de ce forage, puisant dans la couche aquifère du socle (ou couche profonde), a été régulièrement observée sur l’ancien site de la Direction Générale de l’Hydraulique de 1992 à 1994 à 14 m de profondeur (JICA, 1999 b). Ce schéma nous donne une idée précise de la variabilité saisonnière des flux hydriques.

D’après la figure 111, la fluctuation des eaux souterraines suit quasiment celle des pluies, avec un décalage temporel classique. Nous observons qu’à l’échelle saisonnière, cette fluctuation est nette, car la saison sèche par exemple, période chaude caractérisée par un déficit hydrique, voit le niveau des eaux baisser de novembre en mai (le plus bas niveau) avant qu’à la saison pluvieuse (P > ETP) une remontée du niveau de la nappe s’opère.

Figure 111 Rapport pluie-niveau des eaux souterraines à Bangui (d’après JICA, 1999, modifiée)
Figure 111 Rapport pluie-niveau des eaux souterraines à Bangui (d’après JICA, 1999, modifiée)